Monaco-Matin

SKI BILAN DE LA SAISON

Deux mois après son départ précipité des JO, l’Isolien Mathieu Faivre est revenu sur cet épisode qui l’a embarqué dans un tourbillon médiatique

- PROPOS RECUEILLIS PAR ROMAIN LARONCHE

Mathieu Faivre a tout fait pour être des championna­ts départemen­taux. Hier, l’Isolien n’avait pas son propre matériel, mais il n’a pas hésité à chausser les skis de son père pour accompagne­r les jeunes licenciés des Alpes-Maritimes, sur la piste du Colombier à Auron. Un grand bol d’air après une saison compliquée, marquée par son exclusion des JO de PyeongChan­g L’Azuréen revient pour la première fois sur la tornade médiatique qu’il a vécue après son géant en Corée du Sud.

Quel bilan global tirez-vous de votre saison ? Ce n’est absolument pas ce que j’en attendais. L’année dernière, je termine mondial de géant, la marche qu’il me restait à gravir, c’était d’aller chercher un globe de cristal. Maintenant, je pense que j’ai beaucoup appris au cours de cette saison : sur moi, sur ce que je devais faire et ne plus reproduire. J’espère que ça me servira pour la suite de ma carrière. Je n’ai que  ans. Quand je vois les performanc­es de Thomas Fanara ( ans) ou Ted Ligety ( ans), je me dis qu’il me reste pas mal d’années devant moi. Certes, les résultats ne sont pas ceux que j’espérais mais, malgré tout, je termine mondial, en sortant  fois en  courses. J’ai quand même fait des ”top ”, “top ”. Le ski est là, il faut juste reprendre de petits réglages, mettre le doigt sur ce qui ne va pas et consolider ce qui marche pour la saison prochaine.

Les changement­s techniques de l’intersaiso­n sont-ils la cause de votre rétrograda­tion au classement mondial ? Il y a pas mal de choses. Les problèmes techniques en font partie, ça a joué sur mon feeling avec le matériel, mais il y a aussi l’aspect mental. Il n’y a pas de révolution à faire. C’est plutôt une multitude de petites choses qui ont fait que ça a été compliqué d’avoir une constance sur la saison et surtout de donner le meilleur de moi-même.

Deux mois après les Jeux, comment analysez-vous votre départ précipité ? Il y a eu des discussion­s avec la Fédération, avec les gens concernés, le président (Michel Vion), le DTN (Fabien Saguez), pour avoir plus d’éléments. Ensuite, j’ai pris mes affaires, je suis rentré à la maison, je m’en suis pris plein la gueule pendant un moment. J’ai décidé de ne rien dire, ce n’était pas la peine d’en rajouter dans les médias. On a chacun nos torts, nos responsabi­lités. Chaque partie a été d’accord pour les reconnaîtr­e. Depuis, je n’ai jamais voulu en rediscuter, mais maintenant, on est tous ensemble dans le même bateau. Et je compte donner le meilleur de moi-même pour la saison prochaine. Ça a été compliqué, car ça a pris une ampleur impression­nante, même à l’étranger, mais il n’y a pas d’amertume. Ça ne sert à rien de revenir dessus, c’est du passé. Ce qui m’intéresse, c’est repartir de l’avant avec la Fédération et mes entraîneur­s.

Cette ampleur vous a surpris ? On a peut-être plus parlé de vous que si vous aviez été médaillé... C’est ça que j’ai trouvé désolant. Ce jour-là, Alexis Pinturault a fait une médaille de bronze, mais on en a deux fois moins parlé. C’est la société d’aujourd’hui, où on a plus tendance à mettre le doigt sur ce qui ne va pas, car ça fait des “clics” et des journaux vendus. Sûrement plus qu’une médaille de bronze. Vous regrettez votre phrase ? Je ne regrette pas le fond. Sur la forme, oui, c’est sûr qu’il y avait une autre manière de le dire. Mais il y a surtout eu des malentendu­s et des amalgames. Quand je m’exprime, je parle de ma course de géant, pas du “team event”. L’année dernière, j’avais donné mes tripes pour cette épreuve (il avait apporté le dernier point qui avait offert le titre mondial aux Français). Si on m’avait sélectionn­é, je me serais battu pour l’équipe. Mais, très honnêtemen­t, je ne pense pas que j’aurais été le meilleur élément pour aller chercher une médaille sur le “team event”, où la technique a évolué, ce qui favorise les gabarits un peu plus lourds. Je reconnais que je n’aurais sûrement pas été une plus-value. Donc, être à la maison, ce n’était pas le problème, mais sur le fond je ne regrette pas ce que j’ai dit. J’ai juste exprimé mon ressenti et mes émotions du moment.

Vous avez aussi été soutenu pendant cette période ? Oui, aussi. Heureuseme­nt, il y a eu beaucoup de personnes - surtout dans le milieu - qui ont compris ce que je voulais dire, que je m’entraînais pour moi et que la déception je l’avais pour ma course. Je ne demandais pas aux autres de la partager. On n’a pas demandé à Alexis de partager sa médaille avec le groupe. Ok, sur la forme, ce n’était pas la manière la plus intelligen­te de le dire, mais je suis entier. J’ai dit les choses comme elles me venaient. J’assume complèteme­nt. Mais quand tous les médias ont parlé de mon exclusion, alors que, fondamenta­lement, je n’ai rien fait de mal... Maintenant j’aurai l’image du skieur exclu des Jeux.

A l’avenir, vous ferez du “politiquem­ent correct” ? Je mettrai les formes, ça passera mieux. Et puis, cette ampleur est arrivée parce que c’était les JO. Si j’avais dit la même phrase en Coupe du monde, personne n’en aurait parlé.

Pensez-vous que votre fin de saison décevante s’explique par les remous de l’affaire ? Je ne pourrai jamais savoir. Psychologi­quement, j’étais usé, je voulais que ça se finisse, pour repartir sur du neuf et de la sérénité. Depuis le moment où je suis remonté sur les skis, début juillet, j’ai senti qu’il y avait quelque chose qui clochait. Il y avait beaucoup de frustratio­n. A l’entraîneme­nt, c’était une lutte avec moi-même pour rester focalisé sur ce qui était bien.

Vous avez hâte de repartir sur la saison prochaine ? J’ai surtout hâte de partir en vacances, pour m’aérer l’esprit. Prendre du recul, respirer, ce sera sûrement la meilleure chose. Je reprendrai fin mai la prépa physique, frais mentalemen­t et physiqueme­nt, avec l’envie de travailler le plus dur possible.

Vous avez envie de retrouver votre place de - ? Ce que j’ai envie surtout, c’est de retrouver du plaisir sur mes skis. Ça a trop rarement été le cas cette saison. Même à Val d’Isère où je fais la meilleure course de ma vie sur Bellevarde, je n’ai pris du plaisir que dans le résultat, pas dans l’instant.

David Chastan, le patron de l’équipe de France masculine, avait décidé de renvoyer Mathieu Faivre pour « raison disciplina­ire, car il a tenu après la course des propos qui ne sont pas dans l’esprit de l’équipe ». L’Azuréen avait déclaré à chaud après sa 7e place. « Le tir groupé collectif des Français ? Si vous saviez ce que j’en ai à faire, c’est vraiment le dernier de mes soucis, Je suis là pour ma pomme, pour faire ma course.»

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 ??  ?? Mathieu Faivre a retrouvé les autres membres de l’équipe de France hier à l’occasion des championna­ts départemen­taux à Auron (Margot et Matthieu Bailet, Nastasia Noens et Karen Smadja.
Mathieu Faivre a retrouvé les autres membres de l’équipe de France hier à l’occasion des championna­ts départemen­taux à Auron (Margot et Matthieu Bailet, Nastasia Noens et Karen Smadja.

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