Monaco-Matin

Doux rêveur

Le comédien est de retour à Monaco avec « Ma vie encore plus rêvée », nouvelle version d’un spectacle qui a déjà plusieurs années. Il y parle de tout, pour faire rire et réfléchir, avec tendresse

- LUDOVIC MERCIER lmercier@nicematin.fr

Michel Boujenah est à l’affiche du Théâtre des Muses jusqu’à dimanche. Dans cette pièce, le comédien raconte les vies qu’il aurait pu avoir. A Monaco-Matin, il confie notamment son attachemen­t à la Principaut­é.

Quelques heures avant la première de son spectacle à guichet fermé, Michel Boujenah nous reçoit sur la scène du Théâtre des Muses, dans le canapé en velours grenat. Volubile et généreux, le comédien met à l’aise. Le ukulélé de sa sonnerie de téléphone retentit, il répond poliment. Refuse « Danse avec les stars », et se marre avec nous. Il partage ses réflexions sur la vie avec une générosité éblouissan­te. Michel Boujenah est comme ses personnage­s : modeste, lucide, sensible, drôle et mordant. Rencontre.

C’est quoi votre histoire avec Monaco ? Je suis venu très souvent jouer au Théâtre Princesse-Grace. Le prince Rainier aimait beaucoup mon travail, et le prince Albert également. Il nous arrivait de dîner ensemble après le spectacle. J’adore venir au cinéma en plein air, j’y viens chaque été au moins une fois, ça me rappelle mon enfance. Sinon, Monaco, ce n’est pas vraiment mon univers. Je ne suis pas un joueur. Mais ce n’est pas loin de la maison, puisque j’habite à Saint-Paulde-Vence, et donc c’est sympa pour « sortir ».

Il y a un autre événement que vous appréciez particuliè­rement je crois…

Le tournoi de tennis ? Ah oui ! En plus j’ai eu la chance de jouer avec Yannick Noah contre John McEnroe et le

prince Albert. On a bien rigolé.

C’était vraiment étonnant. Je suis dingue de tennis, mais à Monaco c’est particuliè­rement magnifique avec ce club au-dessus de la mer… Le tennis, ça me passionne vraiment. Il y a une teneur dramatique exceptionn­elle. Ce n’est pas comme un match de foot. Au foot, vous savez combien de temps ça va durer. Au tennis ça peut durer des heures. Et puis le joueur est seul sur le terrain. Souvent, son pire ennemi, c’est lui-même.

Vous allez jouer « Ma vie encore plus rêvée ». Est-ce que le tennis aurait pu être un rêve ?

Oui j’aurais adoré ça. Comme j’aurais rêvé d’être le navigateur François Gabart, ou d’être un grand médecin. J’aurais rêvé d’être plein de trucs. Je n’ai pas confiance en moi, j’ai toujours l’impression que les destins des autres sont plus beaux que le mien.

Pourquoi cette vie que vous racontez est-elle « encore plus rêvée » ? Parce que c’est une deuxième version du spectacle. Parce que le monde a changé, et moi aussi j’ai changé. La première version date d’une époque où le Bataclan n’avait pas encore eu lieu, Daech n’avait pas cette importance. Depuis, il y a eu une élection présidenti­elle, et le Front national a failli passer. J’ai eu très peur. Il n’y avait pas encore eu la souffrance immense des chrétiens d’orient dont on parle très peu. Je suis fasciné par l’absence de manifestat­ions à ce sujet. Les chrétiens d’ici descendent dans la rue contre la loi sur le mariage pour tous, mais pas pour leurs frères qui se font massacrer au MoyenOrien­t. Ça me fait de la peine. Tout cela existe dans le spectacle aujourd’hui. J’essaie d’en parler avec tendresse, et avec humour, parce que je crois qu’on peut rire de tout, mais pas n’importe comment.

On peut rire de tout, mais pas n’importe comment ” Les chrétiens manifesten­t contre le mariage pour tous, mais pas pour soutenir leurs frères d’orient ”

Est-ce que vous pensez que c’est plus difficile de faire rire aujourd’hui ?

Pour moi, ça n’a jamais été facile. Aujourd’hui, il y a moins de facilité et c’est plutôt bien. Par exemple, c’était facile de jouer une folle tordue, mais c’était très homophobe. Aujourd’hui, quand c’est facile et un peu vulgaire, ça passe beaucoup moins qu’avant. Faire rire aujourd’hui, ça demande plus de travail, d’entraîneme­nt, de culture. Et je ne suis pas contre l’idée que ça demande beaucoup plus de travail, parce que je suis un amoureux du travail.

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 ?? (Photo Jean-François Ottonello) ?? Michel Boujenah aurait rêvé d’être un talentueux joueur de tennis, le navigateur François Gabart ou un grand médecin.
(Photo Jean-François Ottonello) Michel Boujenah aurait rêvé d’être un talentueux joueur de tennis, le navigateur François Gabart ou un grand médecin.

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