Bicentenaire du traité de Stupinigi (-)
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Le premier Traité de Paris du 30 mai 1814 replaçait la Principauté dans ses frontières de 1792 sous la protection de la France. Mais après les Cent-Jours et la seconde abdication de Napoléon Ier le congrès de Vienne détermina les nouvelles limites des différents États d’Europe. La France perdit notamment la Savoie et le Comté de Nice. Quant à Monaco, le second Traité de Paris du 20 novembre 1815 stipule que «les rapports que le Traité de Paris de 1814 avait établis entre la France et la Principauté de Monaco, cesseront à perpétuité, et les mêmes rapports existeront entre cette Principauté et S.M. le roi de Sardaigne… » Mais à la différence du protectorat espagnol (15241641) et des protectorats français (1641-1793 et 18141815), où il s’agissait de traités librement conclus entre deux États, fixant les droits et les obligations de chacun, le protectorat sarde était imposé à la Principauté par les grandes puissances. Ainsi la Principauté changea de protecteur sans qu’elle pût faire entendre sa voix. Les conséquences Château royal de Stupinigi en Italie.
de la décision de Vienne furent malheureuses pour Monaco. Les rapports entre Turin et Monaco devaient en principe rester tels qu’ils avaient été définis en 1641 entre la France et Monaco. Précaution illusoire car en fait il n’en fut rien et après des négociations longues
et laborieuses menées par le gouverneur général Louis Millo-Terrazzani représentant le prince héréditaire Honoré-Gabriel futur Honoré V fut signé le 8 novembre 1817 le traité de Stupinigi (Château royal près de Turin) qui limitait sa souveraineté et transformait la protection du royaume de Piémont-Sardaigne en véritable protectorat servant ses propres intérêts. Ce traité en effet obligea le prince non seulement à reconnaître la suzeraineté du roi de Sardaigne sur Menton et Roquebrune mais dut aussi abandonner quelques-uns de ses droits qui constituaient les revenus les plus sérieux de son domaine notamment la suppression de la manufacture des tabacs de Monaco qui avait eu depuis Honoré III une situation prospère. Il devait se fournir pour la consommation en tabac de la Principauté à la manufacture de Nice, de même que pour le sel aux gabelles royales. Au lieu de la convention librement consentie avec la France qui assurait la sécurité et l’intégrité de la Principauté, l’Europe substituait un protectorat imposé qui devait contribuer à favoriser les visées expansionnistes du Royaume de Piemont-Sardaigne. On s’en rendra compte plus tard, en 1848, lorsque les menées subversives fomentées par l’occupant sarde, profitant de la dégradation du climat social, aboutirent à la sécession de Menton et Roquebrune qui se proclamèrent « villes libres » et demandèrent leur rattachement au royaume de Piémont-Sardaigne avant leur cession définitive à la France par le traité du 2 février 1861. Monaco perdait les 4/5e de son territoire mais dès lors échappait au protectorat sarde et son indépendance était formellement reconnue, en dehors de toute protection.
1 - Pour approfondir le sujet lire l’article de Thierry Garbatini «La mise ne place d’un protectorat sarde » dans les Annales Monégasques N°16 (1992).