La police dans tous ses états d’âme
Société La collection Le Monde en face, sur France 5, recueille les témoignages anonymes de cinq policiers
P our Le Monde en face, sur France 5, deux flics de la brigade anticriminalité, un CRS, un gardien de la paix et un délégué du syndicat Alliance expriment leur malaise face à l’augmentation de la violence, les risques de dérapages et la pression dans l’exercice de leur fonction. 80 % des Français ont une opinion favorable de leur police, mais celle-ci a le sentiment d’être une cible depuis l’attaque traumatisante de ViryChâtillon et les meurtres de deux policiers à leur domicile de Magnanville. Claire Tesson a recueilli des confidences rares, faites parfois sans autorisation de la hiérarchie. « Très peu de policiers acceptent de parler de la violence, celle qu’ils côtoient au quotidien, celle qu’ils subissent, mais aussi celle qu’ils ont en eux et qui parfois déborde », explique la réalisatrice. C’est ainsi qu’Alpha (pseudo), qui a tué en état de légitime défense lors d’une intervention de police secours, attend le verdict de la justice. Lima, CRS chevronné, a pris conscience de ses limites face à la violence des casseurs lors des manifestations : « J’ai failli avoir le mauvais geste, submergé par la haine », confie le policier, dont la compagnie a totalisé 220 jours de déplacement au lieu de 140 en 2016. L’Observatoire national de la délinquance note que le nombre de policiers blessés a augmenté de 25 % entre 2010 et 2015. « Se faire tirer dessus à l’arme de guerre, le nombre de cadavres, ça change une vie », avoue Oscar, brigadier-chef dans une BAC départementale, marqué par les violences du Bataclan. Il déplore : « Nous avons désormais un fusil d’assaut, mais cadenassé au fond du coffre… Et nous n’avons qu’un exercice de tir par an ». Adepte de la sophrologie, il précise aussi : « Il faut faire un travail propre, ne pas ajouter de l’excitation à l’excitation, même dans les zones sensibles, il y a aussi des gens qui vivent. D’où l’importance du travail d’équipe et du débrief. Les jeunes recrues ont tendance à concevoir les quartiers comme des territoires à reconquérir ». Sans ambages, Sierra lance : « Si on devait se conformer au Code pénal, on ferait beaucoup moins d’affaires ». Il poursuit : « On préfère arrêter dix mecs avec 1 gramme de stupéfiant plutôt qu’un mec avec 2 kg parce qu’on peut comptabiliser dix faits, dix interpellations ». Ces dernières peuvent rapporter jusqu’à 41 000 euros par an pour un commissaire divisionnaire… La police… sur le fil à20h50surFrance5