Monaco-Matin

Agression sauvage d’une antiquaire :  ans de prison

Un Géorgien avait défiguré à coups de bâton une commerçant­e à Nice pour voler 50 000 euros de bijoux. Les vidéos effrayante­s de l’agression ont été diffusées au procès. Sept ans de prison

- CHRISTOPHE PERRIN chperrin@nicematin.fr

Visage taillé à la serpe, joues creusées, Bitchiko Gigineishv­ili, 40 ans, ancien interprète au tribunal de Bordeaux, s’exprime comme un vieillard à son procès. Il geint sans cesse, essuie ses larmes, se présente en appui sur des cannes avec une genouillèr­e. Difficile d’apitoyer le tribunal qui visionne les images de vidéosurve­illance du magasin d’antiquités, rue de France à Nice. Un commerce en face du musée Massena, institutio­n niçoise, sécurisé comme une bijouterie. Sur l’écran, Maria, 53 ans, la vendeuse, est filmée de dos. Elle cherche le facturier. À droite, le client patiente, souriant, élégant. Il prétend être intéressé par un bijou pour la Saint-Valentin mais souhaite une ristourne. Maria vient d’appeler au téléphone Christine, l’antiquaire, pour connaître la marge de négociatio­n.

Elle perd 14 dents

Dans cette boutique cossue habillée de boiseries et de moquette verte, l’individu, morceau de bois à la main (un pied de chaise ?) frappe alors à toute volée la vendeuse. Silence interloqué de l’assistance. Hors champ, on imagine la victime à terre. Sur l’écran, le bras armé s’élève et s’abat à plusieurs reprises. Un acharnemen­t glaçant. La vendeuse gît dans une mare de sang, la mâchoire fracturée. Elle perdra quatorze dents ! L’individu traîne le corps inerte de sa victime pour mieux fouiller les vitrines avec un étonnant sang-froid. Il s’empare de 50 000 euros de bijoux avant de prendre la fuite par le train de Vintimille.

Fuite à l’étranger

Les enquêteurs de la brigade criminelle de la Sûreté départemen­tale, dont le travail a été unanimemen­t salué, retrouvent sa trace en Azerbaïdja­n, en Géorgie puis… à Bourg-Saint-Maurice en Savoie, en octobre 2015, lieu de son interpella­tion. « J’étais drogué. Je ne me souviens de rien », pleure le prévenu, défendu par Me de Cézac, qui ose, théâtral : «Jamais je ne pourrais voler ne serait-ce qu’un chocolat. » La présidente Anne Vincent lui fait comprendre que ce genre de remarque est déplacé. Christine, 64 ans, l’antiquaire, tourne ostensible­ment la tête quand le prévenu se confond en excuses. Les proches de Maria se retiennent de ne pas exploser. L’antiquaire, le souffle coupé par l’émotion, se remémore cette sinistre journée: « Maria était défigurée. Ce n’était qu’une plaie. Les bijoux, certes, c’était un désastre financier mais ce n’est pas le principal. Ce salopard, pardon pour ce mot, a brisé nos vies. »

« Vous êtes un lâche »

La commerçant­e, soutenue par Me Willm, avait déjà subi quatre vols dans sa carrière. La dernière agression est celle de trop. « Nous sommes conditionn­és pour ne pas résister en cas d’attaque. Maria lui aurait donné ce qu’il voulait. Il a frappé froidement, de manière raisonnée. » Maria n’a jamais pu retravaill­er. Traumatisé­e, elle a laissé Me Bernard Sivan s’exprimer en son nom. L’avocat niçois, malmène le prévenu: «Vous n’avez aucun souvenir de ces 4,40 minutes de calvaire mais Maria, elle, s’en souviendra toute sa vie. Vous êtes un lâche monsieur. Ce coup lui arrache la figure. Vous savez qu’il y a les traces des dents sur ce bâton ! » «J’ai accepté la correction­nalisation de ce dossier. En vous subissant pendant trois heures, j’en ai des regrets. » Le tribunal a suivi les réquisitio­ns du procureur David Placette qui a démontré que le prévenu, loin d’être drogué, était tout à fait en possession de ses moyens : Gigineishv­ili a été condamné, hier, à sept ans de prison et une interdicti­on définitive du territoire. Son complice Trashvili, qui faisait le guet, écope de cinq ans. Un mandat d’arrêt a été lancé contre lui.

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(Photos Ch.P) Me Sivan, conseil de Maria: «Je pense que ma cliente a bien fait de ne pas venir tant son agresseur s’est moqué du tribunal.»
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Me Willm: «Cette agression a été l’agression de trop.»

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