Le long chemin de la reconstruction
C’est le premier paradoxe politique de la rentrée : l’opposition, de gauche et de droite, est en miettes, le parti au pouvoir est fortement majoritaire à l’Assemblée nationale, et pourtant, rien de tout cela ne profite à Emmanuel Macron, dont la cote de popularité ne cesse de baisser. Reconstruction, refondation, union, tels sont les grands mots rabâchés, tout au long de ce dernier week-end par les socialistes et Les Républicains. On ne voit pourtant pas se profiler, dans les semaines qui viennent, le moindre sursaut, la moindre réhabilitation de partis en péril. A droite, la division a atteint un seuil jamais encore égalé. L’éparpillement géographique des nombreux colloques, conférences et réunions suffit à le montrer: les juppéistes se sont réunis à Bordeaux tandis qu’au Touquet, le trésorier de LR, dont la renommée n’a pas franchi les sommets, vient d’annoncer sa candidature à la présidence de son mouvement. Pendant ce temps-la, le favori à ce poste, le président de la région Rhône- Alpes, Laurent Wauquiez, ne dévoile pas ses intentions, mais s’attache à définir dans son coin les fondements d’une droite dure, aux «racines chrétiennes». Valérie Pécresse crée son mouvement : «Libres !»; Jean-Pierre Raffarin, jetant l’éponge, se reconvertit en chroniqueur politique sur France . Florence Portelli, ancienne porte-parole de François Fillon à la présidentielle, songe à faire elle aussi acte de candidature. Sans oublier tous ceux qui, au sein de LR, ont choisi de soutenir Emmanuel Macron dans une collaboration «constructive» avec le Président nouvellement élu. Beaucoup de monde, donc, trop même, pour essayer de donner un nouveau projet à la droite. Sans doute faudra-t-il attendre le congrès de LR, en décembre prochain, pour y voir plus clair. Et encore. Même dispersion à gauche : ceux qui se veulent les rénovateurs du Parti socialiste étaient réunis hier à Paris, tandis que l’ancien candidat Benoît Hamon, crédité, on s’en souvient, de % des voix à l’élection présidentielle, a choisi en juillet de lancer son miniparti. Ancien candidat lui aussi, Arnaud Montebourg animait hier comme toutes les années à pareille époque la Fête de la rose à Frangy-en-Bresse, mais il n’en était pas la vedette. Manuel Valls se tait, mais n’en pense pas moins. Bref, la défaite des Républicains et du PS, loin de les amener vers l’unité, dresse ses leaders les uns contre les autres. De sorte que JeanLuc Mélenchon, avec son pilonnage systématique de la future loi Travail surtout, est aujourd’hui le seul à incarner l’opposition extrême au chef de l’Etat. Le paradoxe est que celui-ci ne profite pas de l’éclatement général des partis. Au contraire. Les différentes mesures prises depuis le début du quinquennat n’ont pas été expliquées. Le cap qui devait être fixé ne l’a pas été. Pas plus qu’Emmanuel Macron n’a semblé vouloir défendre la nécessité de ses réformes et de celles mises en oeuvre par son gouvernement. Le temps est donc venu, pour celui-ci, de renoncer à apparaître, sur les écrans, en maillot de footballeur ou en blouson d’aviateur, et de dire où il veut aller et comment.
« Le paradoxe est qu’Emmanuel Macron ne profite pas de l’éclatement des partis. Au contraire. »