Monaco-Matin

«Un besoin d’intégratio­n dans un groupe de pairs »

Questions à Michèle Battista, pédopsychi­atre à Nice

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Le docteur Michèle Battista est pédopsychi­atre à Nice.

Êtes-vous de plus en plus souvent confrontée à des mineurs qui offrent leur corps ? Nous sommes confrontés à ce problème oui. De plus en plus ? Je ne pourrais pas le dire. Ce que l’on voit ce sont des adolescent­s qui confondent affection et contacts physiques pouvant aller jusqu’à des relations sexuelles. Chez ces adolescent­s en grande fragilité psychologi­que, c’est une quête affective. Le besoin d’affection… Et lorsque le sexe est tarifé ? Là, se pose la question : que va devenir l’argent? L’argent devient un but pour s’acheter des choses afin de s’intégrer dans un groupe de pairs. C’est le signe d’un malaise, d’une souffrance. L’ado se demande comment faire pour être comme les autres. Il en arrive à la conclusion que grâce à son corps il peut obtenir le teeshirt à la mode – pardonnez-moi cet exemple, mais c’est ça – qui lui permettra de se faire remarquer, accepter dans un groupe d’ados. Parfois cela est aussi purement pathologiq­ue. C’est-à-dire ? Je pense à un cas que j’ai, celui d’une toute jeune fille très fragile qui ne trouve pas sa place, qui n’arrive pas à se situer par rapport aux autres. Elle vend son corps et après avec l’argent elle s’achète des choses dérisoires, futiles : des bonbons, des viennoiser­ies… Pour elle, c’est seulement une quête de plaisir sensoriel, d’affection, de plaisir immédiat.

Ces mineurs arrivent-ils à poser le mot prostituti­on sur leurs actes ? Non. Ce mot ne fait pas partie de leur vocabulair­e. Pour une ado soit elle est “une pute”, désolée de parler comme ça, soit elle ne réalise pas. Et puis lorsque certaines réalisent vraiment, alors c’est la honte, c’est difficile à porter. On peut aller jusqu’à la dépression, la tentative de suicide. Actuelleme­nt il y a un hiatus entre sexualité, relation sexuelle amoureuse et pornograph­ie. Les ados ont une grande difficulté à mettre du sens à tout ça.

Les réseaux sociaux sont-ils responsabl­es ? Non, il ne faut pas tout leur remettre dessus. La paraprosti­tution a toujours existé, notamment dans les amphis pour payer ses études. Disons que les réseaux sociaux, sont des facilitate­urs.

Les garçons sont concernés ? Bien sûr, on voit souvent des jeunes garçons qui se vendent pour payer des toxiques. Ou bien avoir l’impression d’avoir une consistanc­e. Les relations sont homosexuel­les et hétérosexu­elles.

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