Protéger les journaux du pillage de leur contenu
L’ancien journaliste et député européen Jean-Marie Cavada milite pour l’adoption d’une loi européenne visant à mettre fin à cette pratique instituée par les géants d’Internet
L « a presse est le seul univers où le vol est autorisé ! » Cette formule imagée du députée Jean-Marie Cavada résume le combat qu’il mène à Bruxelles pour faire adopter des règles visant à la protection des contenus des journaux. Ces contenus, produits chaque jour par les sociétés de presse, au premier rang desquels le Groupe NiceMatin, sont, en effet, aspirés et diffusés gratuitement par les sites Internet. En France, la presse régionale emploie cinq mille journalistes, recourt à vingt mille correspondants, assume des investissements et des charges de fonctionnement informatiques. Les technologies numériques peuvent permettre à des tiers de s’approprier ces contenus si précieusement réunis et, sans aucune contrepartie, d’en tirer profit pour eux-mêmes. A la manoeuvre de « cette philosophie du pillage », Jean-Marie Cavada pointe les GAFA (Google, Amazon et Facebook) : « Les éditeurs de presse français sont dans la situation des pays du Golfe entre les deux guerres mondiales : ils avaient la matière première, mais ne raffinaient pas et ne distribuaient pas. C’est ainsi qu’ils ont enrichi les compagnies pétrolières ! »
Un droit qui ne gêne pas le particulier
Chaque année, on estime à 536 milliards d’euros le chiffre d’affaire réalisé par les GAFA sur le réseau européen. Sollicité par l’Union de la presse en région(UPR), le député européen défend donc le projet d’un « droit voisin » reconnu aux éditeurs : « Un droit qui ne contredit pas le droit d’auteur mais contribue à le faire respecter, qui protège les contenus, y compris les cours extraits, première source de l’audience des plates-formes et des agrégateurs, qui ne gêne pas le particulier et qui inclut le numérique et l’imprimé. » Très concrètement, le projet repose sur trois règles qui seraient imposées aux fournisseurs d’accès : la responsabilité sécuritaire (obligation de nettoyer ses réseaux de toute propagande djihadiste, révisionniste et de tout contenu pédopornographique), interdiction de faire commerce de contenus qui n’ont pas été achetés et obligation pour les GAFA de payer leurs impôts là où sont leurs consommateurs (sur la base des adresses IP). Jean-Marie Cavada affirme que si la première et la troisième règle sont bien engagées, la bataille s’annonce plus délicate pour le second point. « Une grande campagne doit s’engager dans chaque région pour convaincre ses députés européens de la nécessité de se mobiliser pour l’adoption de ce texte » insiste Jean-Marie Cavada. Ce vote devrait intervenir à la fin de l’année.