Monaco-Matin

Un psychiatre reconnu innocent pour la e fois

- JEAN-MARIE FIORUCCI

Le psychiatre monégasque Armand Zemori a-t-il escroqué les caisses sociales de la Principaut­é ? La question tourne en boucle depuis une dizaine d’années. Mais, hier matin, la Cour d’appel correction­nelle a mis également hors de cause ce médecin spécialist­e des maladies mentales. Dans son arrêt lu par le président Éric Senna, cette juridictio­n du second degré l’a relaxé et confirmé le jugement contradict­oire du tribunal correction­nel du 12 avril 2016. Pareille décision peut résider dans le fait que la preuve de la culpabilit­é de l’intéressée n’a pas été rapportée, comme l’a souvent démontré la défense. Est-ce pour autant la fin des péripéties judiciaire­s pour le praticien ? La décision sera définitive après l’ultime voie de recours possible, le pourvoi en révision. S’il est encore trop tôt pour connaître la réaction de la partie civile, l’éventualit­é ne peut être écartée au regard des sommes mentionnée­s par les plaignants. En l’occurrence un préjudice chiffré à 700 000 euros réclamés par les caisses sociales de la Principaut­é CCSS et CAMTI.

« Ce personnage ne pense qu’à l’argent »

Mais qu’est-il exactement reproché au psychiatre par ses adversaire­s ? Une facturatio­n de consultati­ons et encéphalog­rammes fictifs entre 2005 et 2008. Il y est fait état de milliers d’actes litigieux, plus une somme approximat­ive de 725 000 euros perçue par le biais de manoeuvres frauduleus­es. Le médecin aurait demandé indûment le remboursem­ent de soins non effectués ou non médicaleme­nt justifiés. Depuis 2008, ces organismes, investis d’une mission de service public, ont considéré le volume d’activités anormaleme­nt élevé du spécialist­e. Des contrôles sont effectués auprès de plusieurs patients pour vérifier s’ils étaient réellement présents au cabinet. D’où la plainte déposée le 2 octobre

2009 pour escroqueri­e et la dénonciati­on de quelque 146 actes dans la même journée du 16 août 2016. L’accusation, conduite par Me Franck Michel rappelle la fraude : «A la barre, ce psychiatre adopte le visage du profession­nel compétent poursuivi à tort par les caisses dans une vindicte imaginaire. Or, il s’agit d’une carambouil­le où l’on

fait signer aux malades des feuilles de soins en blanc pour se faire rembourser. Ce personnage ne pense qu’à l’argent. Il se croit intouchabl­e parce qu’il est à Monaco et expert ! » Le praticien réfute ces allégation­s.

«Ce volume est possible dans mon activité »

« Les caisses n’ont jamais pu fournir ces justificat­ifs. Quand il m’est reproché d’avoir effectué jusqu’à 146 actes par jour, seules ont été établies quelques journées en 2006 et en 2007 à soixante actes. Ce volume est possible dans mon activité, car je travaillai­s de 6 h 30 à 22 h 30, six jours sur sept et quelquefoi­s sept sur sept. » Le ministère public reste convaincu « de la culpabilit­é du docteur. C’est tellement éloquent que

les experts n’ont pas eu besoin d’examiner les documents. 95 % des procédures HNP (honoraires non payés) ont facilité les facturatio­ns fictives… » Une peine de deux ans avec sursis était requise, avec le régime de la liberté d’épreuve pendant cinq ans afin d’obtenir le remboursem­ent des sommes pour la partie civile. Mais Me Éric Dupont-Moretti, ténor du Barreau de Paris, et l’avocat Arnaud Zabaldano, son homologue du Barreau monégasque, contestent à nouveau la véracité des documents et la fiabilité des témoins. Ils estiment qu’après dix ans de procédure, les caisses ne justifient pas la réalité des chiffres avancés, ni l’importance des dommages et intérêts !

 ?? (Photo Jean-François Ottonello) ?? Maîtres Éric Dupont-Moretti et Arnaud Zabaldano ont contesté la fiabilité des témoins et la véracité des documents.
(Photo Jean-François Ottonello) Maîtres Éric Dupont-Moretti et Arnaud Zabaldano ont contesté la fiabilité des témoins et la véracité des documents.

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