Un nuage radioactif russe a survolé la région
C’est à Nice que l’on a enregistré les mesures les plus significatives de ruthénium-106, même si la présence dans l’atmosphère de cet élément radioactif a aussi été détectée à La Seyne et Ajaccio
L’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) a mené l’enquête. En se fondant sur les relevés des différents capteurs radioactifs installés en Europe et les données de Météo France, le gendarme français du nucléaire estime qu’un accident survenu dans le sud de l’Oural, vraisemblablement en Russie, est à l’origine de la pollution au ruthénium-106 détectée en France et en Europe, fin septembre. Cette fois, 31 ans après la catastrophe de Tchernobyl, on ne pourra pas dire que le nuage radioactif s’est arrêté à la frontière. Il a bel et bien traversé notre pays et plus particulièrement le sud de la France. Sur la vingtaine de stations de détection du réseau national OpéraAir, trois ont en effet enregistré un pic de ruthénium dans l’air, entre le 25 septembre et le 3 octobre. Il s’agit des dispositifs de surveillance installés à Ajaccio, La Seyne-sur-Mer et à Nice. C’est d’ailleurs dans la capitale azuréenne que l’on constate le relevé le plus important, avec 46 millibecquerels par mètre cube d’air analysé.
Piste spatiale à exclure
Cette concentration sur le pourtour azuréen ne signifie pas que le nuage nucléaire ne s’est pas propagé aux autres régions de France. En effet, sa détection dépend de plusieurs facteurs, dont la finesse des antennes de mesure qui n’est pas la même partout. Il n’en demeure pas moins que la Côte d’Azur, le Var et la Corse ont été plus particulièrement exposés à cette pollution atmosphérique qui, selon l’IRSN, ne peut avoir que deux origines possibles. Même si le ruthénium-106 est couramment utilisé dans le milieu médical, une contamination d’une telle ampleur, mesurée à travers toute l’Europe, ne peut avoir pour origine qu’un incident « dans des installations du cycle du combustible nucléaire ou de fabrication de sources radioactives », ou être provoquée par « la rentrée dans l’atmosphère d’un satellite ». Or, selon l’Agence internationale de l’énergie atomique, la piste spatiale serait à exclure. Reste donc l’hypothèse d’un problème survenu quelque part dans le sud de l’Oural. Non pas directement sur un réacteur nucléaire qui se serait traduit, selon l’IRSN, « par la présence d’autres radionucléïdes », mais sur la chaîne de fabrication du combustible.
Il n’y aurait pas de danger pour la santé
Le gendarme français du nucléaire ne peut être plus précis en l’état. Car, si le nuage radioactif ne s’est pas arrêté à la frontière, il semble que la collaboration internationale se soit heurtée à celle de la Russie. L’institut de recherche explique s’être fondé, pour ses estimations, sur les données de 28 pays européens, mais n’évoque aucune information transmise par le Kremlin. L’IRSN relativise toutefois les incidences locales. S’il aurait effectivement « nécessité localement de mettre en oeuvre des mesures de protection des populations sur un rayon de l’ordre de quelques kilomètres autour du lieu de rejet », les niveaux de radiations mesurés en France seraient toutefois sans danger pour les populations. Seul risque évoqué, celui de l’importation éventuelle de denrées (notamment des champignons) provenant de la zone précise où a eu lieu cet incident nucléaire. L’institut de recherche sur la sûreté nucléaire juge toutefois un tel scénario peu probable. Voilà pourquoi, selon l’IRSN, «il n’apparaît donc pas nécessaire de mettre en place des contrôles systématiques de la contamination des denrées importées. À titre de précaution, des contrôles par sondage pourraient néanmoins être utilement réalisés ».