Sursis et amendes pour une famille fumeuse d’herbe
Qui n’a jamais fumé un joint ? Ou respiré les exhalaisons pernicieuses d’herbe? De telles questions ne se posaient pas pour une mère quinquagénaire et ses deux filles d’une vingtaine d’années. Cette sorte de «famille pétard» avait une vie bien rangée. Mais mère et filles flirtaient pourtant avec l’illégalité en étant très portées sur la fumette. Au point de transformer une pièce de leur logement en « fumerie de haschich », jusqu’à incommoder leurs voisins de l’immeuble Saint-Sébastien, situé dans le quartier des Moneghetti, qui se plaignaient des fortes odeurs de cannabis. Ils finiront par alerter la Sûreté publique… Les trois prévenues ont comparu mardi devant le tribunal correctionnel pour détention et usage de stupéfiants. La mère a écopé d’une peine de douze mois d’emprisonnement avec sursis, placement sous le régime de la liberté d’épreuve pendant trois ans et obligation de soins. Ses deux filles ont été condamnées à 500 euros d’amende chacune, peine assortie du sursis.
« Je ne fume plus, j’ai eu peur… »
À la barre, la forte consommation de drogue leur paraît inoffensive, leur produit chéri est aspiré régulièrement sans crainte d’éventuelles conséquences. Toutes les trois se contentent de convictions sans nuance. Notamment en raison des vertus psychotropes de l’herbe. Sans cacher pour autant que cette consommation problématique dissimule en fait le remède pour apaiser la grande souffrance de la mère. Nous sommes en mars 2017. «À l’issue d’une rapide surveillance ,retrace le président Florestan Bellinzona, les policiers localisent l’appartement et frappent à la porte. Vous veniez juste de fumer un joint. En fouillant, les enquêteurs trouvent l’attirail complet du parfait fumeur et 5 grammes de shit. Madame fume et en fait profiter ses filles qui sont majeures depuis peu. Alors que vous êtes censée protéger vos enfants… La cadette, vendeuse dans une boutique, participe aux achats en ajoutant 50 euros par mois. L’aînée, étudiante, en profite seulement. Quel est le coût mensuel de votre consommation ? » La mère l’estime à 400 euros ! Soit un tiers des ressources avouées qui passent dans la drogue. «J’allais chercher le cannabis et je leur en donnais. Je le reconnais! Ce n’est pas bien… » S’ensuit un brin d’apologie du cannabis afin de pallier les séquelles d’une grave maladie. Mais les situations de marginalité et d’addiction sont réfutées par la quinquagénaire. Ces derniers mots attisent les inquiétudes du magistrat. «Avec plus de cinq joints par jour, vous dites que vous n’êtes pas dépendante ! » En réponse, comme pour essayer d’amadouer le président: « Depuis cinq mois je ne fume plus. J’ai eu peur… »
« Les praticiens ne lui ont jamais dit d’arrêter »
Ce dossier est consternant pour le premier substitut Olivier Zamphiroff. « Il y a le rôle déterminant de la mère. Une mère de famille à la tête d’une petite entreprise de la drogue dont les premières victimes sont ses filles. C’est un trafic ! En achetant à des dealers, elle favorise l’écoulement du cannabis. Il n’y a aucune mansuétude possible. C’est une personne sans scrupule qui diffuse des stupéfiants. La peine? Prison et amendes avec sursis ! » Au cours des plaidoiries, Me Clyde Billaud, pour la mère, évoquera «le choc terrible subi à la mort de son mari. Aujourd’hui, ma cliente est très malade et doit subir d’autres interventions. Elle n’a jamais caché auprès des médecins sa propension à consommer du chanvre indien, et les praticiens ne lui ont jamais signalé d’arrêter. Peut-être pour des vertus apaisantes reconnues? Cette mère n’a pas eu conscience des conséquences. Aujourd’hui, elle ne fume plus. C’est du passé! Elle en a tiré des leçons. Ses casiers sont vierges ! Clémence!» Me Pierre-Anne Noghès-Dumonceau, pour la cadette, rappelle à la formation collégiale «sa présentation d’elle-même à la Sûreté publique. Aucun achat ni partage. On n’a pas trouvé de drogue dans sa chambre. C’est une primo délinquante! Une amende suffit…» Enfin, Me Sarah Filippi, pour l’aînée, assure que l’étudiante « essaie de s’en sortir le mieux possible. Sa vie a évolué. Prenez en considération sa récente hospitalisation, car elle s’est réfugiée où il ne fallait pas. C’est une erreur!» Le tribunal prononcera des peines adaptées avec sursis, pour la prison comme pour les amendes.