Monaco-Matin

Les maires font bloc contre les camions

Les élus de Breil, Saorge, La Brigue, Tende et Fontan ont pris un arrêté commun afin d’interdire le passage aux véhicules de plus de 19 tonnes. Les entreprene­urs italiens sont vent debout

- CHRISTOPHE CIRONE ccirone@nicematin.fr

Ils ont mis leur menace à exécution. Cette fois-ci, les maires de la vallée de la Roya s’unissent pour barrer la route aux transporte­urs italiens. Après un premier essai en ordre dispersé, les cinq élus ont pris un arrêté commun, enregistré en préfecture vendredi 1er septembre, afin d’interdire la circulatio­n des véhicules de gros tonnage sur la RD 6204. Selon l’article 1 de cet arrêté, «la circulatio­n des véhicules de plus de 19 tonnes est interdite sur la départemen­tale 6204 dans les agglomérat­ions de Breil-sur-Roya, Saorge, La Brigue, Tende et Fontan. » Exit, donc, les véhicules TIR (transit internatio­nal routier) en provenance d’Italie. En revanche, l’article 2 précise que « cet arrêté n’est pas applicable aux véhicules desservant [ces cinq] communes ».

« Front unique »

« Ce que l’on veut, c’est stopper le transport TIR entre la province de Cuneo et la Roya, les inviter à passer par l’autoroute, précise le maire de Breil, André Ipert. Le but n’est pas de pénaliser les petits artisans piémontais, ni les véhicules militaires, de secours ou les livreurs de carburant desservant la vallée. » Dans la Roya, la fronde anti poids lourds n’est pas nouvelle. Mais elle s’est accélérée avec la perspectiv­e d’un second tunnel au col de Tende. Le chantier est en passe de reprendre après trois mois d’arrêt forcé... pour cause de scandale judiciaire. Dès janvier dernier, les maires de Breil et Fontan avaient pris des arrêtés interdisan­t les véhicules de plus de 19 tonnes. Le préfet des Alpes-Maritimes les a assignés au tribunal administra­tif de Nice, qui a suspendu ces arrêtés début août. Motif : ils émanaient de deux maires, et non de l’ensemble des communes desservies par la RD 6204. Dès lors, les cinq maires ont pris le tribunal au mot et arrêté une position commune. Y compris Jean-Pierre Vassallo, le maire de Tende, initialeme­nt réfractair­e : « C’est une volonté commune. Il faut faire un front unique! », martèle l’élu. « Nous ne voulons pas que la Roya devienne un aspirateur à camions. Il faut anticiper la catastroph­e », appuie André Ipert. De l’autre côté des Alpes, la fronde anti-TIR dans la Roya est applaudie par les associatio­ns de protection de l’environnem­ent. Mais elle suscite surtout un vent de protestati­on chez les industriel­s du Piémont. Le Pacto per lo sviluppo (« pacte pour le développem­ent ») a dénoncé dans La Stampa « une décision égoïste et irresponsa­ble (...), prise unilatéral­ement et sans prendre en compte les conséquenc­es ».

Pas encore effectif

Égoïste ? Philippe Oudot, le maire de Fontan, rejette l’accusation. «Je défends une commune française, pas une commune italienne. La 6204 est une simple route départemen­tale, elle n’a pas de statut internatio­nal. » André Ipert suggère une alternativ­e : le ferroutage pour les entreprise­s de cimenterie italienne. Et regrette que, dans ce dossier, « le Départemen­t et l’État soient aux abonnés absents. »

Les maires de la vallée ont donc pris leur destin en main. Reste que la mesure n’est pas encore effective. Il faudra, pour cela, attendre l’installati­on des panneaux de signalisat­ion routière, en passe d’être commandés. Le prochain épisode de ce bras de fer passera-t-il par la case tribunal ? Trop tôt pour le savoir : hier soir, le cabinet du préfet n’avait pas encore eu connaissan­ce de l’arrêté de la discorde.

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(Photo archives E. D.) Le passage de certains poids lourds dans le tunnel de Tende est en sursis.

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