Caravelle Ajaccio-Nice: une levée du secret défense?
Le doyen des juges d’instruction niçois, Alain Chemama, a adressé au Premier ministre une requête pour tenter de faire toute la lumière, 50 ans après, sur le terrible crash de 1968
Un demi-siècle après la catastrophe, l’enquête sur la caravelle Ajaccio-Nice connaît un spectaculaire rebondissement. Le doyen niçois des juges d’instruction, Alain Chemama, a en effet envoyé la semaine dernière au Premier ministre, Edouard Philippe, une requête en levée du secret-défense. Un espoir pour les familles de victimes de cette tragédie survenue le 11 septembre 1968. La caravelle d’Air France reliant Ajaccio à Nice s’était crashée au large d’Antibes, dans des circonstances qui restent à établir, tuant les 95 personnes présentes à bord.
« Soulagement et satisfaction »
Mathieu Paoli, orphelin depuis le crash, président de l’association des victimes, évoque un « soulagement et une satisfaction». «J’ai le sentiment que c’est une avancée importante par rapport au travail qui est fait par les familles, mon frère et moi-même. Ce n’est pas une victoire. C’est une continuité par rapport au travail que nous faisons, un début de reconnaissance. Le juge a diligenté pendant trois ans des recherches. Le président Macron nous avait déjà répondu que tous les moyens devaient être mis en oeuvre. J’espère que ce sera le cas. Aucun juge, aucun procureur, ne nous avait ouvert les portes jusque-là. » Sous la houlette du juge d’instruction, la brigade de recherches de la compagnie de gendarmerie de Nice a été chargée de l’enquête. Me Paul Sollacaro, avocat niçois de l’association, voit une issue « favorable » à cette requête. « M. Macron a indiqué qu’il serait très attentif. Je le vois mal donner une décision défavorable à la demande du juge. Ce sont les gendarmes et le juge d’instruction qui ont donné cette impulsion. Des éléments n’ont jamais été communiqués à la famille et à la justice, il faut qu’ils soient déclassifiés. C’est plus qu’une avancée, c’est une prise de position de la justice. Ce n’est pas tous les jours qu’un juge d’instruction sollicite la levée du secret défense. La balle est dans le camp du gouvernement, dans le camp de ceux qui sont en mesure de révéler la vérité dans cette affaire. »
La ministre des Armées tranchera
Le Premier ministre devrait saisir la Commission du secret de la défense nationale (CSDN). Son avis n’est que consultatif mais il est très souvent suivi par le ministre des Armées, auquel échoit la décision finale. La ministre des Armées, Florence Parly devra, dans les dix jours de la réception de l’avis, notifier sa décision au juge d’instruction. La fin de cinquante ans de doutes pour les familles ? (DR)