Vers une vaccination obligatoire accrue pour les enfants?
Réactions épidermiques en perspective ! La nouvelle ministre de la Santé Agnès Buzyn a relancé un débat sensible en annonçant, hier, qu’elle réfléchissait à rendre « obligatoires pour une durée limitée » onze vaccins pour enfants au lieu de trois, dans un contexte de défiance grandissante envers la vaccination. Aujourd’hui seuls trois vaccins infantiles sont obligatoires : le DTP pour diphtérie (depuis 1938), tétanos (depuis 1940) et poliomyélite (depuis 1964). Huit autres, dont la coqueluche, l’hépatite B ou la rougeole, sont seulement recommandés. «Ce double système est une exception française. Cela pose un vrai problème de santé publique », estime Agnès Buzyn dans une interview au Parisien/Aujourd’hui en France. Elle rappelle que « la rougeole réapparaît » et qu’elle a causé la mort de 10 enfants depuis 2008. «Le taux de couverture est de 75 % alors qu’il devrait être de 95 % », souligne-t-elle. « Nous réfléchissons donc à rendre obligatoires les onze vaccins (poliomyélite, tétanos, diphtérie, coqueluche, rougeole, oreillons, rubéole, hépatite B, bactérie Haemophilus influenzae, pneumocoque, méningocoque C) pour une durée limitée, qui pourrait être de cinq à dix
ans », a déclaré la ministre. Ce dossier des onze vaccins infantiles obligatoires avait été engagé par la précédente ministre de la Santé, Marisol Touraine, qui ne l’a pas mené à terme avant la fin du quinquennat Hollande.
Incohérence et méfiance
Or, le temps presse. Les trois vaccins obligatoires font l’objet de trois injections groupées (DTP) avant l’âge de 18 mois. Mais depuis 2008, le DTP seul n’est plus commercialisé : les laboratoires l’associent à d’autres vaccins recommandés dans des vaccins polyvalents, vendus plus chers. En février, le Conseil d’État avait pointé cette incohérence en donnant six mois au ministère pour la lever. Mais au pays de Louis Pasteur, père de la vaccination moderne, la méfiance est grandissante : les anti-vaccins fustigent leur dangerosité supposée (notamment en raison des adjuvants comme l’aluminium que certains contiennent) et accusent les laboratoires pharmaceutiques de privilégier la rentabilité à la santé des enfants. Selon une étude annuelle publiée en octobre pour le compte de l’organisation des industriels du secteur, 69 % des personnes interrogées seulement font confiance aux vaccins (- 2 points par rapport à 2015).
« Un cadeau aux labos »
L’extension du nombre de vaccins obligatoires serait « un recul sans précédent des libertés », s’est insurgé Augustin de Livois, président de l’Institut pour la protection de la santé naturelle (IPSN), association à l’origine de la plainte auprès du Conseil d’État. La députée européenne EE-LV Michèle Rivasi a de son côté dénoncé un « cadeau fait aux laboratoires » en pointant du doigt « la multiplication des scandales sanitaires à répétition ».