Monaco-Matin

La hantise du bourbier

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Notre-Dame-des-Landes ne sera bientôt plus qu’un lointain souvenir. Désolé les zadistes, mais le combat est inégal: face à  gendarmes bien organisés, l’évacuation est inévitable, même si elle peut encore durer quelques heures, quelques jours. À moins d’un drame comme celui de Sivens en  où un jeune manifestan­t, Rémi Fraisse, a perdu la vie, l’histoire semble écrite. Le bocage sera bientôt reconquis, force restera à la loi, l’opinion publique saluera l’opiniâtret­é du gouverneme­nt. Et Emmanuel Macron grappiller­a quelques points dans les indices de confiance. Surtout, il aura échappé au cauchemar de tous les Présidents: le bourbier. Le bourbier n’est pas toujours une terre humide comme celle où l’on patauge dans la Loire-Atlantique. Il peut être social et politique, comme la gestion de la réforme de la SNCF: les matraques et les gaz lacrymogèn­es ne sont alors d’aucun secours (sans être totalement exclus). La bataille se déroule en ce cas sur deux fronts: à la table des négociatio­ns, face aux vieux grognards du syndicalis­me et sur les plateaux télé… comme aujourd’hui , à  heures, sous le feu roulant (ou pas) des questions de Jean-Pierre Pernaut. Chaque bon sondage est une perche pour s’extraire des sables mouvants. Quelques points de perdus et le spectre du bourbier ressurgit. Dans les université­s, c’est plutôt, pour l’instant, un bourbier de la taille d’une mare aux canards qui menace. Les fantômes potaches de Mai- –  ans déjà ! – ont beau flotter au plafond des amphithéât­res, on sent bien que la mayonnaise ne prend pas et que la « convergenc­e des luttes » reste un slogan. À Tolbiac, à Notre-Dame-des-Landes comme dans les gares, la stratégie élyséenne est limpide: laisser la gauche s’époumoner. Elle est encore bien trop faible, depuis son K.-O. de la présidenti­elle pour représente­r une menace sérieuse. La priorité est de capitalise­r à droite en marchant d’un pas rapide – meilleur moyen d’éviter l’embourbeme­nt – sur le terrain des réformes. Quitte à pirater l’un des gimmicks favoris des républicai­ns: au-to-ri-té. Bref, malgré les tensions qui se multiplien­t ces dernières semaines, Emmanuel Macron reste « le maître des horloges » sur le plan intérieur: c’est lui qui impose son calendrier. En revanche, il doit s’aligner à l’internatio­nal sur d’autres présidents que lui. Comme en Syrie où l’on ne savait pas hier, à l’heure où ces lignes étaient écrites, ce que le ciel déverserai­t dans la nuit. Armes chimiques? Bombes américaine­s? françaises? Ou une simple averse comme celle qui est tombée sur nos côtes? Peut-être une autre guerre. Sans doute, un nouveau bourbier.

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