Le regard du patron des patrons sur l’évolution du pays
Alors que le trafic est encore perturbé aujourd’hui, Philippe Ortelli, patron des patrons, explique les conséquences sur la vie du pays. Évoquant aussi logements, retraites ou travail du dimanche
Pour ce huitième épisode de grève de la SNCF depuis début avril, les déplacements des salariés de Monaco sont aujourd’hui encore affectés. Des retards forcément récurrents… Il s’agit aussi pour les patrons de s’adapter. L’occasion pour Philippe Ortelli, président de la Fédération des Entreprises Monégasques (FEDEM), de donner sa vision de la vie économique et sociale du pays.
Financièrement et du point de vue de l’organisation, quel est l’impact des grèves SNCF sur la vie des entreprises ? C’est bien sûr au niveau de l’organisation des entreprises que l’impact est le plus sensible, avec des retards de collaborateurs qui dépassent souvent une heure par jour. Dans les PME, nous trouvons des solutions temporaires mais qui touchent surtout la vie des salariés. Bien sûr, les grèves SNCF affectent la vie des salariés. En revanche, dans les secteurs d’activités liés au tourisme, nous commençons à constater une baisse de la fréquentation car certains touristes annulent leurs voyages par peur des grèves des transports.
L’annonce de l’ouverture des rails à la concurrence en dans notre région vous vous laisse-t-elle entrevoir une amélioration ? J’attends de voir pour le croire ! Quand on voit que même la région, qui finance les transports par le rail en Paca, n’arrive pas à tirer grand-chose de la SNCF pour le moment, on peut se poser des questions. Sur le papier, l’ouverture à la concurrence a toujours quelque chose de bon pour les usagers, que ce soit sur le prix ou la qualité de service. Mais je suis assez pessimiste quand je vois l’évolution de la situation dans ce domaine.
Avec dorénavant plus de salariés et une majorité d’entre eux qui La dernière infrastructure lourde construite en France pour améliorer l’accès à la Principauté date de plus de ans (le tunnel Rainier-III montant). Pour l’accès des pendulaires, la priorité est d’en construire de nouvelles. Je n’oublie pas non plus les problèmes de circulation intra-muros. Là, dans un premier temps, et avant même de se pencher sur le phasage des travaux, indispensables pour Monaco, il faut penser à tout pour fluidifier l’existant, en particulier aux sorties de la gare SNCF aux heures de pointe, avec par exemple des agents dédiés. Et puis favoriser aussi le retour des salariés le soir. Il en va de notre attractivité. Les solutions à long terme sont de loger nos salariés à proximité.
La loi limite les dimanches et jours fériés travaillés et l’USM souligne que les dérogations au droit sont trop souvent données par l’inspection du travail (notamment chez Carrefour). Qu’en pensez-vous ? La FEDEM est évidemment favorable au travail le dimanche, réglementé et dûment indemnisé, afin de maintenir notre attractivité commerciale par rapport aux régions voisines. Pour éviter d’avoir à débattre sur le recours aux dérogations, il vaudrait mieux se pencher sur la loi et la faire évoluer en l’adaptant au monde réel.
L’usage de CDD à répétition et le travail intermittent sont, selon les syndicats, grandissants.
Pourquoi une telle augmentation ? N’est-ce pas installer le salarié dans une situation précaire ? Les statistiques de l’IMSEE ont montré que le travail temporaire structurel en Principauté reste stable à environ % du nombre total de salariés. Il n’y a donc pas d’augmentation dans ce domaine, sauf dans le secteur du BTP où les contrats sont par nature des missions d’intérim et des CDD. Concernant les CDD, la loi et la jurisprudence en limitent l’usage et transforment en CDI tout renouvellement excessif. De manière générale, personne n’a intérêt à la précarité du travail que vous évoquez.
Plus de logements pour les salariés à proximité de Monaco, utopie ou perspective envisageable ? Des solutions existent.
L’approche du logement pour actifs doit être globale. Tout le monde doit jouer le jeu. N’oublions pas que cela participe aussi à la réduction des problèmes de circulation et d’accès à Monaco. J’en appelle donc aux plus hautes autorités françaises et monégasques pour engager un plan massif de constructions pour actifs à ans, afin d’accueillir au moins salariés dans les communes limitrophes. Les terrains et surfaces utilisables existent. L’investissement est rentable pour tous économiquement. C’est avant tout un choix politique pour dépasser les règles administratives actuelles côté français, totalement inadaptées aux enjeux démographiques et topographiques.
Où en sont les négociations sur le rapatriement des caisses de retraites complémentaires à Monaco ? À quand une décision effective ? Quelles conséquences pour les patrons et les salariés ? Tout d’abord nous vous confirmons l’accord de principe par les commissions paritaires de l’ARCCO et de l’AGIRC du maintien des conditions dérogatoires actuelles pour le départ à la retraite pour les trois prochaines années. Ensuite, les dernières études démontrent clairement la viabilité d’un régime autonome de retraite complémentaire monégasque. Nous travaillons, sur ce sujet, en total accord avec les organisations syndicales. La spécificité de notre modèle monégasque nous y contraint. Il faudra que les partenaires sociaux français le comprennent et nous laissent partir à des conditions réalistes. Cette situation n’a jamais été prévue dans les textes, il faut donc que chacun soit raisonnable. La tendance est au tertiaire, y compris à Fontvieille historiquement dédié à l’industrie. Est-ce selon vous inéluctable et profitable pour Monaco ? C’est l’éternel débat. Il y a des industries qui peuvent prospérer à Monaco. C’est un secteur qui a su s’adapter au fil du temps et qui contribue à une certaine forme d’indépendance économique pour Monaco.
Pensez-vous que Monaco a une carte à jouer dans le développement des nouvelles technologies (blockchain, etc.) ? La Principauté doit pouvoir saisir les opportunités qui s’offrent à elle. Les nouvelles technologies en sont l’illustration. Dans ce domaine, le rôle de l’État est d’être un régulateur et un stratège. Mais dans certains cas, il faut parfois savoir accélérer pour rester compétitifs.
Evidemment favorable à l’ouverture des magasins le dimanche ” Accueillir au moins salariés dans les communes limitrophes ” Monaco est un chantier permanent depuis ans ”
Selon la formule « quand le bâtiment va, tout va », on peut considérer que la Principauté se porte à merveille, non ? À cause de la baisse importante des investissements de l’État après , on a pu oublier que Monaco est un chantier permanent depuis ans. Quoi qu’en pensent certains, et pour le vivre au quotidien, les volumes construits en ce moment sont % inférieurs à ce que nous avons connu dans les années et . C’est pourtant ce cycle vertueux d’investissements de l’État et des privés qui permet à notre pays, par sa reconstruction permanente, de continuer de s’adapter à son temps et de maintenir un modèle performant et généreux pour tous.