Monaco-Matin

Elle termine sa nuit d’ivresse à  g d’alcool!

- JEAN-MARIE FIORUCCI

Elle avait plus de 11 g d’alcool dans le corps ! ». L’équation du procureur général adjoint Hervé Poinot, vendredi, à l’audience de flagrance du tribunal correction­nel, avait pour principal fondement de souligner la gravité de la conduite en état d’ivresse d’une quadragéna­ire monégasque. Certes, pour obtenir l’effet recherché, le représenta­nt du parquet a multiplié le taux de 2,25 g par le nombre de litres de sang chez l’humain : cinq pour une femme. Mais il ne s’agissait nullement d’un subterfuge afin de requérir une peine afflictive pour l’employée de la SBM, retrouvée ivre au volant de sa Toyota à 6 heures sur la rue Grimaldi. La formule, si elle n’est pas habituelle au cours des débats, visait surtout à susciter une prise de conscience de la prévenue. L’esprit contristé par une nuit passée en détention à la maison d’arrêt, elle apparaît apathique, résignée dans le box. Elle regrette…

« Vous n’arrivez pas à souffler dans l’éthylotest »

À vrai dire, le président Florestan Bellinzona ne l’avait pas épargnée auparavant. «Les policiers vous arrêtent en constatant votre véhicule carrément à la dérive. Vous êtes tellement ivre que vous n’arrivez pas à souffler dans l’éthylotest ! Quand vous y parvenez à la Sûreté publique, c’est-à-dire bien plus tard, vous avez encore un taux de 1,12 mg d’alcool par litre d’air expiré. Quasiment cinq fois le maximum autorisé. Pourquoi avez-vous refusé de signer les documents ? » La détenue est dans l’incapacité d’expliquer son comporteme­nt. «Votre parcours éthylique fait peur, poursuit le magistrat. À 20 heures, au restaurant, vous buvez quelques verres de vin ; à 22 h 15, au Gerhart Café : deux rhum-coca ; à 22 h 30, au casino de Beaulieu : on remet ça ; à 3 heures, au Sass’ Café : encore trois rhum-coca. Enfin vous terminez au Flashman… Et vous reprenez votre véhicule avec tout l’alcool que vous avez ingurgité ! Vous avez passé la nuit à boire et à conduire… » L’intéressée évoque une séparation douloureus­e, difficile, astreignan­te au quotidien… Ses abondantes libations auraient été une sorte de remède pour oublier un instant souffrance­s et supplices cumulées, insupporta­bles pour une femme seule avec des enfants. « On comprend la complexité du divorce, conclut le président. Mais le problème ici c’est de conduire. Après, vous pouvez boire tout ce que vous voulez… »

« Elle fait la fête pour évacuer cette misère morale »

En vérité, l’alcool est un faux ami pour le procureur général. « Il pose plus de problèmes qu’il n’en résout. Avec le risque que l’on ne confie plus ses enfants à cette mère. Même si des SMS reçus ne sont pas à la gloire de ceux qui les écrivent… Cette audience doit être une prise de conscience. Comme Madame n’a jamais été condamnée, prononcez une peine de deux mois d’emprisonne­ment assortie du sursis et 600 euros d’amende. » En défense, Me Thomas Brezzo essaie d’attendrir les juges avec des phrases chargées d’émotion. «La situation familiale de ma cliente est compliquée, avec un conjoint qui n’assure pas l’alternance de la garde des bambins. La prévenue s’en occupe seule et essaie de trouver une solution. Elle a un peu trop fait la fête pour évacuer toute cette misère morale. Malgré cela, les gamins sont épanouis. Attention à la sanction appliquée : elle peut être lourde de conséquenc­es et grever son emploi en risquant de perdre son agrément ! » Le tribunal suivra les réquisitio­ns du ministère public. Sauf pour l’amende passée à 1 000 euros. Cette mère de famille ne retournera pas en prison. Émue, elle se jette dans les bras de son avocat et éclate en longs sanglots…

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La conductric­e affichait un taux d’alcoolémie  fois supérieur à la normale.

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