Les films ne feront plus un tabac
Interpellée sur la promotion permanente et scandaleuse que le cinéma français continue à offrir à l’herbe à Nicot malgré son interdiction dans les lieux publics, la ministre de la Santé a déclaré qu’elle ne comprenait pas pourquoi on fume tant de cigarettes dans les films. Qui lui expliquera que cette aspiration d’air permet aux dialoguistes de souffler un peu et aux acteurs de fermer les yeux en faisant palpiter leurs narines ? Si l’on veut que la moralisation de nos grands écrans soit complète, il faudra bannir également des scenarii toutes les séquences pouvant encourager les jeunes cinéphiles à des comportements nocifs ou délictueux. À savoir : la dernière cibiche du condamné à mort (mais pas de soda trop sucré non plus) ; l’argent rétribuant les passages à tabac; l’invraisemblance des séquences où une vedette arrivant au volant d’un véhicule motorisé trouve instantanément une place de stationnement; l’exemplarité du gaspillage donné par des acteurs auxquels le script fait payer la course d’un taxi sans qu’ils n’attendent jamais la monnaie; les carambolages à toute allure contraires au code de la route en milieu urbain. On devra aussi renoncer aux scènes de séduction où un homme généralement brutal et mal embouché avertit une dame qu’elle sera forcée de succomber à ses avances avant le générique de fin.