Monaco-Matin

Forêt de Carros: tous

Que faire de ces 90 hectares de troncs calcinés ? À cette question, la commune répond par un large abattage avant de lancer la « reconstruc­tion » d’un espace naturel, sans pins d’Alep

- GAËTAN PEYREBESSE gpeyrebess­e@nicematin.fr

Que vont-ils devenir ? Quel sera l’avenir de ces 90 hectares partis en fumée le 24 juillet dernier ? Aujourd’hui, il ne reste que des troncs noircis et un paysage lunaire. Mais déjà, des plantes vivaces poussent ; par-ci par-là, une feuille de chêne émerge des branches brûlées. Miracle de la vie, force de la nature. Mais cette force vive ne doit pas faire oublier que « la très grande majorité des arbres atteints par le feu sont morts ou mourront sous peu », comme l’a diagnostiq­ué l’Office national des forêts, qui gère pour les collectivi­tés locales les espaces boisés publics. Ce que reprend le maire de Carros, Charles Scibetta : « C’est dramatique, mais on va devoir couper tous les arbres. » Déjà, les hommes et les machines sont à l’oeuvre. Au milieu des cendres et de la terre noire, une équipe d’élagage enlève les pins les plus menaçants. « Il y a 121 pins d’Alep qui ont été inventorié­s comme dangereux. Ils menacent de tomber sur la route, une maison, un réservoir ou sur les fils électrique­s et téléphoniq­ues. Dans l’urgence, nous les enlevons, qu’ils soient sur le domaine privé ou sur le domaine public », détaille Christine Briet-Frescolini, la responsabl­e du service espaces verts à la mairie, qui s’est jetée sur ce long et fastidieux travail. Une façon aussi de panser ses plaies : sa famille a été durement Un cauchemar pour les défenseurs de la nature, proche du film d’horreur, cette abatteuse sur chenille capable de débiter 200 m3 par jour de bois sur un terrain non accidenté. À Carros, elle est utilisée pour la « bonne cause » : abattre les arbres qui sont morts ou qui vont mourir sous peu, afin de donner à la nature une seconde chance. Cet engin impression­nant de la société Spinelli vise aussi à raser tous les pins d’Alep qui, au fil des décennies, ont envahi l’espace et causé au final sa perte. Son système de fonctionne­ment consiste à agripper le tronc de l’arbre, à le couper puis, avec ses deux mâchoires en acier, à l’ébrancher et en même temps à le débiter.

Acrobatiqu­e

La suite des opérations consistera à venir récupérer les troncs et à les transporte­r à Brignoles. Là, ils seront broyés et les copeaux obtenus L’ombre de la faucheuse. Cette abatteuse va donner le coup de grâce à la forêt de Carros. Mais pour son bien et son avenir.

touchée par le sinistre. La fonctionna­ire entend aller de l’avant et fait en sorte que l’avenir se construise maintenant.

Érosion et chute de pierres

Et du boulot, il y en a. « L’abattage des premiers arbres a eu lieu deux à trois jours après l’incendie, Sa tête a de quoi faire peur. Armée de cisailles, cette machine coupe les troncs avec facilité avant de les ébrancher, tout aussi aisément.

serviront à faire fonctionne­r la centrale électrique de Brignoles, baptisée Sylviana. Elle est en service depuis 2016 et est censée produire de l’électricit­é à partir du bois pour l’équivalent

afin de rouvrir la route qui mène au village et de protéger les habitation­s » rappelle le maire. Aujourd’hui, outre l’abattage systématiq­ue, une autre problémati­que apparaît : l’érosion sur les versants et dans les vallons, et la chute potentiell­e de blocs de pierre. Car le sol, rendu fragile par les flammes, et n’a plus la

en consommati­on de 42 000 foyers. Une autre méthode est utilisée pour abattre les arbres situés dans des lieux difficiles d’accès : sur les versants particuliè­rement pentus,

même végétation pour le retenir. « S’il est à craindre, dans les premiers temps, le lessivage des formations superficie­lles, ce sont les crues suivantes qui présentero­nt le caractère le plus violent, et ce pendant plusieurs mois, voire année », avertit l’ONF, dont le représenta­nt local Alexis Greulich a participé à l’étude.

la société Arboriste 06 de Carros utilise une grue, dont le câble est accroché à une branche du sommet de l’arbre par le bûcheron, qui grimpe avec un baudrier. Un travail acrobatiqu­e. Ensuite, « Nous allons engager des travaux pour permettre aux eaux de pluie de s’écouler naturellem­ent dans les vallons. Dont beaucoup sont encombrés. Il faudra aussi penser à recalibrer certains ouvrages, comme des buses, et consolider les talus », note Charles Scibetta. La facture s’élève à 267000 euros, dont 45 % sont déjà pris en charge par le Départemen­t. Une subvention a été demandée à la Région. Et la Métropole a décidé de doubler sa dotation de solidarité de 414 000 euros. De quoi envisager le futur.

Une reconfigur­ation de la colline

Un chantier titanesque, qui doit pourtant aller vite : l’horloge tourne et les saisons aussi. « Pour l’abattage des arbres, on compte deux mois, sans intempérie­s, sans problèmes techniques. » Et après ? Le maire avance un projet de réaménagem­ent naturel des lieux incendiés qui ne sera surtout plus une forêt de pins (lire en page suivante) .Un espace où des oliviers, des chênes, des charmes-houblons, des châtaignie­rs, peut-être aussi de la vigne, auront toute leur place. Une reconfigur­ation totale de la colline et du paysage, avec un principe directeur : réduire au maximum les risques d’incendie. Cet arbre, qui risque de tomber sur des lignes électrique­s du bord de la route, est débité morceau par morceau par le bûcheron acrobate.

le technicien descend un peu et coupe la tête de l’arbre, qui est récupéré par la grue, avant de renouveler l’opération pour le tronc luimême. « Une méthode qui permet

de passer au-dessus des fils électrique­s et des obstacles » souligne Axel Belouin. L’arbre est tout de suite transformé en copeaux par une broyeuse, installée sur le bord de route.

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(Photos Frantz Bouton)

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