Parole princière
Multiplication des chantiers, circulation difficile, campagne électorale, projet de nouveau quartier controversé sur le port : dans cet entretien exclusif, le prince Albert II aborde tous les sujets chauds qui animent la Principauté.
L’exercice du pouvoir forge un caractère. Douze ans après son avènement, le prince Albert II démontre sa capacité à assumer une décision, à taper du poing sur la table quand il le faut, à entamer un bras de fer si nécessaire. Dans cet entretien accordé à Monaco-Matin à la veille de la Fête nationale, le souverain s’est présenté en patron pour répondre aux nombreuses questions qui font l’actualité – chaude et chargée cette année – du pays. Des nuisances causées par la multiplication des chantiers à l’épineux dossier des malfaçons aux Jardins d’Apolline, le prince Albert II démontre son investissement dans la recherche de solutions pour améliorer la vie de ses concitoyens, des résidents et des salariés de la Principauté. Peu importent les moyens et le temps, seuls comptent les résultats. Sur la campagne électorale, le souverain appelle les candidats à la dignité, la sérénité et au débat d’idées. «On n’est pas candidat pour satisfaire un ego», prévientil. Et sur le projet de construction de deux musées et d’un ensemble immobilier sur le port, le souverain annonce son intention de réviser à la baisse l’emprise foncière de l’immeuble d’habitation, pour ne pas gêner le Grand Prix. Second volet de l’interview du souverain est à lire dans notre édition de demain. Les nuisances causées par la multiplication des chantiers en Principauté pèsent sur le quotidien des habitants. Des mesures sont-elles envisagées pour réduire ces désagréments dont se plaignent les Monégasques, les résidents et les salariés? La multiplication des travaux comporte évidemment son lot d’inconvénients. Nous en subissons tous les conséquences. Ce n’est d’ailleurs pas nouveau à Monaco. Les gens de ma génération se souviennent des énormes nuisances causées par l’aménagement du terre-plein de Fontvieille. Tout comme, à l’autre bout de la Principauté, les travaux pour bâtir ce qui est aujourd’hui l’avenue Princesse-Grace. Dans la Principauté contemporaine, il y a toujours eu des périodes un peu compliquées dans ce domaine. C’est le cas en ce moment et cela va continuer: il y aura plus de trente chantiers conséquents dans les dix prochaines années. C’est beaucoup, effectivement, sur un peu plus de km. Je comprends ceux qui se plaignent. Mais c’est nécessaire.
Les plaintes concernent d’abord la circulation… Nous disposons d’un centre de gestion intégrée de la mobilité qui est chargé de surveiller les différentes entrées de Monaco, h sur et jours sur , et de gérer les flux le mieux possible. Aux heures de pointe, c’est effectivement très compliqué. Nous sommes obligés de fermer par moments les tunnels de sortie de l’autoroute et d’entrée de ville, qui arrivent à saturation avec le volume de circulation. Nous allons apporter deux améliorations prochainement. D’une part, il faut donner une meilleure information aux automobilistes au travers de nouveaux panneaux à messages variables. Ce sont ces écrans qui se trouvent aux entrées et sorties du tunnel Albert II. Une vingtaine seront installés aux différents lieux stratégiques de la Principauté, d’ici la fin de l’année prochaine. D’autre part, en liaison avec Escota, nous allons améliorer, là aussi, l’information sur les conditions de circulation pour les usagers, notamment via la radio d’autoroute . qui délivrera encore davantage de messages dans les prochains mois sur la circulation aux abords de la Principauté. Et la bretelle de sortie de l’A dite « Beausoleil » : où en sont les discussions avec la France ? La réunion qui devait finaliser le projet en octobre a été reportée. La décision de principe est prise, il reste à caler le calendrier de l’aménagement. La Principauté va participer à hauteur de % au financement des travaux. Malgré certaines lenteurs administratives, tout le monde a conscience, en France et à Monaco, de la nécessité d’améliorer les parcours, surtout à l’ouest de la Principauté.
Les chantiers entraînent aussi des nuisances sonores. Des solutions? Un observatoire a été mis en place, en partenariat avec une association française, «Acoucité», spécialisée dans l’environnement sonore urbain. Il est chargé de réaliser un plan d’atténuation des nuisances sonores. Nous aurons un premier rapport avant la fin de l’année. Il sera accompagné de recommandations destinées à réduire les nuisances sonores causées par les chantiers. Les mesures seront transmises aux entreprises sur les chantiers. Que pensez-vous du projet de télécabine entre le Jardin exotique et Fontvieille? Tout projet susceptible d’améliorer la circulation et réduire le nombre de véhicules en Principauté est intéressant. Les estimations indiquent que cette télécabine pourrait transporter plus d’un million de passagers chaque année, soit l’équivalent de véhicules par jour en moins dans les rues de Monaco. C’est déjà pas mal.
Au risque de voir passer des télécabines sous vos fenêtres? (rire) Tout est calculé pour qu’elles ne passent pas sous les fenêtres du Palais, ne serait-ce que pour des questions de sécurité. Les télécabines feront halte dans les jardins Saint-Martin, pas sur la place du Palais.
Les nuisances sont aussi celles du chantier de l’extension en mer. Cet été, l’eau de mer a souvent été trouble… C’était prévisible. Nous l’avons anticipé. Un comité scientifique est chargé uniquement de vérifier la qualité de l’eau. Un protocole a été mis en place, allant jusqu’à l’arrêt complet des travaux en mer lorsque les mesures de turbidité de l’eau l’exigeaient. Cet été, le chantier, en cumulé, a été arrêté une quinzaine de jours. Le plan de maîtrise de la turbidité continuera d’être mis en oeuvre pendant toute la durée des travaux, afin que les eaux de baignade restent de bonne qualité, surtout en période estivale. J’ai voulu que la vigilance soit maximale sur ce point-là. Même si cela doit rallonger la durée du chantier.