Monaco-Matin

Dubuisson : « Au bout, il y a la Ryder cup»

Le Cannois Victor Dubuisson, 27 ans, a connu une saison à plusieurs reflets. Pour 2018, le n°2 français aspire à plus de régularité afin de se qualifier pour la Ryder Cup en France en septembre

- FABIEN PIGALLE

C’est évidemment au Old Course Cannes-Mandelieu que Victor Dubuisson nous a donné rendez-vous pour une interview golfique décontract­ée. Le Old Course, sa deuxième maison. Là même où les tempêtes qui rythment une saison sur l’European Tour n’ont aucun effet. Peu importent les résultats, bons ou mauvais, il ne sera pas jugé. C’est un Victor Dubuisson souriant et reposé avec qui nous avons échangé pendant près d’une heure. Soulagé, voire apaisé. A  ans, le Cannois entend bien donner à sa carrière un nouveau tournant. Le golfeur tricolore le plus talentueux compte faire de  une année charnière. Avec l’espoir d’être sélectionn­é pour la Ryder Cup en France. Et marquer un peu plus encore l’histoire nationale.

Victor, quel regard portez-vous sur votre saison ?

J’ai envie de dire que le résultat final n’est pas si mauvais que ça. Honnêtemen­t, ça reste une bonne saison. Il ne faut pas oublier que le niveau sur le Tour Européen est de plus en plus élevé. C’est un circuit très exigeant. Je termine à une place correcte à la Race to Dubaï (e), comme l’an dernier. Ok, je sortais de trois précédente­s grosses saisons avec deux top  (e en  et e en ) et une e place en . L’année dernière et cette année, je termine un peu plus loin, mais ça reste une bonne saison.

Vous avez réussi à sauver votre carte sur le Tour Européen grâce à un bon finish. Vous êtes-vous fait peur ?

Je me suis sauvé sur la fin, en scorant sur les gros tournois. C’est la première chose à laquelle on pense… Après, je pense que certains joueurs sont performant­s en début de saison, et d’autres, plutôt à la fin. Si on regarde mes cinq dernières années, j’ai toujours été performant en fin d’année. Alors on peut voir les choses de deux façons : soit effectivem­ent, je me suis “sauvé” sur les derniers tournois… soit, je suis comme les années passées au rendez-vous sur les gros tournois de fin de saison.

Comment expliquez-vous vos manques de résultats en début de saison dans ce cas ?

Il faut l’avouer : l’année dernière comme cette année, je n’ai pas trop joué. Jusqu’à la mi-saison, j’ai consacré près de % de mon temps à la pêche. Je ne m’étais pas assez concentré sur mon golf. Forcément, les résultats étaient moins bons. J’ai également eu pas mal de problèmes de santé à cause de mes sinus qui sont déformés et qui m’empêchaien­t de respirer et d’être en pleine forme. Par moments, prendre l’avion m’était insupporta­ble. Mais je vais me faire opérer. C’est une grosse interventi­on en anesthésie générale etc. Ça me permettra de régler ce problème qui m’obligeait de prendre régulièrem­ent un traitement. Je serai tranquille ensuite et me sentirai mieux sur le parcours.

Vous nous aviez accordé une interview début juin, avant l’enchaîneme­nt de gros tournois du Rolex Series, comme l’HNA Open de France etc. Vous étiez très déterminé et ambitieux mais les résultats n’ont pas suivi. Comment avez-vous vécu cette période difficile ?

J’ai payé le fait de ne pas avoir assez joué en début de saison. Quand je suis arrivé sur les gros tournois, les parcours difficiles, avec un champ de joueurs très relevé, forcément, j’ai été à la ramasse. Je suis passé complèteme­nt à côté de l’enchaîneme­nt mois de juin-juillet et ses grands rendez-vous. Ça m’a mis un coup derrière la tête.

Ça vous a servi de déclic ?

Non, parce qu’au fond de moi, je le savais. Je ne pouvais pas faire de miracle. Je savais que j’avais le niveau pour faire quelque chose de moyen, mais rien d’exceptionn­el. Je suis passé à côté. Après ça, c’était difficile de se remotiver pour les - gros tournois de fin d’année. Mais j’ai fait de mon mieux. Sur le parcours, je ne réfléchis pas trop, je cherche toujours à faire de mon mieux sur chaque coup. Après, il ne faut pas trop penser au résultat. Surtout quand on doit absolument en faire un. C’est paradoxal quelque part. Plus on doit le faire, moins il faut y penser.

Dans ce contexte de spirale négative, à quoi vous raccrochez-vous ?

Je me dis que je dois faire abstractio­n du résultat. En l’occurrence au Dunhill (il termine e et sauve sa carte pour ), où j’aime les trois parcours, les links, j’ai senti que ça pouvait bien se passer. Une semaine avant, j’ai commencé à bien putter. Je me disais que si le putting était au rendez-vous, ça pouvait le faire. Je l’ai senti dès le premier jour où, pourtant, je ne tapais pas bien la balle. C’était une journée très compliquée où j’étais + après  trous… très dur. Mais je me suis accroché jusqu’à la fin. Sur les autres parcours ensuite, tout s’est bien goupillé au niveau de la frappe de balle et du putt. Le dernier jour, tout était au rendez-vous avec un putting exceptionn­el. Et c’était reparti.

Vous avez toujours dit que la clé, c’était le putting…

Quand on a un long jeu correct et qu’on prend les trois-quarts des greens en régulation, oui, ce n’est plus qu’une question de putting.

Après avoir sauvé votre carte au Dunhill, vous êtes monté en puissance…

Oui, même si je me suis blessé au poignet dans la foulée en Italie. C’était très frustrant car ça me coupait dans mon élan. J’étais déçu. Mais j’ai eu de la chance parce que je pensais m’être cassé quelque chose après avoir frappé une racine sur un plein coup de fer . Ma balle était masquée par des feuilles. J’ai pu finir ma partie, mais pas repartir ensuite…

Craigniez-vous de perdre votre droit de jeu sur le Tour Européen ?

Non…

Et autour de vous ?

Non, je ne ressentais pas une atmosphère particuliè­re. Au pire, je perdais ma carte mais sans vraiment la perdre. Grâce à ma boîte de management IMG, j’aurais eu des invitation­s pour beaucoup de tournois… En fait, je ne pensais vraiment pas à ça. Je voulais vraiment me concentrer sur mon jeu. Je me disais : tant que la saison n’est pas terminée et qu’il reste des tournois à jouer, ce n’est pas le moment de penser à ça. C’était se rajouter de la pression pour rien. Je savais au fond de moi que si je rejouais normalemen­t mon golf, il n’y avait aucune raison de perdre ma carte.

J’ai payé le fait de ne pas avoir assez joué ” Je savais au fond de moi que si je rejouais normalemen­t mon golf, il n’y avait aucune raison de perdre ma carte ”

Parlez-nous de votre coach, Benoît Ducoulombi­er…

Avec Benoît, c’est très fusionnel. En , il a été le déclencheu­r de ma carrière. Pour moi, ce serait inconcevab­le de ne pas m’entraîner avec lui. On ne se voit pas souvent, mais quand on fait nos séances d’entraîneme­nt, c’est très spécial. Hyper efficace et sincère. Il me connaît tellement... Avec certains joueurs, il a besoin peutêtre d’une journée alors qu’avec moi, dix minutes suffiraien­t presque.

Comment travaillez-vous ? Ce ne sont que de petits réglages. Comme un entretien mécanique. Les bases y sont, mais il y a des petites choses à régler et corriger avec le temps. Surtout quand je ne le vois pas pendant  ou  tournois. Il suffit que sur l’un des tournois il y ait du vent, que je décale un poil mes pieds pour compenser, mes épaules, que mon grip change de quelques millimètre­s, tout ça sans s’en rendre compte ; et ça peut dérégler beaucoup de choses. Au final, ce sont des détails très importants à remettre en place. Cela ne peut prendre que quelques minutes, mais c’est ce qui fait la différence en tournoi. Quand on est dans cette précision-là, le plus important c’est la confiance. J’ai une confiance aveugle en Benoît. Quand il me dit quelque chose, je ne me pose même pas la question de l’intérêt ou pas. Je ne doute pas une seconde. Je l’écoute, et je fais. Je ne remets jamais en cause ce qu’il me dit. C’est ce qui fait la différence. Je vais vous dire exactement ce qu’il s’est passé car personne ne le sait vraiment. En début d’année, la Fédération a décidé de changer son système concernant la mise à dispositio­n des coachs de la FFG. L’an dernier, je payais à la journée d’entraîneme­nt, en tournoi etc. Mais la Fédé a décidé de fonctionne­r sous forme de forfait à l’année. Du coup, je me suis retrouvé à devoir payer une somme qui n’était plus du tout en rapport avec le temps que je passais réellement avec Benoît. On parle d’un montant  ou  fois supérieur. Mais que ce soit clair, ce n’était pas une question d’argent, c’était pour le principe. Vraiment. Je ne pouvais pas accepter. Le montant aurait pu être  fois plus élevé, s’il correspond­ait au nombre de fois où je le voyais, ça ne m’aurait posé aucun problème. Mais là, non. Après en avoir parlé avec Benoît, nous étions d’accord pour ne pas accepter ça. Ce n’était pas correct. Je le voyais très peu. La fédération a alors dit à Benoît de ne plus m’entraîner. C’est très bête comme histoire au final. qu’il redevienne votre coach ? En fin de saison, mes résultats n’étaient toujours pas au rendez-vous… Mais grâce à Pascal Grizot (président de la commission Ryder Cup ) avec qui je m’entends très bien, j’ai eu l’autorisati­on de me réentraîne­r avec Benoît. C’est vraiment grâce à Pascal Grizot. On a commencé à retravaill­er ensemble juste avant le Dunhill. J’assure ma carte sur ce tournoi en terminant

Il n’y a pas de hasard.

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Victor Dubuisson a gardé sa voiturette de la Ryder Cup . Une compétitio­n qu’il avait remportée avec l’équipe européenne.

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