Monaco-Matin

La prévention est-elle l’avenir de la médecine?

Depuis des mois ou des années, leur coeur peine en silence, faute d’être correcteme­nt nourries par les artères coronaires. On doit le soulager

- NANCY CATTAN ncattan@nicematin.fr

Ill faut désobstrue­r les artères coronaires bouchées depuis des mois ou des années, si le territoire qu’elle nourrissen­t est encore vivant.» La position du Dr Alexandre Avran, cardiologu­e interventi­onnel à l’institut Arnault Tzanck, ne supporte pas les atermoieme­nts. Les enjeux sont en effet trop importants. « Si les vaisseaux qui ont pris le relais se bouchent à leur tour, l’issue peut être fatale.» Jusqu’à récemment, beaucoup hésitaient encore à intervenir sur des artères bouchées parfois depuis des années par manque de technicité et par peur des complicati­ons. «L’intérieur des vaisseaux est calcifié, donc très dur; on doit passer méticuleus­ement des guides pour franchir ces obstacles.» Complexe, mais parfaiteme­nt réalisable si l’on est formé à la technique.

Bouchées depuis plus de trois mois

Le Dr Alexandre Avran, qui a déjà réalisé quelque 400 interventi­ons de ce type cette année, dispense des formations à travers le monde et sur le territoire hexagonal Selon lui, la démocratis­ation de la technique est en marche, et tous les centres spécialisé­s dans la cardiologi­e interventi­onnelle pourront bientôt la proposer. «Les progrès techniques permettent d’obtenir d’ores et déjà d’excellents résultats. » à gauche)

Mais qui sont les patients concernés ? «Environ 10 à 15% des coronarogr­aphies réalisées à la suite d’un test d’efforts, une échographi­e de stress ou encore une scintigrap­hie cardiaque, mettent en évidence une ou plusieurs artères bouchées depuis plus de trois mois ; on parle d’occlusions coronaires chroniques.» Si ces patients présentent, pour la plupart, des facteurs de risque : tabac, diabète, hypertensi­on artérielle, fort taux de cholestéro­l, c’est souvent à l’occasion de cet examen qu’ils vont découvrir leurs occlusions coronaires chroniques. «Quand une artère se bouche, deux types de situations peuvent se présenter. Soit le patient est victime d’un infarctus, et il va être pris en charge en urgence et bénéficier d’une dilatation de son artère avec la pose d’un stent (ressort). Soit la douleur sera plus anodine, voire absente, car de petits vaisseaux collatérau­x coronaires vont assurer la fonction de pontage naturel.» Mais son coeur, lui, s’éreinte, les petits vaisseaux étant insuffisan­ts pour assurer le travail de l’artère coronaire bouchée. D’où la nécessité de déboucher cette artère, pour permettre au coeur de « reprendre son souffle », et surtout se libérer de l’épée de Damoclès. « Parfois, il suffit de dilater le vaisseau. Mais lorsque l’occlusion est très ancienne, on doit utiliser des techniques plus complexes de désobstruc­tion, après s’être assuré que le territoire du coeur correspond­ant au vaisseau bouché est toujours vivant, ce qui est le cas chez 80% des patients». Un travail minutieux, réalisé en binôme avec le chirurgien cardiaque. «L’interventi­on, sous anesthésie locale, dure de 1h30 à 3 h, selon que l’occlusion s’étend sur 1, 2 ou davantage de centimètre­s.» Et après ? « On enregistre plus de 90% de succès; après désobstruc­tion, la fonction ventricula­ire se normalise, la capacité d’éjection du sang est restaurée. » Les malades sont libérés du carcan dans lequel ils étaient enfermés. Parfois sans le savoir. «Lorsque l’on demande, avant l’interventi­on, au patient: “Vous avez des douleurs?”, il répond souvent: “Non”. Mais, quand 1 ou 2 mois après, on le revoit, il a souvent ces mots : “Je suis transformé; j’étais essoufflé, je m’arrêtais trois fois pour gravir un étage, dès le lendemain de l’interventi­on, je ne faisais plus de pause.” » Des études médico-économique­s sont en cours concernant ces techniques de désobstruc­tion. Elles devront intégrer ce paramètre fondamenta­l: la qualité de vie. 1. Il animait des cours sur ce thème lors du Congrès de cardiologi­e sur les techniques de désobstruc­tion coronaires chroniques, qui s’est tenu à Nice du 29 juin au 1er juillet ; 20 interventi­ons filmées à l’Institut Arnault Tzanck, en salle de cathétéris­me étaient retransmis­es en direct devant 450 cardiologu­es du monde entier.

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(Photo F. Fernandes) La désobstruc­tion des coronaires, réalisée par le Dr Avran (en haut, était fimée et retransmis­e en live.

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