L’impossible exercice
Dire qu’on va devoir remettre le couvert dimanche soir ! Les journalistes du moins. On ne saurait trop conseiller à tous les autres, les veinards, d’opter au choix pour un bon film ou PSG - Monaco sur Canal +. Oh, ce n’est pas que le chef de l’Etat soit antipathique. Loin s’en faut. Regard bleu azur planté dans nos yeux sans perdre un instant de vue son cap, il offre une image dépoussiérée de la France. Son diagnostic, sur le fond, n’est pas davantage en cause. Il y a, sinon urgence, nécessité à bousculer les pesanteurs multiples dont notre pays s’est trop longtemps accommodé. Il doit s’adapter et cela ne va jamais sans sacrifices. Nul ne pourra faire grief à Emmanuel Macron de vouloir réformer. Qu’il ait été élu sur une forme de malentendu ne lui interdit en rien d’appliquer son projet. Mais il ne suffira pas d’un fauteuil en plastique, de rutilants coloriages dans une école bien proprette et du rentre-dedans bienveillant de Jean-Pierre Pernaut pour en persuader les sceptiques. Peut-être ce Président est-il trop jeune pour une France devenue trop vieille ? Quelques correctifs à la marge et des rondeurs de politesse n’ont pas altéré son aplomb. Il est resté droit dans ses bottes, sourire ultra brite en guise de principale concession. Un « Juppé souriant », a imagé un commentateur. Pas sûr donc que l’exercice de pédagogie ait vraiment porté dans la France profonde. Interrogée par TF, cette ménagère qui le trouvait « obtus » n’aura sans doute pas changé d’avis. Comme toujours, ce plaidoyer pro domo ,en forme de catalogue électoral réitéré, n’aura convaincu que ceux qui l’étaient déjà. Il ne pouvait en aller autrement. Emmanuel Macron ne manque ni de conviction, ni d’énergie, ni même de cohérence. Mais dans cet exercice stérile, la jeunesse du style exceptée, il n’a pas fait mieux que ses prédécesseurs. Libérer – protéger – unir, la fermeté mâtinée du souci de ne pas égarer les plus démunis en route, cela ne pèse pas plus lourd qu’un slogan. Cent fois sur le métier… Macron n’est pas Président depuis si longtemps qu’on puisse déjà lui reprocher de radoter. Mais cette câlinothérapie contrainte ne suffira pas à apaiser les colères, légitimes ou illégitimes, d’une France qui se perçoit en souffrance. Paradoxalement, ce chef de l’Etat qui fait tant, au point d’être taxé de confondre vitesse et précipitation, aura donné l’impression hier de brasser du vent. Celui qui entend faire rendre gorge à l’ancien monde s’est inscrit dans son pas le plus pesant : il a fait de la com’. Les fourches caudines de la vieille politique ont définitivement la vie dure.
« Les fourches caudines de la vieille politique ont la vie dure. »