Monaco-Matin

INTERVIEW « Priorité à la formation »

Yves Crespin est quasiment arrivé à mi-mandat (son 2e) à la tête du comité départemen­tal. Il peut donc poser un regard expert sur la situation du basket dans les A.-M.

- RECUEILLIS PAR PHILIPPE HERBET

Homme d’affaires averti (il est dans la gestion immobilièr­e) et quinquagén­aire qui, sous des allures débonnaire­s, masque la froide déterminat­ion du « tonton flingueur », Yves Crespin fait partie de ces dirigeants qui n’hésitent jamais à retrousser les manches de la chemise dès lors qu’il en va de l’intérêt supérieur du basket. Président du comité  depuis maintenant  ans, mais aussi à la tête du club du Cannet (Nationale ) où, chaque soir de match à Principian­o, il traîne sa bonne humeur et son sens de la formule (en tout cas dès que ses obligation­s fédérales le lui permettent puisqu’il est aussi responsabl­e des observateu­rs nationaux de la commission arbitrage), il porte aujourd’hui un regard lucide sur son sport. Et a visiblemen­t la ferme intention, avant de remettre en jeu son mandat, d’aller au bout de tous ces dossiers en cours qu’il entasse sur son bureau…

Peu de comités départemen­taux peuvent revendique­r une telle densité de clubs au plus haut niveau, avec les Sharks d’Antibes, la Roca Team monégasque et le Cavigal chez les filles. Une chance, non ? Très peu de comité, effectivem­ent, et encore plus de la taille du nôtre puisqu’on ne compte aujourd’hui que  licenciés (+%, malgré tout, en six ans, NDLR), peuvent s’en prévaloir. On a un petit territoire mais on est richement représenté au plus haut niveau. Avec les clubs que vous avez cités, mais pas que…

Mais finalement, n’est-ce pas un peu l’arbre, ou plutôt les arbres, qui cachent la forêt ? Photo Ph. H

éléments, au lieu d’être contraints de quitter la région et d’aller au bout de la France pour continuer à progresser, ont cette possibilit­é d’aller à Monaco ou à Antibes. Chaque année, les pôles espoirs de ces clubs accueillen­t nos talents en devenir, et, évidemment, ça nous permet régulièrem­ent de “sortir” des joueurs du cru. De valoriser ce qui se fait ici en terme de formation. Pour nous, voir ces jeunes réussir, ici, et parvenir à passer profession­nels, c’est une belle réussite. Et un vrai plaisir… De toute façon, on a besoin d’avoir des clubs de haut niveau, parce que ça tire tout le monde vers le haut. Et nous, de ce point de vue, on a de la chance…

Si on met de côté le haut niveau, quelles sont les priorités actuelles du comité ? On a aujourd’hui  clubs affiliés. Et, encore une fois, notre priorité, c’est la formation des jeunes joueurs, mais aussi celle des cadres et des officiels. On constate aujourd’hui que nos clubs sont un peu à bout de souffle et que l’on Photo JF Ottonello plus en plus, sur les quartiers sensibles et on sensibilis­e à cette occasion les jeunes aux méfaits de l’alcool, de la drogue, etc. Ce volet “social” fait désormais partie de nos prérogativ­es et on a un rôle important à jouer, nous comités, parce que, justement, nous sommes proches des territoire­s.

Quelles difficulté­s majeures avez-vous à gérer ? Le plus compliqué, et c’est de plus en plus le cas, c’est l’aspect financier des choses. Si l’on veut éviter des catastroph­es, on sait déjà que certains clubs devront fusionner. On a vécu une saison noire dans le départemen­t, puisqu’en dehors des trois clubs qui squattent le haut niveau, on a vécu énormément de déceptions sportives. Avec pas mal d’équipes condamnées à la relégation. On n’avait quasiment jamais vécu de scénario pareil. Ca veut dire que tous, nous devons nous remettre en question, et nous adapter. Justement, se remettre en question, ça veut dire quoi ? Que faut-il changer ? C’est tout simple, aujourd’hui, il n’y a plus d’argent. Or, c’est le nerf de la guerre. Et si on ne parvient pas à trouver de nouveaux partenaire­s, c’est devenu quasi-impossible de s’en sortir. Mais humainemen­t, j’ai de la peine pour tous ces petits clubs qui se débattent dans leurs ennuis financiers.

Au-delà, n’est-ce pas aussi le désaveu des politiques sportives mises en place ici et là ? Certaines communes préfèrent investir davantage sur les jeunes que sur les équipes premières. Il faut s’adapter. Vous savez, toutes ces réformes gouverneme­ntales en cours se répercuten­t aussi sur le sport. Et on n’a plus le choix, il faut parvenir à fonctionne­r avec de moins en moins de moyens.

Alors, concrèteme­nt, quelles sont les solutions ? À mes yeux, c’est d’exploiter cette chance que l’on a d’avoir aujourd’hui un vivier plus qu’intéressan­t de jeunes joueurs.

Photo S. Botella On a du potentiel, mais on ne s’appuie pas encore assez sur ça. Ce qu’il faudrait, c’est avoir de bons entraîneur­s pour mettre tout ça en musique. Oui, parce que le bon choix, c’est de mettre les meilleurs coaches sur les équipes de jeunes, et pas sur les équipes premières. C’est comme cela qu’on parviendra à un niveau de qualité suffisant. Parce qu’on pourra recruter ou garder les meilleurs espoirs pour façonner l’avenir. Selon moi, c’est la solution, même si je n’ignore pas combien, parfois, ça peut être compliqué puisqu’à l’évidence, tout le monde ne joue pas le jeu.

Malgré tout, l’argent une fait pas tout… Bien sûr et c’est la raison pour laquelle j’insiste sur la nécessité d’avoir une politique de formation efficace. Mais le basket, ces dernières années, a aussi beaucoup évolué. Et on ne peut plus vivre sur nos acquis. La Fédération a déjà initié pas mal de réformes, en oeuvrant par exemple pour le développem­ent massif du x ; qui est aujourd’hui olympique. Ça veut dire, à notre niveau, cibler un autre public et mettre en place de nouveaux championna­ts. On va chercher de nouveaux licenciés là où ils sont, dans la rue. Mais, à moindre coût pour tout le monde, c’est une bonne alternativ­e.

Et dans ce souci, nationalem­ent partagé, d’ouvrir la discipline au plus grand nombre, que compte réellement faire le comité ? On va déjà recruter un conseiller fédéral. La décision est actée et l’appel d’offres va d’ailleurs être lancé tout prochainem­ent. Son rôle sera de détecter les potentiels et de leur offrir la possibilit­é de s’entraîner davantage, ce que les clubs n’ont pas toujours les moyens de faire. Monaco, Antibes, Nice : terres de basket. (Photo F. Bouton)

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Pourquoi ? Il y a aussi déficit dans ce domaine ?
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