Monaco-Matin

A Tourette-du-château, Lena crée pour sa ligne de chaussures

Au coeur de ce petit village de la vallée de l’Estéron, la bottière de 27 ans a installé son atelier de fabricatio­n. Et si l’avenir du haut pays passait par les petits artisans

- SOPHIE CASALS scasals@nicematin.fr

Après une heure de route, de lacets surplomban­t un panorama somptueux, sur la vallée du Var puis de l’Estéron, le village perché apparaît. Un décor de carte postale auquel Lena insuffle un peu d’animation depuis qu’elle y a planté son atelier de fabricatio­n de chaussures. Car en dehors de l’auberge du Mont-Vial, pas l’ombre d’un commerce à Tourette-du-château. «On n’a plus rien ici, pas de boulangeri­e, ni d’épicerie, rien, lâche une ancienne qui promène son chien. La bottière, évidemment que je la connais, c’est bien qu’elle se soit installée. Tiens la voilà ! » Tablier de cuir autour de la taille, elle vient à notre rencontre. Salue au passage la Tourettane et l’employé communal qui retape un banc en bois. « Mon téléphone ne capte pas bien ici, alors je vous guettais. » Pourquoi donc Lena a-t-elle posé ses cuirs, perforeuse­s et autres poinçons dans ce village isolé du haut pays? En guise de réponse, elle propose de nous faire découvrir le village. Le lavoir, les ruelles escarpées qui mènent au point de vue. Sublime. « Quand j’ai découvert Tourette-du-Château, j’ai eu un véritable coup de coeur. Mon mari est originaire d’ici, ses grands parents tenaient l’ancien hôtel, » raconte la jeune femme. A la recherche d’un local pour fabriquer ses collection­s, elle décide donc de s’installer au rez-de-chaussée de l’établissem­ent, fermé depuis belle lurette. « J’ai choisi le village pour le calme et la vue incroyable, à Tourette, je me ressource. » C’était il y a deux ans. Avant, la jeune femme a vu du pays. « Passionnée de chaussures depuis toujours », l’Aixoise part en apprentiss­age à Ravensbrüc­k en Allemagne chez un maître cordonnier bottier. Puis elle met le cap sur Cholet, pour décrocher, en 2012, le diplôme de styliste-modéliste chaussures de l’Institut Colbert. « A l’époque, il n’y avait que 16 bottiers en France. C’est un métier oublié qui connaît un regain d’intérêt. » Elle travaille un temps pour la prestigieu­se manufactur­e J.M Weston à Limoges, mais a envie d’autre chose. « Je voulais créer et fabriquer, partir de l’idée, passer par le dessin, le patronage, et le montage. J’aime la polyvalenc­e de ce métier et toutes les casquettes qui vont avec. » Alors, Lena lance sa marque : « Nela Orchells. » Accompagné­e par l’associatio­n ACEC-BGE qui accompagne les porteurs de projets, elle crée son entreprise. Et se fixe un défi : « rendre féminine, les chaussures plates. »

Des escarpins made in Tourette-du-Château

Dans ce paisible village du haut pays, elle peut créer sans être distraite. « Je travaille ici trois jours par semaine. C’est simple, dans l’atelier je ne capte pas, je suis coupée de tout. » Elle se consacre pleinement à ses créations. Sans déranger les voisins. « J’ai des machines qui font du bruit, et comme j’utilise des colles qui sentent fort, je travaille la porte ouverte. Mais les premières maisons habitées sont un peu plus loin. » Sandales, escarpins, mocassins… Elle travaille sur les modèles de sa prochaine collection. En vente dans la boutique conceptu’l, rue Emmanuel Philibert à Nice. « Je fais des petites séries, du 36 au 40, du coup chaque modèle est unique. » Et made in Tourette-du-château. « Je suis tellement concentrée ici que j’en oublie parfois de manger. » Mais, les habitants veillent au grain. « Ils passent m’offrir le café, discuter. J’ai été très bien accueillie. Les villages sont propices à l’artisanat. C’est un cadre idéal pour créer. Ce serait sans doute une piste à creuser pour redynamise­r le haut-pays, ça complétera­it l’activité d’élevage. » Site internet: nelaorchel­ls.com

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