Deauville : l’Amérique et ses fantômes
Le 43 festival du film américain se poursuit jusqu’à dimanche à Deauville , entre hommages (Woody Harrelson, Darren Aronofsky, Antonio Banderas et Michelle Rodriguez attendus), avant premières et compétition (14 films en lice). Jusqu’ici le festival a présenté un panorama très diversifié du cinéma US, dont se dégage l’image d’une Amérique en quête d’identité.
« A Ghost Story »
Le film le plus marquant de la compétition est sans conteste A Ghost Story de David Lowery avec Rooney Mara et Casey Affleck. Une histoire de fantôme comme son titre l’indique mais à l’ancienne , sans effets spéciaux numérique et avec un fantôme qui se promène recouvert d’un drap avec deux trous pour les yeux. L’effet comique initial est contrebalancé par un format carré, de longs plans fixes et une musique angoissante. Entamé comme un nouveau Paranormal Activity, le film glisse doucement vers le surréalisme et finit par former une fresque temporelle qui va de l’Amérique des pionniers à nos jours dont se dégage une poésie et une mélancolie rares. Un film envoûtant, qu’on serait très étonnés de ne pas retrouver au palmarès du jury présidé par Michel Hazanavicius (OSS 117, the Artist). Plusieurs des autres films de la compétition traitent de près ou de loin de la question de l’identité. C’est le cas de Beach Rats d’Eliza Hittman, histoire du coming out laborieux d’un ado de Coney Island, de They de l’iranienne Anahita Ghazvinizadeh, qui met en scène un adolescent transgenre dans une famille d’origine iranienne, de Katie Says Goodbye de Wayne Roberts, dans lequel une jeune serveuse d’un bled perdu se prostitue sans vraiment s’en rendre compte et de Mary, comédie dramatique de Marc Webb (Spiderman) sur la difficulté d’élever une enfant surdouée. De loin le film le plus grand public de la sélection, avec une jeune actrice aussi géniale que son personnage (Sortie en salles le 13 septembre). Autre film marquant de la compétition The Rider confirme le talent de la réalisatrice sino-américaine Chloé Zhao, découverte à la Quinzaine des réalisateurs à Cannes en 2015 avec Les Chansons que mes frères m’ont apprises. Après les réserves indiennes du Dakota, c’est dans le milieu du rodéo que Chloé Zhao est allé filmer le portrait intimiste d’un jeune cow boy obligé à renoncer à une carrière prometteuse dans le rodéo par une grave chute de cheval. A sa manière très personnelle, quelque part entre immersion documentaire et cinéma élégiaque à la Terence Malick, la jeune réalisatrice livre un portrait de l’Amérique profonde confrontée à un monde qui change. Un film qui résonne curieusement avec le beau documentaire du Français Jean Baptiste Thoret, We Blew It, sur l’âge d’or de la contre culture et ce qui reste des utopies des années 60-70 dans l’Amérique de Trump (sortie le 8 novembre).