Monaco-Matin

« Je suis LR : ni constructi­ve, ni sur la ligne Wauquiez »

La sénatrice Dominique Estrosi-Sassone vient d’être élue vice-présidente du groupe LR au Sénat. Discrète jusqu’à présent, elle évoque la présidenti­elle et la lutte fratricide Estrosi-Ciotti

- Dossier : STEPHANIE GASIGLIA sgasiglia@nicematin.fr Photos : Frantz Bouton

Dominique Estrosi-Sassone avait jusqu’au 30 septembre pour démissionn­er de son siège d’adjointe à la mairie de Nice. C’est chose faite. Elle a choisi le Sénat. « Je resterai cependant présente plus que jamais à Nice», assure celle qui ne s’est jamais publiqueme­nt exprimé ni pendant, ni après la présidenti­elle. Elle le fait aujourd’hui, alors qu’elle vient de devenir vice-présidente du groupe LR au Sénat.

Vous êtes la nouvelle viceprésid­ente du Sénat... J’ai été élue vice-présidente d’un groupe LR renforcé. J’ai saisi cette opportunit­é qui m’a été donnée par mon président de groupe et par le président du Sénat.

Après seulement  ans de mandat... Oui, c’est vrai. C’est une belle marque de confiance.

Certains élus LR «constructi­fs» veulent créer un groupe... Certains voulaient, mais j’ai le sentiment que ce groupe ne se fera pas. L’UDI-centre reste un groupe, et il faut être dix sénateurs pour en créer un. Même Fabienne Keller, très engagée dans cette démarche a finalement décidé de rester dans notre groupe. [Les sénateurs ont jusqu’à aujourd’hui pour déposer les listes définitive­s, NDLR.]

Vous n’êtes donc clairement pas une élue LR «constructi­ve»... Je ne suis pas une constructi­ve ! J’estime qu’aujourd’hui, je peux l’être de la même façon si je le décide par rapport à des textes de loi et pour autant je reste dans ma famille politique. Dans la mandature Hollande, il m’est arrivé de voter des textes de loi, par exemple sur la sécurité ou encore la loi Macron dont j’étais le rapporteur. Il y avait, en particulie­r sur la partie économique, un certain nombre de choses qui étaient bonnes. Aujourd’hui, j’estime que les constructi­fs sont déjà inaudibles, invisibles. Je ne perçois pas leur valeur ajoutée. Et je ne vois pas comment ils vont pouvoir trouver leur positionne­ment politique à l’avenir. Soit ils rejoignent «En Marche ! », c’est leur choix et leur droit, et au moins ce sera clair. Soit ils restent entre deux chaises. Et s’ils forment un parti, cela pose des questions : comment ce parti va se positionne­r ? Avec qui ?

Quel regard sur Macron ? Je n’ai pas d’a priori sur le gouverneme­nt qu’il a formé, J’attends de voir. Je lui reconnais, en tout cas, une stature au niveau internatio­nal et européen. Des discours denses et solides qui démontrent que la France a retrouvé une certaine fierté. En revanche, je ne suis pas d’accord, par exemple, sur l’ISF : il ne va pas assez loin. Sur la taxe d’habitation, il aurait mieux fallu avoir le courage de remettre à plat les valeurs locatives et cadastrale­s, les dernières datent de . Sur la CSG, ce sont les retraités qui deviennent la variable d’ajustement et ce n’est pas normal. C’est comme sur les collectivi­tés territoria­les, il a une approche purement comptable. En revanche, je voterai tout ce qui sera utile pour le pays, je ne me poserai même pas la question. D’ailleurs, je ne me suis pas posé de questions pour voter Macron au deuxième tour, même si je n’en avais jamais fait état.

Êtes-vous sur la ligne Wauquiez ? Pas du tout ! Je ne suis pas sur sa ligne. Lors de la campagne des présidenti­elles, j’avais donné mon parrainage à Nicolas Sarkozy, mais en même temps, je voyais ça avec beaucoup de recul déjà. Et je m’étais dit “on verra bien qui sortira de la primaire”. Je n’ai pas fait campagne, j’ai laissé faire les choses.

Et c’est Fillon qui emporte la primaire... J’ai fait campagne pour Fillon. Jusqu’à un certain point... Et ce n’est pas seulement à cause des affaires, mais aussi pour son positionne­ment, qui a un moment donné m’a interpellé­e.

Famille, ça veut encore dire quelque chose chez LR ? Les seuls qui s’en sont extraits, c’est juste les constructi­fs. Pecresse, Bertrand dont je suis proche, sont encore dans notre famille.

Les constructi­fs n’y sont plus ? Ce n’est pas à moi de le dire. En tout cas, ils se sont extraits de notre famille politique au niveau national, même si je crois savoir qu’un certain nombre d’entre eux reste encartés LR.

Pas Wauquiez, pas constructi­ve, quelle est votre ligne ? Je suis plutôt tendance Xavier Bertrand. J’aurai souhaité qu’il soit candidat à la présidence du parti. Il a une vision des choses qui se rapproche de mon positionne­ment. Des valeurs sociales, humanistes, tournées sur le concret. Il a fait un choix différent. Je respecte.

Quel est le problème de la ligne Wauquiez? Une ligne trop droite dure qui ne correspond en rien avec la façon dont j’exerce mes mandats, ni nationalem­ent, ni localement. Et si c’est lui, je me sentirai plutôt mal à l’aise. C’est une ligne qui, d’un certain côté, est beaucoup trop sécuritair­e, beaucoup trop « dure». Certaines choses ne correspond­ent pas à mon éthique. Je suis plutôt ouverte aux autres, capables de trouver des majorités de projets. Les gens avec leur diversité, leurs origines différente­s, culturelle­s, cultuelles, sociales : pour moi ça veut dire quelque chose.

Et si c’est Wauquiez qui devient le chef des Républicai­ns ? Je verrais…J’espère qu’il aura à coeur de faire vivre une famille politique dans l’unité mais pas dans l’uniformité. Avec sa diversité, ses sensibilit­és. Que le savoir vivre en interne, que chacun puisse s’exprimer librement. Qu’on ne cornaque personne, qu’on ne caporalise personne. C’est comme ça qu’on en sortira renforcé avec l’essentiel : un véritable projet. Il faudra aussi tirer le bilan de ce qui nous a amenés dans le mur...

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Trop de similitude­s avec le FN ?

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