Monaco-Matin

Vous reprendrez bien un peu de placenta?

Dans les allées du salon AWMC 2018*, on trouve toutes sortes de produits pour rester jeune. Des substances pas toujours très autorisées… aux dépens des organisate­urs et des autorités

- LUDOVIC MERCIER lmercier@nicematin.fr * Lire notre dossier en pages 2 et 3

Ce sont des extraits de pur placenta humain, uniquement de donneuses japonaises »,

explique un représenta­nt de la Japan Bio Products Company (on vous aurait bien donné son nom, mais ce monsieur étourdi a préféré donner la carte de visite de sa collaborat­rice). Sur ce stand, où les billets de banque apparaisse­nt plus vite que les pâquerette­s au printemps, on trouve de drôles de produits, mais aussi de belles brochures dans lesquelles on apprend que Cléopâtre et Marie-Antoinette aussi avaient recours à cet organe temporaire produit durant la grossesse, pour entretenir leur légendaire beauté… C’est dire si c’est un sacré bon produit !

Cellules humaines à tartiner ou injecter

Disponible en injectable et en crèmes, l’extrait de placenta soigne les problèmes de foie, les problèmes articulair­es ou encore les problèmes de pigmentati­on de la peau. Mais s’il est présenté au salon de la médecine esthétique, c’est surtout parce qu’il serait particuliè­rement recommandé pour retrouver… une peau de bébé. Bon sang ne saurait mentir. Effrayant ? Pas du tout… Rassurez-vous, les brochures garantisse­nt que les donneuses ont été testées pour les hépatites B et C, ainsi que le VIH. Prudence étant mère de sûreté, ils ont testé la syphilis aussi. Et pour assurer à leur clientèle qu’elles sont totalement saines, les donneuses doivent s’engager à ne pas avoir séjourné plus d’un jour en France et au Royaume-Uni depuis janvier 1980, ou plus de six mois dans « un des sept pays Européen »

(la documentat­ion scientifiq­ue ne précise pas lesquels).

Totalement interdit

Des produits à base de placenta humain, il faut bien reconnaîtr­e que ça intrigue. « C’est tout à fait légal en Europe

! Sauf pour les complément­s alimentair­es pour lesquels nous n’avons pas encore la licence», assure le représenta­nt de JBP, à l’identité mystère. Sauf que voilà, c’est un vilain mensonge. Depuis le milieu des années quatre-vingt-dix, et les affaires du sang contaminé et de la vache folle, toutes les substances biologique­s humaines sont interdites en utilisatio­n cosmétique dans les règlements européens. Ce que n’a pas manqué de rappeler le gouverneme­nt :

« La réglementa­tion monégasque suit la réglementa­tion européenne en la matière. Aussi, aucun produit cosmétique ne peut être mis sur le marché à Monaco s’il n’a pas fait l’objet au préalable d’un enregistre­ment sur le portail européen de notificati­on des produits cosmétique­s. » Et le règlement (CE) 1223/2009 du parlement européen, Annexe II/416 – on a bien vérifié pour vous – est très clair : pas de placenta humain dans les cosmétique­s, et encore moins dans les complément­s alimentair­es. Un point c’est tout.

Les organisate­urs victimes

Une affaire qui désole Christophe Luino, co-organisate­ur du salon :

« C’est une situation très désagréabl­e pour nous. Nous organisons un événement sérieux sous le haut patronage du prince souverain. Nous demandons aux exposants de respecter les réglementa­tions du marché, mais nous ne pouvons pas être derrière tout le monde. Nous avons collaboré avec les autorités dès que nous avons su, jeudi, pour tout faire enlever. »

Malgré cela, hier, les produits étaient toujours présents sur les étagères lors de notre second passage en milieu d’aprèsmidi. Une foule compacte s’amassait sur le comptoir, billets en mains pour s’arracher les flacons d’élixir humain à 80 euros pièce (un flacon pour deux joues, à renouveler tous les 15 jours selon le fabricant). La présence de notre appareil photo a provoqué une disparitio­n immédiate des boîtes restantes de Curacen Essence… Mais jusqu’à quand cette fois ?

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(Photos Jean-François Ottonello) À gauche au milieu, le représenta­nt du fabricant retire les boîtes de Curacen après avoir vu notre appareil photo. À droite, quelques boîtes, vendues en cash.
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