La Penne : le mystère d’un meurtre sans mobile
Denis Chevalley, un Niçois de 53 ans, encourt ce soir à l’heure du délibéré, 30 ans de réclusion pour un meurtre gratuit, inexplicable, absurde survenu à La Penne en décembre 2014
Il supportait mal sa vie. Alors il a donné la mort. Denis Chevalley, 53 ans, a tué André Vidor, 50 ans, qui a eu le malheur, l’aprèsmidi du 27 décembre 2014, de croiser sa route près de La Penne. Denis Chevalley, ancien gérant d’une société de rénovation, venait d’avoir un accident de voiture. Il était tombé dans un ravin. La route était verglacée. Il a provoqué un drame en tuant quelques minutes plus tard au fusil à pompe un employé de supermarché sans histoire. L’accusé apparaît de plus en plus comme un homme ordinaire qui se bourrait de médicaments pour oublier son mal-être. « Il souffrait de ne pas voir son fils, son rayon de soleil », confirme l’une de ses amies. Depuis l’entame de son procès, Denis Chevalley dit avoir « un trou noir », ne se souvient de rien ou presque, se perd en digression. « Il est clair que c’est mon arme. Mais je n’ai pas le souvenir d’avoir tiré. » Son amnésie est-elle feinte ou sincère ? Les neurologues n’ont trouvé « aucune lésion au cerveau », qui expliquerait sa mémoire défaillante. Ses blessures étaient superficielles malgré une chute de six mètres dans un ravin. L’affaire du meurtre de la route D2211a est une histoire de fou. Mais les psychiatres n’ont décelé ni maladie mentale ni délire. Ils concluent à « une faible dangerosité criminologique. »
Tireur, mais pas chasseur
Le Dr Saget, évoque « un homme banal, en échec avec des périodes dépressives ». Sa responsabilité pénale est, selon lui, pleine et entière. Jamais condamné, l’accusé encourra ce soir, au moment du verdict, trente ans de réclusion. Me Laurent Denis-Peraldi, avocat de la fille de la victime, doute de la sincérité de l’accusé : « M. Chevalley dit devant les gendarmes : ‘‘j’ai tiré en l’air’’. Il se souvient des faits en garde à vue ! » Alors que depuis lundi, il est quasiment mutique. Difficile de cerner cet homme volubile par le passé, si discret aujourd’hui, constamment dans l’évitement. Passionné de tir sportif, fasciné par les armes, il se défend d’être chasseur : « Je n’aurais jamais supporté de tirer sur les animaux », tient-il à préciser. Les débats mettent en lumière un père aimant, très lié à sa fille aînée, un compagnon parfois « agréable », « intelligent », capable de rester sobre pendant des mois avant de se mettre soudain à boire avec excès. Les jurés aimeraient comprendre ce meurtre sans mobile et cet homme si paradoxal. Depuis trois jours, leurs questions se heurtent au box en verre de l’accusé sans jamais trouver de réponse. Le Dr Pierre Giordano avance une hypothèse. Il classe l’accusé dans la catégorie des « passifs-agressifs ». Un introverti qui voit son comportement modifié dès lors qu’il a une arme entre les mains. Didier Veschi, psychologue, souligne, qu’après deux entretiens, Denis Chevalley, n’avait « aucun affect de culpabilité ». L’accusé n’évoque-t-il pas régulièrement «un accident », au point d’en convaincre son entourage. En faisant feu à quatre reprises sur un automobiliste qu’il ne connaissait pas, dont il n’a même pas entrevu le visage, Denis Chevalley a définitivement
« c’était un garçon joyeux, un peu adolescent »,
« André, c’était la gentillesse même »,
« Ses trois préoccupations étaient sa maman, sa fille et la montagne. Au moment du drame, on s’apprêtait à faire du ski de randonnée
privé une fille de son père. André Vidor l’appelait son « petit trésor ». L’orpheline n’a pas eu la force de revenir ensemble. »
«Ellea développé une hypersensibilité au bruit »,
« Elle n’est même pas en colère. Elle est triste… Comme moi. » assister au procès du meurtrier de son père.