Pierre-André Chiappori, chercheur immortel
Élu à l’Académie des sciences morales et politiques, il est le deuxième Monégasque à entrer à l’Institut de France, deux siècles après François-Joseph Bosio
Deux siècles que la Principauté ne comptait plus d’immortel parmi ses ressortissants. Il y a eu François-Joseph Bosio en 1816; en 2017, voici Pierre-André Chiappori, élu à l’Académie de sciences morales et politiques, dans la section Économie politique, statistique et finances. Il est devenu l’un des immortels de l’Institut de France, occupant le fauteuil laissé vacant par le décès de l’universitaire français Pierre Bauchet. «Un honneur qui fait un drôle d’effet », confie le chercheur en sciences économiques, établi depuis deux décennies aux États-Unis, qui est venu retracer son parcours devant l’audience du Monaco Press Club. Il avoue ressentir « un sentiment d’humilité quand on voit la qualité des membres de l’académie ». Une académie très active, qui se réunit tous les lundis «qui va m’amener à passer plus de temps en Europe dans les prochaines années ».
Professeur à l’université de Columbia
Car depuis vingt ans, PierreAndré Chiappori a développé ses recherches aux États-Unis. D’abord à l’université de Chicago, puis à celle de Columbia où il occupe la chaire E. Rowan and Barbara Steinschneider. « À l’époque, nous avions choisi de partir pour trois ans avec mon épouse (également chercheuse). Arrivés sur place, nous avons vu ce qu’était la force d’une université américaine, extraordinaire machine à fabriquer du savoir. Je pense que je n’aurais pas fait les mêmes recherches en France. Aux États-Unis, il est possible de bien gagner sa vie en faisant seulement de la recherche et de l’enseignement. » Du plus loin qu’il s’en souvienne, cet ancien élève du lycée Albert-Ier se remémore avoir toujours eu envie de faire de la recherche, « et je n’ai jamais regretté mon choix ». Il intègre l’École normale supérieure en 1974. Agréé de mathématiques en 1977, il obtient ensuite un doctorat en sciences économiques à l’université Paris I Panthéon-Sorbonne en 1981. «J’ai énormément appris lors des discussions sans fin entre étudiants. On se forge une culture générale de manière agréable. » Sa carrière s’oriente sur l’économie de la famille. « La famille est l’unité de production la plus importante de la société, l’investissement du capital humain part de la famille. Ce sont des sujets que je trouve toujours autant fascinants, même après avoir entamé un travail dessus voici quarante ans. » Commentant ses travaux depuis plusieurs décennies, Pierre-André Chiappori, en répondant aux questions du public, a livré sa vision du monde actuel, évoquant «une spirale des inégalités dans la société qui joue certainement un rôle dans la montée des populismes ». Une chose qui le rend optimiste malgré tout ? «Les femmes sont aujourd’hui plus éduquées que les hommes. »