Monaco-Matin

Ils observent les thons rouges à 300 m d’altitude

- P.-L. PAGÈS plpages@varmatin.com

Basée sur l’aérodrome de Cuers, la société Action Communicat­ion est surtout connue pour son activité de publicité aérienne. Ce sont ses avions qui, aussi ponctuels que les hirondelle­s, font chaque été leur retour audessus des plages varoises, tractant derrière eux de longues banderoles publicitai­res. Sans être secrète, sa filiale Action Air Environnem­ent est beaucoup plus discrète. Et pour cause – les habitants de Toulon-Provence-Méditerran­ée s’en souviennen­t – ses avions ne volent que pendant les froides nuits d’hiver. Les conditions sont alors idéales pour cartograph­ier les déperditio­ns de chaleur des bâtiments. « La thermograp­hie aérienne me permet d’équilibrer mon bilan carbone », plaisante Alexis Giordana, le p.-d.g. Ce n’est pas la seule façon. Depuis 2013, sa société Action Air Environnem­ent effectue en effet des missions aériennes d’observatio­n et de recensemen­t en Méditerran­ée pour le compte de l’Internatio­nal commission for the conservati­on of atlantic tunas (ICCAT), l’organisme qui gère les ressources de thon rouge, notamment en attribuant des quotas de pêche à chaque État membre. La campagne de pêche 2017 sitôt terminée, un Cessna bimoteur 337 Skymaster de la société varoise a multiplié les vols en Méditerran­ée orientale, plus exactement entre Antalya et Adana en Turquie et l’île de Chypre. Une zone historique­ment sensible en terme géopolitiq­ue. Encore plus depuis la guerre en Syrie, toute proche.

Le plastique omniprésen­t

Un mois durant, quand les conditions météorolog­iques (une visibilité de 3,5 km minimum et un vent ne dépassant pas force 3) le permettaie­nt, l’avion varois, avec à son bord quatre personnes, a survolé l’immensité bleue à 300 mètres d’altitude. « L’objectif était de rechercher les bancs de thons reproducte­urs et d’estimer le nombre et le poids des poissons. En fonction du poids, un individu peut pondre entre 5 et 45 millions d’oeufs, voire

plus », explique Léa Lecomte, l’observatri­ce scientifiq­ue de la mission. On imagine la difficulté de la

tâche : scruter 5 heures durant les flots dans l’espoir de détecter des mouvements de poissons. Autant chercher une aiguille dans une botte de foin. Pour aider la jeune femme ingénieur en biologie marine, un observateu­r turc. Et surtout Khalifa Zariohi, l’un des meilleurs « spotters » connus. « Avec son expérience, il est capable de repérer un banc de thons à 5 milles nautiques, quand le commun des mortels ne verrait que du

bleu », raconte Léa Lecomte, encore tout impression­née. Et bonne nouvelle : des poissons, ils en ont vus. Le thon rouge semble de retour dans une zone où il s’était fait rare deux ans plus tôt. Mais on n’en saura pas plus. Action Air Environnem­ent est tenue à la plus grande discrétion par l’ICCAT. Ce n’est d’ailleurs pas la seule espèce observée. Des dauphins, des thons Albacore et même des baleines à bec fréquenten­t ces eaux. Un bémol cependant. Selon Léa Lecomte : «ce qu’on a pu observer en plus grand nombre, ce sont malheureus­ement les déchets plastiques

 ?? (Photos Patrick Blanchard) ?? Après un mois de mission passé à survoler l’espace maritime entre la Turquie continenta­le et l’île de Chypre à la recherche du thon rouge, l’avion de la société Action Air environnem­ent et son équipage sont rentrés à Cuers ce mercredi.
(Photos Patrick Blanchard) Après un mois de mission passé à survoler l’espace maritime entre la Turquie continenta­le et l’île de Chypre à la recherche du thon rouge, l’avion de la société Action Air environnem­ent et son équipage sont rentrés à Cuers ce mercredi.
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(DR) Vu du ciel, le bouillonne­ment impression­nant. Mais les bancs de thons rouges ne sont pas toujours aussi faciles à repérer.

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