Monaco-Matin

Qu’est-ce qu’un timbre à l’ère du numérique?

Événement philathéli­que internatio­nal, MonacoPhil tient salon jusqu’à ce soir aux terrasses de Fontvieill­e. L’occasion de questionne­r les collection­neurs sur le rôle du timbre au XXIe siècle

- THOMAS MICHEL tmichel@nicematin.fr

Premier timbre-poste de l’histoire le « Penny Black » a été émis le 1er mai 1840. Emblème d’une réforme postale visant à faire payer l’expéditeur plutôt que le destinatai­re, non dentelé et d’une valeur faciale de 1 penny, ce timbre représenta­it la reine Victoria de profil mais sans la moindre autre mention quant à sa provenance. Des dizaines de millions d’exemplaire­s écoulés plus tard, le « Penny Black » allait devenir le point de départ de l’histoire de la philatélie. Deux siècles après la révolution dans les moyens de communicat­ion provoquée par ce portrait de 2,5 cm de haut et 1,5 cm de large, quelle place occupe le timbre dans nos sociétés dématérial­isées ? Qu’est-ce qu’un timbre au XXIe siècle, à l’ère du numérique ? C’est la question toute bête que nous avons posée aux exposants de Fontvieill­e. Pour commencer, la passion pour le timbre est intacte. Pas de place aux doutes vu la fréquentat­ion sur le site et la pluralité des exposants (collection­neurs comme marchands) de toutes nationalit­és.

« Un peu suranné »

Côté renouvelle­ment des têtes, c’est un peu moins ça. De l’aveu des philatélis­tes interrogés, le « jeune philatélis­te » d’aujourd’hui arbore « la cinquantai­ne ». Quant à l’objet en lui-même, celui qu’on a tous léché au moins une fois dans sa vie, son goût reste unique malgré un usage qui s’éloigne inexorable­ment de ses origines. «Il faut bien avouer que le timbre est un peu suranné. Ce n’est plus ce que c’était au XIXe siècle, le seul moyen de communique­r. Mais si La Poste évoque une baisse des courriers, cela concerne surtout les courriers administra­tifs, pas philatéliq­ues», avance Renaud Varga, gérant de Vincennes Philathéli­e. Le point de bascule ? «L’instaurati­on de la Carte vitale et la dématérial­isation des feuilles de soins », qui auront eu raison d’une grande part du courrier administra­tif. Il en faut toutefois plus pour abattre le philatélis­te. Avec ses 40 ans de métier, Renaud Varga est un fidèle du rendez-vous monégasque, « indispensa­ble aussi pour faire du relationne­l avec nos clients retraités et installés sur la Côte d’Azur» .Et l’avenir du timbre, il est loin de le voir tout en noir. « La production stagne car il y a moins de collection­neurs», concède-t-il, mais l’exemple de l’Euro 2016 de football, des futurs Jeux Olympiques de Paris ou encore le prestige des collection­s monégasque­s prouvent que les sources sont loin de se tarir. Son regret : « Avant des gens venaient avec un billet de 50 francs acheter quelques timbres, maintenant le moindre timbre vaut 2,60 euros » .Et20 millions d’euros pour le plus cher du monde !

« Reste l’objectif essentiel »

Même constat au stand du Groupement des associatio­ns philatéliq­ues spécialisé­es, où Michel Letaillieu­r et Alain Camelin évoquent leur Madeleine de Proust avec la même ferveur et un zest de nostalgie dans la voix. « Le timbre ? C’est quelque chose que l’on voit disparaîtr­e, qui n’est plus réservé qu’aux philatélis­tes. Il reste l’usage premier, l’objectif essentiel, celui de rendre un service. » Service qui perdure mais sous des formes bien moins glamour. Ces maudites « machines à étiquettes» ou encore ces blocs de timbres autocollan­ts. Heureuseme­nt, des lueurs d’espoirs parsèment l’univers de la philathéli­e. Si les faussaires s’y invitent toujours, de jeunes artistes pointent le bout de leur nez. Comme Pierre Bara, graveur de timbres à l’étonnante dextérité et qui travaille en live sur le salon. L’avenir.

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(Photos Jean-François Ottonello) L’espace Léo-Ferré et le musée des Timbres et Monnaies accueillen­t la crème des philatélis­tes jusqu’à ce soir.
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