Les défis qui attendent
Aux confins du département, les cinq communes de la Roya font face, depuis de nombreuses années, à des problèmes d’ampleur. Les solutions qui seront apportées détermineront leur avenir
Vu de l’extérieur, difficile d’imaginer qu’une si petite vallée de habitants pouvait être confrontée à tant d’épreuves. Soumise à tant de défis. Entre les transports – absolument indispensables – les contraintes propres à un territoire de montagne et d’histoire, le problème plus récent d’un afflux de migrants à la frontière... La taille de la Roya est inversement proportionnelle à l’importance des problèmes rencontrés. Les solutions étant d’autant plus difficiles à trouver que le territoire est géographiquement isolé. Voire laissé pour compte, selon certains. Unis comme les cinq doigts d’une main, les maires de Breil, Fontan, Saorge, La Brigue et Tende ont malgré tout réussi à l’emporter face au problème des poids-lourds dans la vallée. Obtenant dans un premier temps le soutien de la Communauté d’agglomération, puis celui du Département. Sans compter sur un appui indéfectible de leurs administrés. Preuve que pour être entendus, seule l’union prévaut. Les projets dans les tuyaux, la vie quotidienne des habitants et même le dynamisme de la vallée de la Roya ont pour point commun de dépendre d’une chose. Une donnée essentielle. Les usagers l’appellent la « ligne de vie ». D’autres la décrivent plus prosaïquement comme le chemin de fer reliant Nice à Cuneo et à Turin. Un train international – caractéristique méconnue – qui fait couler des barils d’encre depuis des années. Alors que la menace d’une fermeture de la ligne planait sur la vallée il y a quelques années, le lancement d’une première phase de travaux, en septembre, sur le tronçon entre Breil et Limone, a (partiellement) rassuré la majorité des personnes concernées. Prêtes à manifester encore et encore s’il le fallait.
Travaux de sécurisation
Exclusivement financé par l’Italie (qui a déboursé la somme importante de 29 millions d’euros), le chantier vise ainsi à « améliorer le niveau de sécurité des installations pour éviter l’arrêt de circulation qui nous pend au nez depuis 2010, année où les Italiens ont stoppé les gros investissements sur la ligne», comme l’expliquait Cheikh Ndiaye, directeur des opérations chez SNCF Réseau, lors d’une réunion avec les politiques de la vallée. Le mauvais état de la section entre Breil et Limone ayant déjà entraîné, en novembre 2013, la diminution de la vitesse de circulation de 80 La pérennité de la ligne Nice-Breil-Cuneo dépendra d’une phase de travaux. Pas encore budgétée…
km/h à 40 km/h, afin d’en garantir la sécurité. Remplacement des rails et du ballast, mise en place de filets de détection de chutes de rochers et de grillages de protection sur les falaises, rénovation de ponts-rails sont programmés jusqu’au 28 avril. Problème: cette première phase de travaux n’assurera pas immédiatement un retour aux conditions initiales de circulation. Notamment au regard de la vitesse. Et si une deuxième phase de travaux est d’ores et déjà annoncée, l’ampleur
du chantier dépendra de l’enveloppe allouée. Pour l’heure, seuls 15 millions d’euros sont assurés : ceux du plan Etat-Région, côté français. Or, à moins de 50 millions d’euros (correspondant à des travaux ciblés sur certaines zones seulement), le gain de temps n’excéderait pas les dix minutes, selon une étude réalisée par SNCF Réseau. Et seul le scénario à plus de 100 millions d’euros correspondrait à un retour aux 80 km/h d’antan. Du côté des associations d’usagers de la ligne, c’est là que le bât blesse. Comment remplir un train et légitimer son existence s’il circule à 40 km/h, soit plus lentement qu’une voiture faisant le même trajet par la route ? Pour les élus de la vallée, l’argument de la « non-rentabilité » de la ligne avancé par la SNCF doit cesser. Il s’agit là de «rentabilité sociale », clament-ils. Les villages ayant besoin d’être reliés aux métropoles du littoral pour exister. Et attirer des actifs. « C’est l’épine dorsale de la vallée, la seule alternative à la route. Elle a clairement un rôle économique et de désenclavement du territoire», reconnaît Cheikh Ndiaye.
Convention à réviser
Le déblocage des fonds ne pourra en fait se réaliser qu’après la révision de la convention de 1970 qui unit les deux pays usagers de la ligne. Les Italiens considérant qu’ils ont déjà beaucoup investi (entre autres pour dommages de guerre) souhaitent désormais que la France prenne une part plus importante. Que les rôles soient davantage équilibrés. Mais les deux États tardent à signer ledit document. «Ce n’est pas normal qu’ils traînent la savate, résume le maire de Tende, Jean-Pierre Vassallo. Cette ligne ne se réduit pas au tronçon Breil-Tende! Une action doit être tout de suite engagée pour que dès la réouverture on poursuive les efforts. »