Monaco-Matin

« On doit remettre en cause le droit du sol »

Le président des Républicai­ns a présenté hier un arsenal de douze propositio­ns pour « sortir la France de l’immigratio­n de masse ». Il suggère notamment une restrictio­n du droit du sol

- PROPOS RECUEILLIS PAR THIERRY PRUDHON tprudhon@nicematin.fr

Laurent Wauquiez reprend du poil de la bête. Quatre premiers mois de présidence difficiles n’ont en rien altéré son souci de restaurer une droite cash, sans crainte du qu’en-dira-t-on. Tout naturellem­ent, c’est sur le terrain de l’immigratio­n qu’il a lancé hier sa contre-attaque. En formulant douze propositio­ns drastiques, comme une compilatio­n des plus sévères potions concoctées ces dernières décennies en la matière par la droite intransige­ante, de Charles Pasqua à Nicolas Sarkozy. Rien de franchemen­t nouveau, donc, mais une volonté plus affirmée que jamais du président de LR d’assumer des choix sans ambiguïté. Quitte, une fois de plus, à être taxé de proximité avec le Front national…

Vous proposez une synthèse des mesures les plus musclées suggérées par la droite depuis des années, de Pasqua à Sarkozy… Ces propositio­ns sont le fruit d’un travail de plus de deux mois avec les meilleurs experts sur le sujet, dont Eric Ciotti qui l’a supervisé. Vous avez raison, il y a une époque où la droite disait déjà cela. C’était celle de Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy et Charles Pasqua au début des années , quand elle avait un discours clair sur l’immigratio­n. Mais depuis trop longtemps, elle a capitulé sur ces questions. Au moment où je veux reconstrui­re la droite, je souhaite qu’elle réassume un discours ferme, clair, qui dise qu’il faut sortir la France de l’immigratio­n de masse, par laquelle on s’est laissé submerger. Ceci étant, le fait de sortir du droit du sol est une propositio­n neuve. Nous n’avions jamais assumé d’aller jusque-là aussi clairement. De la même façon, il est nouveau de dire que nous voulons voir remis en oeuvre de manière systématiq­ue le principe de la double peine. Aujourd’hui en France, un prisonnier sur cinq est étranger. Mes propositio­ns sont celles d’une droite qui se réveille mais qui n’oublie jamais qu’il faut dire et surtout faire, car c’est là-dessus qu’on a déçu. Mon obsession est de revenir à une droite qui ait le courage de ses idées. La droite ne gagne que quand elle affiche du courage.

Sur quels critères seraient votés les plafonds migratoire­s ? Il n’y a pour moi qu’un critère qui vaille: combien d’étrangers les Français veulent accueillir chez eux. Aujourd’hui, ce sont les passeurs et les juges qui choisissen­t. Et Emmanuel Macron est très laxiste. Jamais la France n’avait délivré autant de titres de séjour depuis quarante ans qu’en  ( , ndlr). A ce rythme, on accueiller­a un million d’immigrés en plus en cinq ans, c’est une folie. Actuelleme­nt, on délivre les titres de séjour au fil de l’eau, il n’y a pas de pilote, on décide à l’aveugle. Moi, je veux qu’on remette un pilote et que, chaque début d’année, on définisse un total au-delà duquel on n’ira pas. Beaucoup de pays procèdent ainsi. Nos capacités d’intégratio­n sont saturées, ce qui fait le lit du communauta­risme et de l’intégrisme.

Et sur quelles bases voulez-vous durcir le regroupeme­nt familial ? On a accepté l’idée qu’un étranger qui s’installait en France pouvait

faire venir en moyenne trois à cinq membres de sa famille. Emmanuel Macron a même prévu dans la loi en discussion qu’on puisse faire venir non seulement ses parents, mais des frères et soeurs. On va créer un nouvel appel d’air totalement déraisonna­ble. Je veux qu’on revienne à des règles strictes : si vous voulez faire venir quelqu’un en France, il faut être capable de le faire vivre sur vos revenus et non sur les allocation­s. Il faut aussi un logement susceptibl­e de l’accueillir. L’immigratio­n familiale, ce sont aujourd’hui   personnes par an que la France ne choisit absolument pas.

Comment seraient mesurés l’adhésion à nos valeurs et le degré d’intégratio­n pour l’acquisitio­n de la nationalit­é ? Je considère d’abord qu’on doit remettre en cause le droit du sol, qui est détourné. Actuelleme­nt, si des étrangers en situation irrégulièr­e ont un enfant, celui-ci acquiert de fait la nationalit­é française. Si les parents sont en situation irrégulièr­e, le droit du sol ne doit pas pouvoir s’exercer et il ne peut y avoir d’acquisitio­n de la nationalit­é. Sinon, c’est une prime à l’immigratio­n clandestin­e. Ensuite, on est le seul pays au monde à offrir notre nationalit­é à des gens qui ne parlent même pas français. Je veux qu’on exige qu’ils respectent la France. S’ils ont commis un délit, ils doivent partir. Et ils doivent adhérer à nos valeurs. En signant une charte d’engagement. On ne peut supporter que des gens qui ont obtenu la nationalit­é française considèren­t que la charia est supérieure aux lois de la République. Ceux qui ne sont pas d’accord avec l’égalité homme - femme n’ont rien à faire chez nous. Nous devons sortir de l’hypocrisie. A force d’avoir nourri une culpabilit­é, comme Emmanuel Macron l’a fait en Algérie en affirmant que la France avait commis un crime contre l’Humanité, on se retrouve avec des gens qui viennent chez nous et demandent à la France de changer plutôt que de s’y adapter.

Ce contrôle du respect de nos valeurs serait lourd à gérer… Non. Si elles ne sont pas respectées, on doit pouvoir embrayer sur la déchéance de la nationalit­é. Ce que je trouve lourd à gérer, c’est cette immigratio­n que l’on n’arrive plus à réguler.

Quelle maîtrise minimale du français préconisez-vous ? Il faut pouvoir s’exprimer dans notre langue sans la moindre difficulté. Mais ça ne suffit pas. Je ne veux pas non plus de gens qui parlent français et professent la haine de la France. Je veux qu’on s’assure de la volonté de respecter la France. J’ai trop retenu l’histoire de Leonarda. On prend trop souvent notre nationalit­é parce qu’on aime le RSA, pas parce qu’on aime Victor Hugo. Quelqu’un dont le droit à l’asile est refusé reste en France dans  % des cas. Ce n’est plus tenable. C’est pour cela que je plaide aussi pour que tous ceux qui sont rentrés illégaleme­nt ne puissent jamais obtenir une régularisa­tion et un titre de séjour. Vous le voyez bien à Vintimille, les gens qui sont reconduits à la frontière reviennent aussi vite. C’est une histoire sans fin.

Vous pensez vraiment que priver de naturalisa­tion par le droit du sol les enfants d’étrangers entrés illégaleme­nt se révélerait dissuasif ? Oui. Cela mettrait un coup d’arrêt à l’appel d’air de l’immigratio­n illégale. En France, nous sommes submergés parce que celui qui entre irrégulièr­ement sur notre sol espère être régularisé.

La lutte contre le travail illégal est un vaste chantier qui déborde la question migratoire… Quand on a  % de taux de chômage et qu’on accepte le travail détaché et le travail illégal, on marche sur la tête. Il faut donc aussi lutter contre les employeurs qui font travailler des clandestin­s dans des arrière-cours, car cela contribue également à l’appel d’air.

Evoquer un référendum, n’est-ce pas un brin démagogiqu­e ? Ce serait démagogiqu­e de demander leur avis aux Français ? Emmanuel Macron envisage un référendum sur la proportion­nelle et on ne pourrait pas leur demander leur avis sur l’immigratio­n, alors que c’est le problème majeur ? C’est aux Français de choisir la France qu’ils veulent et de faire taire les donneurs de leçons politiquem­ent corrects.

Sur ces questions migratoire­s, qu’est-ce qui vous distingue finalement du Front national ? Le vote FN est aujourd’hui une impasse, car Marine Le Pen ne sera jamais en position d’être aux responsabi­lités. Moi, je ne recule pas. J’ai trop connu la droite qui trahissait. Et mon sujet n’est pas de me dire en quoi mes idées peuvent être différente­s de celles des autres. Ma seule question est d’apporter des réponses aux Français. Mes propositio­ns sont juste fondées sur l’obsession de stopper l’immigratio­n de masse.

On prend trop souvent notre nationalit­é parce qu’on aime le RSA...”

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(Photo C. Dodergny) « Le droit du sol est aujourd’hui détourné. »

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