Michel Lambin, tueur à gages ?
Michel Lambin, alias « le berger de Caussols », est à nouveau devant une cour d’assises, ce matin à Nice. Malgré une santé précaire, il doit répondre de l’assassinat d’un gardien d’école d’Antibes
Ses associés ont parfois eu du mal à éviter les balles de 11.43. Lui est souvent passé entre les gouttes de la justice pénale. Michel Lambin, 67 ans, surnommé « le berger de Caussols» ou «le berger du milieu » a pourtant rendez-vous ce matin avec ses juges devant la cour d’assises des Alpes-Maritimes. Une juridiction qu’il connaît bien puisqu’il a déjà été condamné en 2011 à Nice pour le meurtre de Jean-Yves Guerrée à dix-huit ans de réclusion.
Quatre heures d’audience par jour
Il doit répondre cette fois de l’assassinat de Robert Ludi, 33 ans, un gardien d’école d’Antibes, abattu dans sa voiture de deux balles le 6 décembre 2002, Emile Fornasari, 57 ans, sera à ses côtés. Ce braqueur réputé est accusé d’avoir commandité le meurtre à son vieil ami Lambin. Ce n’est pas sans mal que s’est organisé ce procès programmé une première fois en 2015 puis reporté sine die. Cloué par une sciatique paralysante, Michel Lambin est resté longtemps intransportable. Une bataille d’experts s’en est suivie, certains préconisant, à la stupeur des policiers de la brigade criminelle de Nice, sa remise en liberté, estimant son état de santé incompatible avec la détention.
Finalement, c’est sur un fauteuil médicalisé, entouré de personnel soignant, que Michel Lambin comparaîtra. Ce détenu hors du commun a été transféré la semaine dernière par avion sanitaire de Paris à la prison de Grasse, plus adaptée que celle de Nice pour l’accueillir. L’audience, présidée par Benoît Delaunay, a été un casse-tête à préparer. Quarante-cinq témoins et experts sont attendus sachant que les débats ne pourront excéder quatre heures par jour en raison de l’état de santé de l’accusé. Le procès qui s’ouvre à 14 heures aujourd’hui est prévu pour durer trois semaines.
Son ex-compagne a relancé l’enquête
Outre ces difficultés logistiques, les enquêteurs ont dû batailler pendant des années pour percer le mystère du meurtre de Robert Ludi. La Crim’ de la PJ de Nice pense y être parvenue grâce, entre autres, à la découverte de l’arme du crime chez… Michel Lambin lors d’une énième perquisition dans le vaste domaine du Bayou, théâtre, semble-t-il, de plusieurs règlements de compte.
« Il conteste tout »
Les révélations en 2009 de Nicole Rossi, celle qui a partagé vingt-cinq ans de la vie de Michel Lambin, ont relancé plusieurs affaires criminelles non résolues. C’est ainsi qu’en 2011, Michel Lambin a été mis en examen pour les meurtres en 2001 du Cannois Farid Errachdi et de l’Ajaccien Jean-Félix Leca, « arrachés » par hélicoptère de la maison d’arrêt de Draguignan avec Emile Fornasari. Pour ces deux dernières affaires, Lambin a bénéficié d’un non-lieu faute de preuves suffisantes. Nonlieu contesté par la famille Leca devant la Cour d’appel. Par ailleurs, la brigade criminelle relie le nom de Lambin à cinq autres crimes, tous prescrits (lire par ailleurs). Si Michel Lambin a avoué le dernier jour de son procès avoir tué Guerrée, il nie tout le reste. Ancien braqueur, devenu patron de bar à Grasse avant de se reconvertir dans l’élevage caprin, nombre de victimes, à jamais disparues, étaient en contact avec lui. Ce n’est pas le cas de Robert Ludi, paisible employé de mairie, gardien de l’école Roger-Cardi, ancien pompier volontaire, éducateur sportif, homme affable et serviable, qui n’évoluait pas du tout dans le même milieu. Et pourtant, il a été exécuté comme un voyou sur un parking de deux balles dans la tête. Le seul tort de Robert Ludi aurait été d’avoir rendu service à une amie d’enfance, ex-compagne d’Emile Fornasari. Moyennant 50 000 euros, ce dernier aurait demandé à Lambin de supprimer Robert Ludi, coupable à ses yeux de tourner autour de la belle dont il était pourtant séparé. « Michel Lambin conteste tout » souligne son avocat Me Isabelle Gortina. « L’arme était dans sa propriété, mais ce n’était pas la sienne. Mon client n’est mêlé ni de près ni de loin à cette affaire.» Mêmes dénégations du côté de Me Tina Colombani, conseil d’Emile Fornasari. L’avocat général Marie-Nina Valli, au nom de la société, a trois semaines pour convaincre la Cour et les jurés que les responsables de la mort de Robert Ludi sont bien les deux hommes qui ont pris place dans le box des accusés.