Monaco-Matin

Ados et malbouffe : pas de fatalité Nutrition

Image de soi, mieux-être... Virginie Parée s’appuie sur ces notions qui parlent aux ados pour conduire un projet pédagogiqu­e au sein du lycée George-Sand à Nice

- NANCY CATTAN

Que s’est-il passé depuis la dernière fois où nous nous sommes rencontrés?», interroge Virginie Parée coach en nutrition. «J’ai perdu 16 juste en changeant d’alimentati­on, et là, je me sens moins fatigué.» Thomas étudiant en terminale, est heureux. Virginie le félicite, ses camarades le regardent avec admiration. La coach poursuit les échanges: «Vous vous souvenez quels étaient les mauvais gras?» Aussitôt, une main se lève, et une voix assurée répond: «L’huile d’olive dans laquelle sont contenues les sardines!» Rires des autres élèves. «Mais il y a aussi les sardines elles-mêmes et les poissons gras…», complète Virginie avant de rappeler quelques notions de base: «Les mauvais gras viennent des huiles de mauvaise qualité… Il faut privilégie­r les protéines issues des poissons, des végétaux…» Après avoir délivré quelques autres informatio­ns d’ordre général, Virginie interpelle à nouveau la classe: «Pourriez-vous me dire ce que vous avez introduit de nouveau dans votre alimentati­on?» Les réponses fusent: «Je n’achète plus que du chocolat noir aux amandes!» «Moi, j’ai arrêté le lait de vache; je ne bois plus que du lait de soja. J’avais des maux de ventre, ils ont diminué.» «Pour le goûter, je ne mange plus que des fruits secs…» Sourires. On apprendra que Marine est devenue «dealer officiel de fruits secs» au sein de l’établissem­ent. Virginie embraye aussitôt sur les sucres. «Tout ce qui est blanc, les pâtes, le riz, le pain sont des aliments trop raffinés. Il est préférable de consommer des céréales complètes.» Stéphanie lève aussitôt la main– «Moi, ça y est, je mange des pâtes complètes!». Suivie par Laure. «Moi, je mange du pain complet! C’est moins bon, mais c’est bon!» La jeune fille renoue (Photo N. C.) avec la scolarité après une longue période d’absence. Atteinte de phobie scolaire, elle est restée enfermée chez elle pendant plusieurs mois et mangeait toute la journée.

L’image de soi, centrale

Nous sommes dans une classe de terminale du lycée George-Sand à Nice. Un établissem­ent hors contrat qui accueille des jeunes en échec scolaire, atteints de troubles de l’attention, de phobie scolaire, de ‘’dys’’ (dyslexie, dysorthogr­aphie, dyscalculi­e, etc.) ou encore d’hyperactiv­ité. Des jeunes en souffrance, et qui comme les autres, peut-être même davantage, sont attentifs à leur image. «Contrairem­ent à ce que l’on pourrait croire, les adolescent­s sont soucieux de leur alimentati­on. Pas dans l’idée de se prémunir de certaines maladies, mais parce qu’ils sont à un âge où l’apparence et la constructi­on de l’image de soi sont centrales. Ce qui en soi est une bonne nouvelle et nous pousse à mener à bien ce projet pédagogiqu­e», relate Virginie. Un projet conduit en collaborat­ion avec l’enseignant de SVT au sein du lycée GeorgeSand. «Nous sommes bien consciente­s des enjeux d’une nutrition saine sur l’apprentiss­age, la concentrat­ion et les résultats scolaires, et il nous a paru important de sensibilis­er parents d’élèves et enfants à cette problémati­que», confient les directrice­s de l’établissem­ent, Sophie Cambourian et MarieHélèn­e Tranier. Une nécessité fondée sur l’observatio­n de comporteme­nts «déraisonna­bles» «Dans notre établissem­ent, les élèves apportent leur panier-repas. Or, si les parents des plus jeunes élèves mettent, dans la préparatio­n de la “lunch box”, un soin particulie­r à faire ce que leur enfant aime tout en respectant un équilibre alimentair­e dans le choix des aliments, chez les plus grands, c’est une tout autre réalité. La “lunch box” disparaît au profit de la pizza, du plat préparé industriel… Ou alors, les parents donnent de l’argent et les élèves vont acheter un “American sandwich” ,un kebab, des sodas…» Ce que l’on nomme communémen­t la junk food, et qui permet d’assouvir non seulement leur appétit mais aussi – surtout – une quête identitair­e et sociétale. Faut-il pour autant se déclarer impuissant et abandonner les jeunes à cette malbouffe? Non. L’initiative menée par le lycée George-Sand, les mots de Laure, Thomas, Stéphanie, et plus encore que leurs mots, leurs actes, montrent que si les jeunes sont pris dans la toile du «prêt à consommer», ils peuvent recouvrer très vite leur liberté, si on les aide à s’en libérer. 1. Elle est l’auteure de Mais pourquoi personne ne nous le dit ? - L’alimentati­on santé des ados (éd. Mosaïque Santé). 2. Les prénoms des élèves ont été modifiés.

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Après être intervenue auprès des parents et dans les classes, Virgine revient pour « valider les acquis ».

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