Monaco-Matin

«Je veux travailler au-delà des clivages politiques»

Ce samedi à 11 h, inaugure sa permanence de députée à Sospel. Elle revient sur les premiers mois de son mandat et les dossiers de la 4e circonscri­ption

- PROPOS RECUEILLIS PAR THIBAUT PARAT

Elle tranche avec son prédécesse­ur. Dans le style. Dans la personnali­té. Mais Alexandra Valetta-Ardisson ne veut pas faire du Guibal. Elle mène sa propre barque dans la 4e circonscri­ption. Ce samedi à 11 heures, elle inaugure sa permanence à Sospel (8, avenue Jean-Médecin). L’occasion de faire un bilan de ses six premiers mois comme députée de la majorité En Marche. C’est un bouleverse­ment total, autant sur le plan profession­nel que de la vie privée. J’essaye de me répartir au mieux entre Paris et la

circonscri­ption. Au début, c’était du  jours sur  mais j’essaye, au moins, de prendre  heures avec mon mari. J’ai une grosse frustratio­n : celle de ne pas avoir encore rencontré tous les maires du territoire. Quand je me déplace, je ne fais pas des vi ites politiques de deux heures. Je veux bien faire les choses.

Vous avez succédé à un poids lourd de la politique locale, JeanClaude Guibal. Est-ce difficile de faire son trou après ses  années de députation ? C’est à la fois facile et difficile. J’ai été élu sans soutien politique. Au début, donc, je ne pouvais pas m’appuyer sur les élus en place pour pouvoir travailler sur des dossiers. Quelque part, c’est encore plus facile car ma légitimité je la tiens de la population. Ce sont les électeurs qui ont voulu quelqu’un de nouveau et qui ne dépend pas des apparatchi­k politique habituel. Certains élus sont, non pas réticents à mon égard, mais en phase d’observatio­n. J’avais envoyé un courrier à tous les maires quand j’ai été élue en leur disant que je voulais travailler au-delà des clivages politiques et dans l’intérêt général. Avec certains, cela prendra plus de temps.

Les côtés positifs et négatifs d’être députée? On a l’impression qu’on peut réellement agir. On a un réel « pouvoir». Le fait d’être dans la majorité nous permet d’avoir un accès direct aux ministres et au Premier ministre. On a les moyens d’agir directemen­t sur des sujets où il y a blocage. Cela réconcilie avec la politique. L’aspect moins cool, c’est cette frustratio­n de ne pas réussir à en faire assez. Il y a tellement de sollicitat­ions qu’on est contraint à des choix. Faire des choix, c’est prioriser et renoncer. Parfois, les gens confondent le rôle d’un député avec celui d’un maire.

Sentez-vous une attente de la population sur le fait de devoir être une élue irréprocha­ble ? Honnêtemen­t, non. On ne m’en parle pas. Lors de ma campagne, j’ai vu que les gens étaient attentifs à cela. Des choses importante­s ont été actées au niveau législatif. Moi, par contre, je me mets une pression supplément­aire à essayer de l’être. Pour me dire qu’on est différents et qu’on essaye d’être le plus possible en phase avec la réalité des Français.

Pour l’instant, vous n’habitez pas sur la circonscri­ption. Est-ce un handicap pour la proximité? Le seul handicap, il est pour moi. Ma vie privée en pâtit. Je mets parfois deux heures pour atteindre un point de la circo mais j’arrive toujours à l’heure. Si cela devenait un réel handicap pour les gens du secteur, alors j’essayerais d’y remédier.

Ce week-end, vous inaugurez votre pemanence à Sospel. Pourquoi ce choix? Je m’étais engagée à en ouvrir deux pendant la campagne. J’ai souhaité que la première soit dans le moyen-pays. L’objectif était de ne pas privilégie­r l’endroit où il y avait le plus d’électeurs, à savoir le littoral, et de montrer qu’il existe un moyen-pays. Quelque part, j’essaye de faire de la politique différemme­nt. Sospel est au coeur du territoire, au carrefour des chemins. Sur le littoral, j’ai opté pour une permanence mobile. C’est mieux d’aller à la rencontre des gens. Peut-on être sur tous les fronts dans une circo aussi vaste ? On essaye! La est une petite France. On a un littoral touristiqu­e et riche mais avec des problémati­ques de transports. On a un moyen et haut-pays qui se désertifie avec les mêmes problèmes de transport. Il faut être sur tous les fronts et essayer de prioriser. Les sujets phares du secteur sont les migrants et la mobilité. Ça me prend du temps.

La Roya, Bévéra et Paillons ont souvent l’impression d’être les C’est vrai ! Il faut qu’ils aient une députée qui ne doit rien à personne. Je n’ai pas peur de mettre les pieds dans le plat. Je ne suis pas là pour négocier des postes pour les uns ou pour les autres ou pour moi, pour la suite. Du coup, j’y vais clairement et de façon cash. Il faut qu’on travaille tous ensemble. Tous les élus à toutes les strates. On l’a vu pour l’arrêté anti-poids lourds dans la Roya.

Qu’a donné la réunion en préfecture à ce sujet ? Le préfet a bien saisi la motivation des élus. Il a salué l’unanimité politique. Il faut juste être vigilant sur une chose: c’est une route internatio­nale. Il faut faire attention à ne pas froisser l’Italie avec qui nous avons de relations multiples, notamment sur la ligne Nice-Cuneo et la question migratoire. J’ai soutenu les maires pour des questions évidentes de sécurité, d‘abord. Et puis, cette vallée doit retrouver de sa splendeur.

Vous étiez à Malte pour la conférence de La Valette sur les migrations. Qu’en retenir? Il en est ressorti un besoin criant de l’Afrique de garder sur son territoire les personnes qui tentent de venir en Europe. Ils nous ont bien fait comprendre que c’était leurs forces vives, leurs hommes forts. Qu’en Afrique, il y a une désinforma­tion. On leur fait croire que ces gens-là sont attendus et espérés en Europe. Ils croient chercher l’Eldorado alors que ce n’est pas le cas. Si on n’aide pas l’Afrique à se développer, une grande partie de la population va vouloir partir. C’est un drame humain. J’ai senti certains pays d’Afrique qui essayent de se battre et qui ont le sentiment d’être seuls.

Dans les questions écrites, vous n’avez, pour l’heure, pas évoqué la situation migratoire à la frontière. Pourquoi ne pas le faire en séance, à l’oral? J’ai un collègue qui est au point de sortie et il y avait une urgence sur son territoire, Je lui ai laissé la place. Poser une question, c’est avoir une réponse en face. Je pose quoi comme question? Sur les conditions d’accueil ? On est en train de les travailler. Une loi va sortir au premier trimestre  . C’est donc prématuré. Poser une question écrite ? C’est du flanc et ce serait politique. J’en poserai une quand je serai sûre d’avoir une réponse concrète et pertinente. À l’heure actuelle, on travaille sur un projet de loi. Poser une question, ce serait juste faire un coup de com’ et je ne fonctionne pas comme ça.

Est-ce qu’un jour Gérard Collomb viendra à la frontière ? J’en ai discuté la semaine dernière avec le Premier ministre. Ils l’ont bien en tête. Il reste toujours cette problémati­que de coup de com’ qui serait, sur le sujet, détestable. Il n’est pas exclu que le Premier ministre vienne pour saluer les hommes de la frontière. Au moment le plus opportun.

Vous appartenez à la commission de la défense nationale et des forces armées? Qu’y faites-vous ? Dans cette commission, on travaille sur le budget de l’armée et aussi sur la armée: la cyber-défense et cyber-sécurité. En ce moment, on travaille sur la loi de programmat­ion militaire de  à . Il y a beaucoup d’auditions… On travaille aussi sur les anciens combattant­s, sur les conditions de vie des familles et des militaires.

Concernant la ligne Nice-Cuneo, la lutte payera sur le long terme? Les travaux sont engagés mais ce n’est pas satisfaisa­nt. Ils vont permettre de ne pas fermer la ligne. Mais ne vont pas permettre le retour à une vitesse acceptable qui est de  ou  km/h. Ces travaux d’urgence étaient nécessaire­s. Mais le gros de la négociatio­n va être dans le prolongeme­nt de cette ligne pour réellement en faire une ligne transfront­alière. Tout cela dans l’optique de regagner de la vitesse, de faire venir des fonds européens. Le problème est financier, il ne faut pas se la cacher. Il faut mettre plus de vitesse, de rotations pour désenclave­r les vallées.

Où en est la bretelle de l’A à Beausoleil? C’est un sujet que j’attaque à peine. J’ai commencé à me rapprocher de Monaco. J’ai saisi le ministère des transports et Nicolas Hulot sur la problémati­que de la circulatio­n dans le départemen­t et la e circonscri­ption. On va apporter une contributi­on pour les assises de la mobilité. Il va falloir mettre les pieds dans le plat au niveau d’Escota. Ce n’est plus possible ces bouchons…

 ??  ?? Comment vivez-vous cette nouvelle vie de députée ? « parents pauvres» de la Tinée et de la Vésubie. Comment y remédier?
Comment vivez-vous cette nouvelle vie de députée ? « parents pauvres» de la Tinée et de la Vésubie. Comment y remédier?

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