A n’y plus rien comprendre
« Bref, un chat n’y retrouverait pas ses petits. »
Un Président venu de la gauche le lundi, un Premier ministre venu de la droite le mardi, c’en est trop pour le PS et les Républicains qui y perdent leur latin. Normal. Une bonne partie des mesures annoncées par Edouard Philippe dans son discours de politique générale pourrait être acceptée, et même recommandée, par les Républicains, désormais baptisés Canal historique. Et d’abord, son constat : en écho à la phrase de François Fillon sur la France dont il héritait en , « au bord de la faillite », Edouard Philippe a parlé, lui, en boxeur qu’il est, d’une France « dans les cordes. » Même accord sur une partie au moins, de la ligne politique : diminution de la dette excessive de la France ; retour à la règle, fatidique, des % ; restauration nécessaire de la confiance, qui, comme on sait, ne se décrète pas ; rapprochement de l’Etat et des territoires, dans un délicat équilibre entre jacobins et girondins, aucune de ces annonces ne peut faire reculer d’horreur les députés L.R. Comme l’annonce du gel du point d’indice des fonctionnaires, ou même le non-renouvellement de ceux d’entre eux qui partent à la retraite. Ces recommandations figurent en effet peu ou prou dans le programme politique des Républicains. Même embarras du côté socialiste. Qui, parmi les députés PS peut s’élever contre la préservation du système de sécurité sociale, « patrimoine, a dit Edouard Philippe de ceux qui n’ont rien. » ? Qui, pour s’opposer à un accès égal aux soins de santé, à la lutte contre les déserts médicaux ou contre la pauvreté, au pass-culture pour les jeunes désargentés qui aiment la lecture. Lequel des parlementaires socialistes pourrait s’élever contre la volonté de dialogue social ? Le discours de politique générale du Premier ministre a donc semé, et ce n’est pas pour lui déplaire, le désarroi chez les Républicains, le malaise chez les socialistes. Tout au plus les uns, à droite, demandent-ils où diable le chef du gouvernement trouvera les économies nécessaires pour répondre aux sévères injonctions de la Cour des comptes. Tandis que dans les rangs socialistes, ou plutôt dans ceux de la nouvelle gauche, nom choisi pour l’intitulé de leur groupe parlementaire, certains craignent que, derrière les propos amènes et tranquilles d’Edouard Philippe, ne se profile une politique d’austérité qui ne dit pas encore son nom. Ainsi le petit groupe PS est-il apparu divisé entre ceux qui ont voté pour ou contre la confiance au Premier ministre, et ceux qui se sont finalement abstenus. La confusion est encore plus grande de l’autre coté de l’hémicycle. Après avoir mis en cause personnellement le Premier ministre qu’il a accusé d’avoir trahi ses anciens camarades, le président du groupe républicain, Christian Jacob n’a finalement pas voté la censure, et s’est contenté de s’abstenir avec une majorité de ses collègues. Quant au groupe des Républicains dit constructifs, il s’est divisé entre l’abstention et la confiance. Bref, un chat n’y retrouverait pas ses petits. C’est ainsi que Jean-Luc Mélenchon a beau jeu de se dire le seul réel opposant à Emmanuel Macron. Lui aussi profite du malaise des uns, du désarroi des autres.