Le mensonge d’une crèche devant la cour d’appel
Un nourrisson qui tombe sur le crâne d’un mètre de hauteur. La vérité cachée aux parents. L’affaire de la micro-crèche Les Copains d’Arthur, de Mougins, était rejugée à Aix-en-Provence
L’affaire avait fait grand bruit. Elle posait en effet la question du lien de confiance entre les dirigeants et salariés d’une crèche d’un côté, et les parents de l’autre. Le 8 octobre 2015, une salariée de la micro-crèche privée Les Copains d’Arthur à Mougins avait, lors d’un instant d’inattention, laissé tomber Taïg, un nourrisson de huit mois, d’une table à langer, et d’une hauteur d’un mètre. Les secours n’avaient pas été prévenus malgré une chute sur le crâne. S’en était suivi un incroyable secret (lire ci-dessus). L’affaire était rejugée en appel avant-hier à Aix-en-Provence. Le couple – Laetitia Croci, directrice générale, et Richard Krystafiak, président de la structure – avait été condamné à neuf mois avec sursis en première instance, cinq ans d’interdiction de gérer et 10 000 euros d’amende chacun. L’avocat général a requis les mêmes peines. Il a, en revanche, réclamé une requalification des faits pour Carole Briffaut, la salariée responsable, estimant qu’il n’y avait pas de règlement imposant une obligation particulière de sécurité. Elle risque au maximum 1500 euros d’amende. La crèche Les Copains d’Arthur a depuis été revendue pour la somme de 400 000 euros.
« Quelques jets de stress »
Fabien Rovera et Maud Lambert, les parents de Taïg, sont ressortis épuisés mais soulagés de l’audience. « Nous avons de nouveau pris quelques jets de stress. Revivre cela, c’est dur. Notre enfant va bien heureusement, mais il est difficile d’entendre ces dirigeants continuer à fuir leurs responsabilités. Taïg aurait pu mourir dans la nuit, le lendemain ou deux semaines plus tard. » Me Valérie Cunha, leur conseil du barreau de Nice, va à l’encontre de l’interprétation de l’avocat général sur la salariée responsable de la chute : « Son geste est, à mon sens, une violation d’une obligation de sécurité qui découlait des obligations de sécurité du Code civil. » Fait d’audience étonnant, l’avocat général a confié avoir vécu la même situation à titre personnel, son nourrisson étant tombé de la table à langer. Il a tout de même précisé l’avoir emmené immédiatement chez le médecin ce qui ne fut pas le cas à la crèche. Pour Me Dominique Romeo du barreau de Grasse, avocat de Laetiti Croci, cette audience était plus « apaisée » qu’en première instance. « La cour d’appel a étudié l’affaire sous l’angle de l’analyse des faits et du droit. » Pour Me Pascal Roubaud, avocat marseillais de Richard Krystafiak, l’avocat général a en quelque sorte « alourdi les réquisitions » en allégeant la responsabilité
de la salariée fautive. « La salariée, qui voit et entend la chute sur le crâne, s’en tire avec au maximum 1 500 euros d’amende et les gérants auxquels on a menti, qui n’ont jamais connu les conditions précises de la chute, on leur demande beaucoup plus. On estime que parce qu’ils sont les dirigeants, leur responsabilité pénale doit être plus importante. Cela va à l’encontre du droit pénal et de la responsabilité individuelle. » L’affaire a été mise en délibéré au 24 octobre.