Refoulé de Monaco, il est surpris à Fontvieille dès le lendemain
«Vous comparaissez devant le tribunal correctionnel parce que vous êtes entré sur le territoire monégasque le jeudi 8 juin, alors que vous faisiez l’objet d’une mesure de refoulement la veille. On vous trouve à proximité de l’héliport de Fontvieille, sur la digue ouest. Quand on vous interpelle à cet endroit, vous avez obligatoirement dû passer par Monaco…» Le président Florestan Bellinzona essaie de démontrer au prévenu, menotté dans le box, sa présence en Principauté, vers midi trente, pas plus qu’hier (au jour du jugement). Mais ce ressortissant congolais, âgé de 38 ans, sans domicile ni profession, semble l’ignorer, ou bien feint-il l’étonnement ? Il se trouvait sur les lieux pour récupérer un sac… Mais il faudrait plus que des mots pour dissiper le malentendu. Même si les circonstances butent sur la faible proximité avec la frontière territoriale du pays voisin. «Vous nous racontez, poursuit le magistrat, qu’une personne devait vous remettre un paquet. Est-elle devin? Comment le savait-elle puisqu’elle n’était pas au courant?» Toutefois cette histoire, a priori banale, cache une situation difficile à dénouer. Le prévenu a été surpris aux abords d’établissements scolaires à rechercher des contacts avec des enfants. «Votre comportement aux abords de l’école de la Condamine, souligne le président, et votre dissimulation derrière un buisson de celle de Fontvieille, ont compromis la tranquillité de l’ordre public. C’est la raison pour laquelle le Ministre d’État a pris cette mesure.» La suite des débats démontrera que cet individu est également en situation irrégulière dans l’Hexagone depuis plus d’une décennie. Comment vit-il sans argent et sans résidence? A-t-il des problèmes ? Il s’explique devant les juges. « J’ai un enfant à Paris et je suis dans ce pays depuis dix-sept ans. J’ai quelques sous en étant bénévole pour la Mission France…» Réaction instantanée du président: «Si tant est que votre identité soit la bonne! Il y en a trois différentes dans ce dossier… » Les interrogations se succèdent également à l’heure des réquisitions. «Que vient faire ce personnage au comportement trouble, ici? s’enquiert le procureur Alexia Brianti. Vientil chercher de l’aide? Les faits inquiétants ne le démontrent pas ! Monsieur est mis en cause dans une tentative d’enlèvement et sa forte attirance pour les enfants. Attendait-il quelqu’un en France ? Les policiers monégasques ne vont pas s’amuser à poursuivre une personne qui n’est pas sur leur territoire. Il faut arrêter de polémiquer pour rien! De plus, il n’a aucun document sur lui! Quelle est sa véritable identité? Pareille provocation doit être sanctionnée de dix à quinze jours ferme. » La défense jouera sur les limites territoriales aléatoires du môle de Fontvieille, sans aucune indication ou panneau pour les matérialiser. « Je ne partage pas votre vision des faits, lance l’avocat Clyde Billaud à la formation collégiale à cette audience. Mon client a passé la nuit sur un chantier naval de Cap-d’Ail. Il n’avait pas à traverser Monaco. D’autant que sur la digue, une petite parcelle est en Principauté. Il y a une imprécision de la part des policiers, car toute cette jetée est à proximité de l’héliport. Cet homme s’est expliqué maladroitement à la Sûreté publique. Quant au sac, il contenait des effets personnels pour les échanger contre des vêtements propres en espérant que la personne viendrait. Il y a un doute sur les faits. Essayez de ne pas l’emprisonner… » Le tribunal suivra la peine maximum requise par le ministère public : quinze jours à la maison d’arrêt.