L’empoisonneuse renvoyée aux assises
Patricia Dagorn passait des petites annonces pour rencontrer des hommes de préférence âgés. Rien de répréhensible a priori. Sauf qu’à son contact, certains retraités azuréens ont vu leur santé décliner
Ce n’est pas arsenic et vieilles dentelles… mais plutôt Valium et legs universels. Patricia Dagorn, 57 ans, avait pour habitude de séduire des messieurs bien plus âgés qu’elle et d’en devenir l’héritière. La santé des retraités se dégradait au fur et à mesure qu’elle les fréquentait. C’est en résumé ce que lui reproche un juge d’instruction niçois qui l’a mise en examen pour assassinats, empoisonnements et vols. Il vient, cet été, de la renvoyer devant la cour d’assises des Alpes-Maritimes. Le procès pourrait se tenir début 2018. C’est en septembre 2012 que la justice s’est intéressée de près à cette femme singulière. La fille d’un octogénaire de Thonon s’inquiète alors de retrouver son père complètement désorienté, victime manifestement de violence. Des traces d’antidépresseurs sont retrouvées dans l’organisme du retraité. Patricia Dagorn, son éphémère compagne, malgré ses dénégations, est reconnue coupable sept mois plus tard d’abus de faiblesse, de vol sur personne vulnérable, séquestration et violences volontaires. Elle est condamnée à cinq ans d’emprisonnement à Nice. Elle ne fait pas appel. Elle est toujours en détention.
L’affaire de Thonon relance une enquête niçoise
Cette affaire relance alors de manière spectaculaire l’enquête sur la mort suspecte de Michel Knefel, un retraité retrouvé mort
dans une chambre d’hôtel rue Alsace-Lorraine à Nice par Patricia Dagorn, en juillet 2011. À l’époque, le médecin avait refusé de délivrer le permis d’inhumer. Dans le sac de la suspecte, les policiers avaient trouvé des médicaments, une bouteille d’acétone, une cordelette, du gros scotch et un testament du défunt
en sa faveur (ainsi que celui d’un certain Guy, un Cannois sans domicile fixe). Là encore, des traces de médicaments mises au jour lors l’autopsie de Michel Knefel posent question. La justice a des doutes mais classe la procédure faute de preuves suffisantes. L’enquête à Thonon convainc le parquet
de Nice de reprendre les investigations. La brigade criminelle de la police judiciaire de Nice est saisie et les policiers vont aller de surprise en surprise. La prévenue se présente comme commerçante en bijoux. Elle passe régulièrement des petites annonces pour trouver l’âme soeur.
Ils interrogent le Niçois Ange, policier à la retraite, qui dit avoir été drogué fin 2011 par la séduisante Patricia. Celle-ci lui a volé son matériel informatique, des papiers personnels et a tenté de lui soutirer de l’argent. Il y a Robert, dynamique octogénaire de Fréjus, plutôt flatté d’être avec une femme beaucoup plus jeune, qui explique avoir été empoisonné au Valium. Il ne comprenait pas pourquoi sa santé déclinait à ce point. La substance avait été découverte dans ses analyses sanguines. Patricia cherchait à toutes fins à devenir sa légataire universelle et avait même contacté son notaire.
Mort dans sa baignoire
Il y a également le cas de Francesco, retrouvé mort dans sa baignoire en février 2011 à Mouans-Sartoux, lui qui ne prenait jamais de bain. De curieux retraits d’argent ont été effectués sur son compte en banque. Patricia Dagorn sera chassée du domicile par les enfants du défunt quelques jours plus tard. Guy, le Cannois indigent, confirme lui aussi avoir été victime d’un empoisonnement. Tout comme un autre compagnon d’infortune, un Roumain, SDF également. Ces deux derniers refusent de déposer plainte et ont, depuis, disparu dans la nature. L’ensemble des procédures est rassemblé par le parquet de Nice qui trouve d’étranges similitudes dans toutes ces affaires. Un avis partagé par le juge d’instruction après des mois d’enquête. Patricia, elle, du fond de sa cellule, clame son innocence et se sent toujours aussi seule. Depuis la prison de Nice, elle a passé une petite annonce matrimoniale.