Monaco-Matin

Il rêve de laver la mer avec un bateau nettoyeur

Hier soir, le navigateur franco-suisse a présenté son projet de bateau nettoyeur, destiné à enlever les déchets plastiques des eaux maritimes. Un projet ni fou, ni naïf, qui nécessite des investisse­urs

- Dossier : Ludovic Mercier lmercier@nicematin.fr Photos : Michael Alesi

Comme à beaucoup de marins, la veste du Yacht-club de Monaco sied parfaiteme­nt à Yvan Bourgnon. Même si l’on devine qu’il serait plus à l’aise en pull ou en t-shirt. Ses cheveux gris blancs en bataille, comme coiffés par les embruns, le marin a le tutoiement facile. Dans ses yeux aux couleurs du large se mêlent l’intensité et la ferveur des gosses qui savent que tout est possible. Tout. Comme l’idée d’un gros bateau qui nettoierai­t la mer.

Comment vous est venue cette idée ? Quand j’étais enfant, j’ai fait le tour du monde pendant  ans avec mes parents. Et  ans plus tard, je l’ai refait, en prenant exactement la même route. Dans l’océan Indien, le long de la barrière indonésien­ne, aux Maldives, le long des côtes, on trouve des bouteilles, des sacs plastiques, des poussettes, des blocs de polystyrèn­e énormes, des filets de pêcheurs… partout ! À l’époque, mes parents n’avaient pas vu un seul déchet plastique dans la mer.

On sent que vous avez été choqué… Un morceau de plastique ne reste sous sa forme originale que huit à quinze mois. Après, il se dégrade en petits morceaux et souvent, ils coulent. À la surface, il n’y a que  % des déchets plastiques. Ça te donne idée de ce qu’il y a

en dessous. Il ne faudrait pas faire une photo des fonds sous-marins, ce sont des décharges !

Qu’avez-vous fait à votre retour ? On a fait une expertise, on est allé voir toutes les initiative­s qui existaient pour nettoyer la mer. On s’est rendu compte qu’il y a beaucoup d’initiative­s pour fermer le robinet, pour que les déchets n’arrivent plus en mer. Mais rien pour collecter du déchet, à part sur le proche littoral et dans les ports.

Quelle est votre réponse à ce problème ? On s’est dit qu’il fallait forcément un bateau. Ça

permet d’aller là où sont les déchets, et ça varie beaucoup en fonction de la météo, les vents et les courants. Un bateau permet d’intervenir au bon endroit au bon moment, pour faire des ramassages spectacula­ires. L’idée n’est pas de nettoyer toute la surface des océans. Il n’y a que  % de la surface occupée par les macrodéche­ts. Et le bateau permet de se déplacer sur ces zones-là.

À quoi ressemble ce bateau ? C’est un quadrimara­n en acier, pour avoir un maximum de largeur, et une capacité de stockage énorme. L’idée c’est de

piéger les déchets qui passent entre les coques avec des tapis roulants. Ils seront alors triés et compactés. Au minimum, on aurait une capacité de stockage de  m et  tonnes. Il fonctionne avec des éoliennes verticales, qui présentent l’avantage de mieux capter le vent quand il tourne ou qu’il dévie. Et il y a aussi des panneaux solaires sur toute la coque. On a préféré ça à la voile, parce que ça nous permet de garder une vitesse constante, ce qui est important pour la collecte.

Un bateau, ça suffira ? Ce que l’on envisage par la suite, c’est une centaine de bateaux. Avec une capacité de collecte de   tonnes par an, ça nous fait   tonnes de plastique ramassées chaque année.

Il pourrait être prêt quand ? Nous sommes encore en phase d’étude. Nous prévoyons la fabricatio­n pour  /.

 ??  ?? Yvan Bourgnon a lancé le projet Sea Cleaners (les nettoyeurs de la mer) après un tour du monde où il a constaté la quantité phénoménal­e de déchets plastiques en mer.
Yvan Bourgnon a lancé le projet Sea Cleaners (les nettoyeurs de la mer) après un tour du monde où il a constaté la quantité phénoménal­e de déchets plastiques en mer.
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(Illustrati­on Pierre J. Kubis Design) Le bateau du projet Sea Cleaners, et ses surprenant­es éoliennes.

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