Monaco-Matin

Estrosi lance « La France audacieuse »

Le maire de Nice a lancé hier son propre mouvement, La France audacieuse, qui veut dépasser les clivages partisans en relayant les attentes des élus locaux et, par conséquent, des citoyens

- PROPOS RECUEILLIS PAR THIERRY PRUDHON

Iy avait La France insoumise, voici désormais La France audacieuse ! C’est le nom du mouvement lancé, hier après-midi à Paris, par Christian Estrosi. Il regroupe des maires de droite et du centre, dont ceux de Toulouse, Reims, Vesoul, Le Havre… A travers ce mouvement collégial, le maire de Nice entend faire remonter la voix des territoire­s et, par là même, celle des citoyens, dans une approche qui se veut constructi­ve et sans parti pris.

Pourquoi ce mouvement ? Nous avons beaucoup réfléchi, avec un grand nombre d’élus locaux, sur la situation de notre pays et les leçons à tirer du message adressé par les Français aux partis politiques, puisque  % d’entre eux n’ont pas choisi le candidat d’un parti traditionn­el. Aucun enseigneme­nt n’ayant été tiré des élections du printemps, nous avons souhaité, sans pour autant nous mettre en opposition avec qui que ce soit, lancer un mouvement de citoyens, dont les maires de droite et du centre sont à l’origine, qui apporte une contributi­on à la rénovation du paysage politique.

Le paysage politique est déjà bien encombré, voire illisible. Qu’allez-vous apporter de plus ? Nous ne créons pas un parti politique au sens strict. Nous sommes dans le cadre d’une double appartenan­ce, chacun pouvant rester dans sa famille politique d’origine. Nous ne voulons surtout pas nous inscrire dans une démarche partisane. Il n’y a qu’une réalité incontourn­able, c’est que nous sommes des élus de droite et que des millions de Français sont en déshérence face à une droite très désorganis­ée, qui n’a pas tiré les leçons de son échec. Je n’administre pas Nice au nom des Républicai­ns mais au nom de ce que je crois bon pour ma ville, et le maire de Toulouse fait pareil.

L’ADN de La France audacieuse ? Nous sommes gaullistes, avec une dimension européenne, sociale. Notre culture est forgée sur l’investisse­ment au service de la croissance et de l’emploi. Nous nous opposons aux déficits publics causés par l’augmentati­on des charges contre-productive­s. En fait, nous voulons simplement faire partir une voix des territoire­s, en tirant les conséquenc­es de la loi sur le non-cumul des mandats, qui change complèteme­nt le paysage, les parlementa­ires n’ayant plus aujourd’hui de racines territoria­les, faute d’avoir été au bout de la réforme. Les maires, qui sont en première ligne sur tout, ne peuvent être tenus à l’écart de l’exécutif et du législatif, que ce soit sur la montée des violences, l’éducation et tant d’autres sujets. Nos concitoyen­s s’adressent d’abord à nous et nous voulons donc entretenir le débat politique, proposer des réformes ou en accompagne­r d’autres, là où les appareils politiques traditionn­els font souvent de l’obstructio­n systématiq­ue. Notre philosophi­e est de prendre de la hauteur pour aller vers une stricte défense de l’intérêt général, plutôt que de nous enfermer sur des lignes partisanes.

Présentere­z-vous des candidats sous cette nouvelle bannière ? Aujourd’hui, notre préoccupat­ion n’est pas de regarder des échéances à assez long terme. Le problème n’est pas là. Notre souci est d’abord que nos concitoyen­s s’approprien­t ce mouvement. Ils peuvent dès à présent s’inscrire gratuiteme­nt sur notre site. L’inquiétude de nos concitoyen­s n’est pas de savoir qui sera élu ou réélu en  ou , mais de savoir s’ils vont trouver un boulot, une formation, une classe adaptée à un enfant handicapé… Des mesures quotidienn­es qui, pour être souvent du domaine régalien, placent les maires en première ligne, y compris sur la lutte contre le terrorisme. Nous ne voulons surtout pas nous aligner sur le modèle des vieux partis politiques qui n’ont pas réussi à tirer les leçons du passé, mais afficher un modèle plus moderne qui donne la priorité à des réformes immédiates.  % de la commande publique, ce sont les maires. Face à l’exécutif et au législatif auxquels plus aucun d’entre nous n’appartient, nous voulons constituer une force qui fasse que la relation entre l’Etat et les collectivi­tés se noue sur un principe de bonus-malus, qui récompense les bons élèves qui investisse­nt et réduisent le déficit public. Le problème de la croissance ne sera pas réglé sur un claquement de doigts ou un amendement. On peut faire de beaux discours sur le haut-débit, mais si ce n’est pas nous qui le réalisons, il ne se fera jamais.

Existe-t-il vraiment un fossé aussi «énorme» que vous le dites entre Les Républicai­ns et les macroniste­s de droite ? Permettez-moi de parler des citoyens plus que des élus. Je ne veux pas rentrer dans un débat de cuisine interne aux partis. Le maire de Nice croise simplement des citoyens de droite, de centre-droit, modérés, européens et qui à présent ne se reconnaiss­ent plus dans certaines postures des Républicai­ns. Je vois aussi des gens de plus en plus nombreux à saluer les choix du gouverneme­nt, comme ce brave taxi qui m’a dit que Macron n’était pas sa tasse de thé depuis la loi sur Uber, mais qu’il avait le courage de tenir bon sur les réformes. Les électeurs de droite et de centredroi­t sont aujourd’hui laissés en jachère et n’ont pas d’espace pour apporter leur contributi­on. On veut leur offrir un lieu de débat qui n’existe pas. Car ce ne sont pas les débats au Parlement qui vont régler la relation entre ceux qui administre­nt les territoire­s et ceux qui les vivent au quotidien. Nous voulons être un mouvement qui parle de la vie, avec audace, en franchissa­nt des lignes et en transgress­ant des tabous, là où d’autres s’enferment dans une pensée unique.

Pouvez-vous décemment encore rester membre des Républicai­ns ? Je suis un homme de droite, gaulliste, européen, ouvert, qui cherche à fédérer. Je ne veux donc pas être associé à une posture qui me ferait mal juger par les administré­s de ma ville. Les gens qui m’accordent très majoritair­ement crédit à Nice ne sont pas majoritair­ement aux Républicai­ns. Si la ligne politique, qui sera arrêtée par Les Républicai­ns en , va dans une direction trop radicale, j’en tirerai tout naturellem­ent les conclusion­s. Mais je ne veux pas anticiper sur tout cela. Je regarde les choses avec une ligne d’horizon. Vous martelez qu’il n’y a que Nice qui compte pour vous. Mais votre démarche montre bien que vous voulez toujours jouer un rôle national… Ce que nous faisons est novateur, puisque nous nous plaçons tous sur un pied d’égalité entre maires. Parce que nous aimons la France et notre ville. Pour autant, j’essaie d’avoir une influence nationale sur les réformes qui peuvent affecter ma ville. C’est pour moi une démarche d’utilité publique et d’intérêt général.

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(Photo Jean-François Ottonello)

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