Deux soeurs écopent de cinq jours ferme pour «vol au rendez-moi»
Une nouvelle technique d’escroquerie vise les commerçants en Principauté. Pour preuve : l’audience des flagrants délits avec la comparution, menottées, devant le tribunal correctionnel, de deux soeurs résidant à Cagnes-sur-Mer. Françaises, célibataires et sans profession, Paulette et Catherine ont employé une forme de délinquance astucieuse: «le vol au rendez-moi». Un mode opératoire assez simple! La ruse consiste à acheter un objet de faible coût en présentant un billet à valeur faciale élevé. Mais le chaland a toujours quelques centimes de manière à faciliter l’appoint ! Le temps qu’il recherche les piécettes dans son portefeuille, il demande au commerçant de lui rendre la monnaie sur le gros billet qu’il avait sorti. Mais jamais donné… Sur le terrain, plus concrètement, le 23 juin dernier, les deux femmes se présentent à 12 h 40, pour la première, et 12h50, pour la seconde, au bar Salad’In, 4, rue des Açores. À tour de rôle, elles commandent un Coca à 2,50 euros. Pour payer leurs canettes, chacune tend un billet de 50 euros et propose les 50 centimes pour faire l’appoint. Profitant de l’affluence et de l’application du commerçant à servir sans trop d’attente ses clients à l’heure du déjeuner, aînée et cadette récupèrent les 48 euros et remballent successivement leurs billets au portrait de la «princesse Europe».
« Je ne crois pas à la coïncidence »
«Le gérant appelle les services de police, poursuit le président Florestan Bellinzona, et on vous retrouve quelques mètres plus loin en train de fumer. Pour quelle raison avezvous fréquenté ce commerce séparément?» Les deux prévenues contestent les déclarations du plaignant. «C’est peut-être une erreur, assure la sexagénaire. Il n’y a aucune manoeuvre! Si on voulait faire un coup pareil, nous ne serions pas venues à Monaco». «Je n’ai pas suivi ma soeur, ajoute la quinquagénaire, parce que j’attendais de finir ma cigarette et elle était partie sans rien me dire. Et j’ai bien donné le billet…» Le magistrat note que les deux prévenues détenaient respectivement dans leurs poches 320 euros et 445 euros. Il demande d’où viennent ces sommes alors qu’une touche le RSA, et l’autre le RMI ? Une partie aurait été gagnée aux machines à sous ! Quant à leurs casiers judiciaires, celui de Paulette comporte deux condamnations pour conduite en état d’ivresse. Pour Catherine, la mention concerne un vol en réunion. C’est tout de même fort pour le procureur Cyrielle Colle. «La victime, serviable, se fait escroquer! Et si la seconde se présente dans le commerce, c’est parce que la combine a fonctionné à 100 % avec la première. Je ne crois pas à la coïncidence. Le commerçant a attendu que le vol soit consommé pour l’attraper. Une peine de dix jours ferme s’impose afin que ces dames ne reviennent plus à Monaco.» Pour la défense, c’est la parole de l’un contre celle de l’autre. «Mes clientes estiment qu’il y a une erreur, rappelle l’avocat Clyde Billaud. Dommage que dans pareil commerce il n’y ait pas de vidéosurveillance. Et pourquoi n’a-t-on pas constaté dans la caisse du demandeur s’il n’y avait pas les billets de 50 euros ? Il faut retenir leur bonne foi dans ce dossier sans aucun témoignage. Clémence!» Le tribunal préférera réduire de moitié les réquisitions du ministère public : cinq jours à la maison d’arrêt.
* Les prénoms ont été modifiés.