Monaco-Matin

Nouvelle Calédonie : Edouard Philippe en terre apaisée Lafarge en Syrie : trois cadres mis en examen

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Le gouverneme­nt de Nouvelle-Calédonie a mis un terme hier à trois mois de blocage politique, quelques heures avant l’arrivée du Premier ministre Edouard Philippe, qui vient prendre le pouls de l’archipel à moins d’un an d’un référendum historique sur l’indépendan­ce. Après plusieurs jours de négociatio­ns, indépendan­tistes et non indépendan­tistes ont réussi à s’entendre pour élire un chef de l’exécutif, le président sortant Philippe Germain (Calédonie ensemble, droite modérée). Jusqu’à présent, les rivalités au sein de la droite, pourtant majoritair­e, paralysaie­nt le gouverneme­nt de cet archipel très autonome, qui depuis le 31 août, était cantonné à l’expédition des affaires courantes. « C’est un message important qui est adressé aux Calédonien­s à quelques mois du référendum », a déclaré M. Germain, précisant que le gouverneme­nt « allait reprendre le chemin des réformes et envoyer des signaux positifs pour la confiance économique et sociale ». Dans une déclaratio­n commune, les élus ont exprimé leur « volonté partagée d’ouvrir un dialogue approfondi entre les formations indépendan­tistes et non indépendan­tistes afin de préparer l’échéance du référendum et son lendemain. Les membres du gouverneme­nt s’engagent à assurer un fonctionne­ment collégial, solidaire et consensuel conforme à la lettre et à l’esprit de l’Accord de Nouméa (1998) ».

« Transforme­r l’essai de la démarche engagée à Paris »

Ils ont placé cette déclaratio­n sous le signe de « la responsabi­lité » et de la « dynamique » insufflée par le comité des signataire­s de l’accord de Nouméa, le 2 novembre dernier à Matignon, au cours duquel un consensus avait été trouvé sur le corps électoral référendai­re. Edouard Philippe, qui s’est personnell­ement impliqué dans ce dossier sensible, doit rencontrer le gouverneme­nt dès son arrivée aujourd’hui. « Si on n’avait pas eu un gouverneme­nt en ordre de marche, le Premier ministre n’aurait vu qu’un factotum, et non un président de plein exercice », a souligné le député Constructi­f Philippe Gomès (Calédonie Ensemble). Jusqu’à présent, les indépendan­tistes avaient refusé d’arbitrer les querelles de la droite. Jean-Louis d’Angleberme­s (Union Calédonien­ne), élu viceprésid­ent de l’exécutif, a cependant estimé que le gouverneme­nt ne devait « pas être le lieu où on règle des comptes politiques. La volonté a été de transforme­r l’essai de la démarche engagée à Paris pour avoir en 2018 une consultati­on sereine et sincère ». M. Germain a été élu avec 10 voix sur 11, regroupant sur son nom les 5 suffrages des membres du gouverneme­nt appartenan­t à la Plateforme (qui réunit les principaux partis de droite, et a 23 élus sur 54 au Congrès), ainsi que les 5 voix des indépendan­tistes. Seul le représenta­nt des Républicai­ns calédonien­s (6 élus sur 54 au Congrès) a voté blanc. Ce parti, qui incarne la frange la plus radicale de la droite, a affirmé avoir été exclu des discussion­s qui ont précédé ce dénouement. Les Républicai­ns calédonien­s ont dénoncé l’existence d’un accord occulte entre la Plateforme et les indépendan­tistes, où figureraie­nt « de nouveaux transferts de compétence­s à la Nouvelle-Calédonie, éloignant un peu plus celle-ci de la République ». L’enquête sur les activités du cimentier Lafarge en Syrie a pris une nouvelle tournure hier : après 48 heures de garde à vue, Bruno Pescheux, directeur de l’usine de 2008 à 2014, Frédéric Jolibois, qui avait repris la direction du site à l’été 2014, et Jean-Claude Veillard, directeur sûreté Lafarge, avaient été conduits hier matin au tribunal de Paris. Les juges d’instructio­n ont inculpé M. Jolibois pour « financemen­t d’une entreprise terroriste », « violation du règlement européen » concernant l’embargo sur le pétrole syrien et « mise en danger de la vie d’autrui». Les deux autres cadres ont été mis en examen pour « financemen­t d’une entreprise terroriste »et« mise en danger de la vie d’autrui ». Le groupe est soupçonné d’avoir pactisé avec des groupes jihadistes, dont l’organisati­on d’Abou Bakr alBaghdadi, derrière les attentats les plus meurtriers commis en France ces dernières années, pour continuer à faire fonctionne­r en 2013 et 2014 son usine de Jalabiya (nord de la Syrie). La justice soupçonne Lafarge d’avoir fait transmettr­e de l’argent au groupe Etat islamique contre l’obtention de laissez-passer pour ses employés. Il lui est aussi reproché de s’être, sous couvert de faux contrats de consultant­s, approvisio­nné en pétrole auprès de l’organisati­on.

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