L’ombre de la Camorra au procès d’un passeur
Gennaro, Napolitain de 26 ans, a été interpellé jeudi à la sortie de l’autoroute à Menton, en provenance de l’Italie. Une fois de plus, les forces de l’ordre ont appréhendé un automobiliste transportant des sans-papiers à bord d’un véhicule qui venait de passer la frontière. Présenté hier en comparution immédiate au tribunal correctionnel de Nice, il se défend d’avoir joué les passeurs. Son profil ne manque pourtant pas d’intriguer… Il est 22h30 passé quand le suspect se heurte à un contrôle routier. À son bord, un Algérien et un Tunisien, tous deux dépourvus de papiers d’identité. Gennaro affirme qu’il connaissait l’un d’eux, lequel aurait demandé à emmener un comparse avec lui. « Il a peut-être été négligent, mais il ne pouvait pas savoir que son passager était en situation irrégulière », plaide Me Benjamin Ferrier, l’avocat du prévenu.
Prison avec sursis
Problème : l’intéressé est mis en cause par ses passagers. Selon eux, il devait les conduire en France, et percevoir 150 par tête pour prix de ses services. Autre souci, pointé par le procureur Caroline Chassain : de l’autre côté des Alpes, Gennaro est « connu pour accointances avec la Camorra », la tentaculaire mafia napolitaine. « Et on sait qu’elle est très impliquée dans ce trafic d’êtres humains. C’est un petit rouage dans cette grande machine que sont ces réseaux très organisés… » Un « petit rouage » doté d’un salaire modeste - 1500 mensuels - « qui fait cela pour arrondir ses fins de mois » ,estime le procureur Chassain. Et qui, comme bien d’autres, profiterait d’une « migration économique qui a pris le pas sur la migration en provenance des zones de conflit ». Dès lors, le parquet requiert huit mois de prison ferme avec mandat de dépôt. Le tribunal semble moins convaincu. Il reconnaît Gennaro coupable d’aide à l’entrée irrégulière en France, mais s’en tient à une peine d’un an de prison avec sursis. Avant de le laisser repartir, le président Christian Mour lui lance : « Si vous revenez en France, revenez avec une voiture vide… »