Monaco-Matin

Vallées : l’épineuse survie des auberges

Dans l’arrière-pays, hôtels ou restaurant­s peinent à trouver leur exploitant. Les mairies prennent le relais, avec plus ou moins de succès

- RAPHAËL AFLALO

Il faut avoir la foi ! » Pauline et Christophe Billau, gérants de l’auberge de la Quintessen­ce à Roubion depuis janvier, en savent quelque chose. Aubergiste­s étoilés, ils suent sang et eau pour dynamiser leur activité. « C’est du sport de gérer une auberge, il faut travailler. Mais quand on veut, on peut. » Ce couple est pourtant une exception. Dans l’arrière-pays niçois, l’initiative privée décline, si bien que les municipali­tés se sont emparées du problème, en créant des auberges communales, propriétés des villages, données en location-gérance à des exploitant­s. Le cas de Bairols, village perché à 850 mètres sur la route de la Tinée, est symptomati­que. Charles-Angelin Buerch, le maire, se dit « chanceux » : après deux mois et « au moins quarante heures passées au téléphone », entre avril et juin, il a enfin trouvé des gérants pour l’auberge communale du Moulin : Christian Keller et Frédéric Buzet. Ce dernier, étoilé, a eu un coup de coeur : «C’est un dernier défi avant la retraite. » L’établissem­ent a rouvert le 29 juillet. « On a perdu la saison, mais il ne faut pas se décourager. C’est un cadeau du ciel que vous [Nice-Matin] soyez là. On crève de ne pas être connus » ,regrette le maire.

« Si l’auberge ne marche pas, le tourisme ne marche pas »

Pourtant, Bairols a tout pour réussir. « Le village est à vocation touristiqu­e, et on est tout près de Nice », assure Charles-Angelin Buerch. Du fait de son altitude, le lieu profite d’une vue imprenable, à 180° sur le Mercantour. Les rues, les bâtiments…

Tout ou presque a été refait au cours des vingt-cinq dernières années. Sauf que « si l’auberge ne marche pas, le tourisme ne marche pas », fait remarquer le maire. La visite continue, à table. Là, le potentiel du village s’exprime aussi dans l’assiette. Christian et Frédéric proposent une carte qui n’a rien à envier à celle d’un grand restaurant. Croquettes de joue de porc, vitello tonato, brandade de morue… La cuisine est savoureuse et met en valeur le terroir local.

« Mêmes difficulté­s que les déserts médicaux »

Tout le monde n’a pas la chance de Bairols. Dans la vallée, nombreuses sont les municipali­tés qui ne parviennen­t pas à dénicher d’exploitant. À 30 km au nord, à Roure, le maire, René Clinchard, se lamente : « On galère,

on galère tous. » L’auberge Le Robure n’a pas trouvé de repreneur, après le départ des derniers gérants, en décembre. « J’ai tout essayé: lycées hôteliers, CCI… et même Leboncoin. Et quand on trouve un exploitant, rien n’est acquis, car peu s’installent sur le long terme. Ce n’est pas évident de venir vivre en montagne. On fait face aux mêmes difficulté­s que les déserts médicaux. Mais je ne baisse pas les bras. » Même son de cloche à Ilonse. Pour son maire, Richard Lions, «la vie en montagne peut attirer, mais aussi rebuter les gens de la ville. De manière générale, j’ai l’impression que les gens ont peur de s’investir. » Peur de ne pas avoir de clientèle, impératifs familiaux, distance des services publics… Les freins à la vie dans l’arrière-pays sont nombreux.

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à Bairols a rouvert le  juillet, après de longs mois de fermeture. De gauche à droite : Frédéric Buzet, CharlesAng­elin Buerch, le maire, et Christian Keller.
(Photo Raphaël Aflalo) L’Auberge du Moulin à Bairols a rouvert le  juillet, après de longs mois de fermeture. De gauche à droite : Frédéric Buzet, CharlesAng­elin Buerch, le maire, et Christian Keller.

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