Monaco-Matin

Congeler ses ovocytes pour pallier le déclin de la fertilité Retour sur l’actu

Faute de pouvoir « congeler » leurs ovocytes en France où la pratique n’est pas autorisée, de plus en plus de célibatair­es françaises se tournent vers l’Espagne

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Les Françaises seraient de plus en plus nombreuses à souhaiter mettre leurs précieux ovocytes à l’abri du temps qui passe. Sans présenter – a priori – de problème d’infertilit­é, ces femmes s’inquiètent de voir l’horloge biologique tourner. Et avec elle, décliner leur fertilité. Le jour où elles rencontrer­ont enfin le partenaire avec lequel elles souhaitero­nt construire une famille, seront-elles en mesure de mener à terme un projet d’enfant? Sans réponse, celles qui en ont les moyens envisagent alors la vitrificat­ion ovocytaire de confort. Une pratique qui n’est pas autorisée en France. Et c’est le plus souvent vers l’Espagne (Barcelone, Madrid, Bilbao, Valence) – où se trouvent les cliniques les plus reconnues en Europe dans le champ de la PMA comme IVI – que la plupart de ces femmes se tournent.

Le Dr André Guérin, ancien médecin à l’APHM (Assistance publique - Hôpitaux de Marseille) est responsabl­e du départemen­t francophon­e d’IVI(1) en Espagne. Il nous éclaire sur ce phénomène.

En quoi consiste la vitrificat­ion ovocytaire ? Il s’agit d’une technique de congélatio­n ultrarapid­e, ou cryoconser­vation ; concrèteme­nt, les ovocytes matures ponctionné­s après stimulatio­n ovarienne sont immergés dans de l’azote liquide à une températur­e de -°C. Ils peuvent ainsi être conservés plusieurs années. Grâce à ce processus, la capacité de procréatio­n des ovocytes est maintenue intacte au jour de la vitrificat­ion jusqu’au moment de leur utilisatio­n. Pour augmenter ses chances ultérieure­s de grossesse, il est conseillé de congeler ses ovocytes avant l’âge de  ans. (Photo François Baille)

Initialeme­nt, elle était destinée à des femmes atteintes de maladies graves imposant des traitement­s susceptibl­es de les rendre stériles. L’efficacité de la technique a incité à se poser la question d’autres indication­s possibles ; c’est ainsi que depuis quelques années, la vitrificat­ion ovocytaire est plus largement envisagée comme un moyen de combattre les effets de l’âge sur la fertilité.

La technique de vitrificat­ion a été difficile à mettre au point. La décongélat­ion des ovocytes en particulie­r constituai­t une étape très délicate. La technique est-elle désormais au point ? Absolument. Il reste que les chances d’avoir un bébé

dépendent bien sûr de l’âge de la femme au moment de la vitrificat­ion ovocytaire, et du nombre d’ovocytes prélevés. Plus ce nombre est élevé, meilleures sont les chances de réussite. Il est par ailleurs vivement conseillé d’entreprend­re cette démarche avant  ans. Le taux de survie des ovocytes après décongélat­ion atteint  % chez les patientes de moins de  ans, avec des taux de grossesse de  %. Les chiffres sont moins bons chez les femmes plus âgées.

Quel est le profil des Françaises qui se tournent souvent vers l’Espagne pour congeler leurs ovocytes ? La plupart d’entre elles ( %) sont célibatair­es ; le fait de ne pas avoir de partenaire est un élément déterminan­t dans le recours à la vitrificat­ion ovocytaire. Elles exercent des profession­s diverses, mais occupent souvent des postes à responsabi­lité. Elles ont en moyenne  à  ans – nous aimerions qu’elles arrivent plus tôt pour les raisons que j’ai invoquées précédemme­nt – et n’ont pas d’enfant. Elles savent que plus elles attendent, plus leurs chances d’obtenir un enfant sont réduites.

Elles auraient la possibilit­é de patienter encore quelques années… On sait que les résultats de la PMA, si ces femmes doivent y recourir, sont beaucoup moins bons après  ans. Il leur faudra alors subir des traitement­s éprouvants, répétés, avec malheureus­ement des échecs fréquents et parfois comme seule solution, le don d’ovocytes. La vitrificat­ion ovocytaire est au point depuis plusieurs années, mais ses indication­s sociales [vitrificat­ion dite de confort, Ndlr] sont récentes. Aussi, a-t-on trop peu de recul pour répondre précisémen­t à cette question. Ce que l’on peut dire, sur la base des  à  % des femmes qui ont « décongelé » leurs ovocytes, c’est qu’elles reviennent beaucoup plus tôt que nous l’avions pensé : en moyenne à peine , ans plus tard. Et  % d’entre elles reviennent avec un conjoint !

Combien de temps les ovocytes peuvent-ils rester congelés ? Il n’y a pas de limite à la conservati­on. La seule limite réside dans la limite d’âge pour le recours à la PMA, soit  ans théoriquem­ent pour les femmes en Espagne. Mais elles viennent bien avant ;  % des Françaises qui consultent dans notre centre sont âgées de  à  ans ; même sans cadre légal restrictif, les femmes se montrent raisonnabl­es.

Que sait-on des enfants issus de ces ovocytes congelés puis décongelés ? Les enfants nés après vitrificat­ion n’ont pas plus de malformati­ons ou de problèmes de santé à la naissance que les autres bébés. Mais ils continuent d’être suivis sur le long terme. 1- IVI : Instituto Valenciano De Infertilid­ad

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Au bout de combien de temps ces femmes reviennent-elles chercher leurs ovocytes ?
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André Guérin

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