Monaco-Matin

Stefanini décrypte la défaite de Fillon

- TH. PRUDHON

« La droite ne s’est pas remise de la défaite de Sarkozy en 2012, dont elle a oublié de faire l’inventaire. » Didactique et chirurgica­l, Patrick Stefanini, qui fut le directeur de campagne de François Fillon, est venu évoquer à Nice son livre Déflagrati­on, qui décortique le gadin de l’ancien Premier ministre à la présidenti­elle, auprès du Cercle des amis de Jacques Chirac (1). Des compagnons de route azuréens avec lesquels, alors directeur de campagne de l’ancien Président, il avait au contraire décroché un succès longtemps inespéré en 1995.

« Un mystère… »

Aux yeux de Stefanini, l’échec retentissa­nt de François Fillon tient à quatre raisons. La première relève bien sûr des affaires et de ce qu’il qualifie pudiquemen­t « d’imprudence­s » de Fillon. « C’est un mystère pour moi. Comment un homme réputé être un des plus prudents à droite a-t-il pu tomber dans le piège des costumes, notamment? » Résultat implacable, « alors que Chirac et Sarkozy avaient mené des campagnes de conquérant­s, Fillon s’est retrouvé acculé, en permanence sur la défensive ». Sur l’emploi de proches, il a son explicatio­n: « François Fillon appartient au système parlementa­ire, où le travail en famille était une pratique courante. Il avait un sentiment de normalité et n’a pas compris qu’on vienne lui chercher des poux sur ce sujet. » Mais pour Patrick Stefanini, si Fillon a été sanctionné pour ses «traits de caractère» ,là n’est pas l’essentiel. «La droite a perdu l’électorat populaire, elle n’a pas assez parlé de pouvoir d’achat, des fractures territoria­les. Les promesses de Sarkozy, travailler plus pour gagner plus, ont été balayées par la crise de 2008.»

Un projet décalé

Troisième raison avancée pour expliquer la défaite, la primaire qui a faussé la perception de l’élection: «L’électorat de la primaire, âgé et composé pour beaucoup de cadres, était décalé par rapport à l’électorat français. Le projet de Fillon était calibré pour l’électorat de la primaire, mais il n’a pas su le faire évoluer. Il aurait dû l’enrichir avec une ou deux idées de Sarkozy et Juppé pour réussir à fédérer plus largement.» A l’avenir, Patrick Stefanini préconise, non de supprimer cette primaire, mais de l’avancer au printemps, pour faciliter ensuite le rassemblem­ent autour du vainqueur. Dernière cause de l’échec mise en exergue : «La droite a perdu le centre. Dès lors que François Bayrou a rallié Emmanuel Macron, ce dernier a creusé avec François Fillon un écart de quatre points, qui n’a plus bougé jusqu’au 23 avril.» Au cours de ses dédicaces, à Nice et Villeneuve-Loubet, Patrick Stefanini a rencontré, dit-il, trois types de réactions. « Certains estiment que Fillon les a roulés dans la farine. D’autres se réfugient derrière la théorie du complot, probable mais qui n’était pas un argument de défense convaincan­t. Les derniers, enfin, se demandent comment la droite va pouvoir rebondir. » Lui pense que c’est «en retrouvant les fondamenta­ux du gaullisme et l’oreille de l’électorat populaire, en incarnant l’autorité, sans occulter les questions liées à l’immigratio­n et à la place de l’islam». 1. Autour des cofondateu­rs Jean-Pierre Mangiapan et Pierre-Paul Léonelli, étaient notamment présents Gilbert Stellardo, Gaston Franco, Bernard Asso…

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(Photo T. P.) Patrick Stefanini entouré par Pierre-Paul Leonelli et Jean-Pierre Mangiapan.

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