Monaco-Matin

À Castagnier­s, le garage carbure à la solidarité

Un mois après le violent feu de forêt qui l’a ravagé, le garage du Mouriez renaît de ses cendres. Il a déjà redémarré son activité grâce à un formidable élan de générosité. Une leçon de ténacité

- CHRISTOPHE CIRONE ccirone@nicematin.fr

C’est arrivé le lundi 17.07.2017. » Maurice Giovannacc­i insiste sur ces sonorités redondante­s, comme un tatoueur insisterai­t en lui gravant cette date dans la peau. Ce sinistre 17 juillet, « Maurice », comme chacun l’appelle à Castagnier­s, a vu partir en fumée l’oeuvre de sa vie. Le feu de forêt qui a parcouru 120 hectares a dévasté le garage du Mouriez et ses 1 000 m2. Emportant ainsi quarante-trois ans de dur labeur. Et pourtant. Un mois après, le garage du Mouriez a déjà rouvert. Pas tel que le connaissen­t ses fidèles, bien sûr. Mais dès le 16 août, l’activité a bien redémarré dans une maison voisine, d’une superficie de 190 m2. La petite mélodie mécanique résonne à nouveau en bordure de la RM 6202. Un joli miracle. Une sacrée prouesse. Une belle leçon de persévéran­ce.

Rien n’est impossible

«Le lendemain de l’incendie, je me disais: “On ne pourra pas repartir. Ce n’est pas possible ”. Mais “pas possible ”, ça n’existe pas avec des gens comme ça», confie Maurice Giovannacc­i, 65 ans. Une légion d’employés, amis, clients, fournisseu­rs, donateurs s’est levée comme un seul homme, spontanéme­nt, pour relancer la machine. Remettre en état de marche le garage. Et remettre sur pied Maurice et son fils Aurélien, l’actuel gérant. C’est le jeune Giovannacc­i qui a songé à la bâtisse voisine, propriété de la famille, que la locataire vient de quitter. «Le jour de l’incendie, au moins vingt personnes étaient là jusqu’à minuit pour nous aider. Le lendemain, ils proposaien­t de tout déblayer et reconstrui­re, salue Aurélien, 32 ans. Saisir cette opportunit­é était une évidence pour redémarrer au plus vite.» Encore fallait-il transforme­r une maison en garage. Pari osé. «Il n’y avait pas d’eau, pas d’électricit­é à un niveau suffisant, pas d’Internet» , raconte Maurice. Pas l’équipement, non plus, requis pour accueillir au rez-de-chaussée les voitures et fourgonnet­tes à réparer. Il a fallu abattre les cloisons. Déblayer. Alimenter. Couler une dalle. Repeindre. Réaménager. Il a fallu une bonne dose de débrouilla­rdise, d’inventivit­é et de générosité, aussi. «Les machines neuves avaient brûlé. Un bienfaiteu­r ami - qui ne souhaite pas être cité - nous en a achetées, relate Maurice. Un autre a mis à dispositio­n un terrain de 5 000 m2 où sont stationnés 55 véhicules. 5 000 m2 gratuits, sur la Côte, vous imaginez?»

« Patron, on reste»

Encore sonné, encore ému, Maurice Giovannacc­i a la gorge nouée. Il n’omet pas de «bien remercier les pompiers qui ont sauvé le bureau. Heureuseme­nt ! J’ai 400 cartes grises… » Il cite encore Cyril Marrot, le client à l’origine d’une cagnotte en ligne Hier, celle-ci avait déjà récolté plus de 3 800 euros. Sylviane Martelly, Gilettoise de 53 ans, est l’une de ces petites mains qui ont tout repeint, avec son mari Pierre et sa fille Fanny. «Maurice et Aurélien ne voulaient pas de notre aide. On a dû leur forcer la main. Les employés aussi ont été exceptionn­els. Ils ont dit: “Patron, on reste ”. C’est très fort, très beau!» Jean-Marc Nicolao, 57 ans, gère le centre Autosur à Castagnier­s. Il a aidé les Giovannacc­i à transférer les véhicules et leur a fourni des outils. «Aurélien et Maurice, ce sont des gens serviables, des travailleu­rs qui méritent d’être aidés. Ils ont pris un sacré coup au moral, mais toute cette entraide les a motivés. Je suis sûr qu’ils auraient fait de même pour nous…» Pour Sylviane Martelly, «ils ont récolté le fruit de leur gentilless­e. On les aide comme ils nous ont toujours aidés, à notre petite échelle. On ne pouvait pas laisser le Mouriez s’arrêter comme ça!»

« Il reste à faire…»

Bien sûr, rien n’est simple. L’activité redémarre en mode diesel. «Il reste beaucoup à faire. Mais au fil des jours, on sera de plus en plus autonomes », estime Aurélien Giovannacc­i. Et puis il y a ces blessures morales, plus profondes. «C’est sa vie de travail qu’il a perdue. Remonter une affaire pareille, c’est dur…», soupirent Odette et Pierre Boireau, sexagénair­es de Saint-Martin-du-Var. Il faudra du temps, certes. Mais cet élan solidaire constitue le meilleur des boosteurs. «La solidarité, ça existe! s’exclame Maurice, revigoré. C’est dans les coups durs qu’on voit que l’être humain sert à quelque chose. Et qu’il ne faut pas baisser les bras.» 1.Pourpartic­iperàlacag­nottesurLe­etchi.com: www.leetchi.com/c/solidarite-de-garage-dumouriez

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(Photos Frantz Bouton) « La solidarité, ça existe ! C’est dans les coups durs qu’on voit que l’être humain sert à quelque chose. Et qu’il ne faut pas baisser les bras. »

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